DomFulmen Posté(e) le 17 février 2013 Partager Posté(e) le 17 février 2013 Bonjour et bonsoir à toi, lecteur égaré qui vient ici en quête de contes et de grandes aventures ! Ou de manière plus concise et terriblement moins élégante : Yop ! Bienvenue donc sur ce topic tout neuf et fraichement pondu, où je vais, au fil du temps, présenter différents chapitres de l'histoire de mon personnage sur le serveur et dans le monde Minefieldien. La plupart seront en grande partie fictifs, même s'ils font référence à de nombreux éléments de notre univers et de notre beau serveur. Néanmoins, j'espère que vous prendrez tout autant de plaisir à les lire que je n'en prend à les écrire ! Certains d'entre vous, chers lecteurs, ne me connaitront sans doute pas, mais cela ne vous empêchera pas, je l'espère, d'apprécier le fruit de mon labeur. Dans tous les cas, je vous souhaite une bonne lecture. Pour information, seuls les chapitres 1 et 2 sont présents sur ce post, car les suivants font dépasser la barre des 60 000 caractères maximums autorisés pour un post forum. Vous trouverez donc sur ce post les liens vers les chapitres suivants qui seront publiés à la suite des commentaires. Pour commencer, et achever un peu le blabla d'introduction, le premier chapitre est en réalité la réécriture complète de ma candidature paysanne d'il y a plus d'un an. Aux plus courageux d'entre vous qui souhaiteraient aller fouiller dans mes messages pour la retrouver tout au fond et faire une comparaison rapide, je vous préviens d'avance : ça pique les yeux tant la différence est flagrante. Le chapitre deux quant à lui, est aussi une réécriture, de mon RP d'entrée à Bel-o-Kube cette fois. Cette fois-ci, j'ai décidé de prendre un chemin scénaristique un peu différent du RP original, mais qui convient mieux à mes RP à venir. Bref, rien de bien intéressant donc. Au passage, je vous renvoie aux chroniques RP de Zovsky, SL, Opera, Tybalt, Ti-ret et encore Ti-ret. Chacun d'entre eux compte parmi les plus belle plumes du serveur et sont des écrivains que je respecte et admire. Ce sont eux entre autre qui m'ont donné l'envie de me lancer dans cette aventure, donc laissez-vous tenter, ils en valent la peine. Bonne lecture à vous ! Chapitre 1 — De Foudre et de Mémoire Dom rouvrit des yeux épuisés, assombris par de ténébreux cernes. Cette nuit encore, il n’avait pas réussi à s’endormir. Il avait somnolé quelques minutes, tout au plus. Comme à l’accoutumée, ses cauchemars et ses paniques l’avaient hanté toute la nuit durant, l’empêchant de prendre du repos. Et comme chaque matin, il ne se souvenait de rien concernant ces mauvais rêves qui l'assaillaient chaque nuit, même éveillé. Peu confiant, le jeune homme sortit avec peu d’énergie de la caverne affleurant la petite falaise voisine du frai cours d’eau à quelques mètres de là, et qui lui avait servi d’abri ces derniers jours. Sur le sol s’amoncelaient les cadavres de nombres de créatures infectes qui tentaient désespérément de faire de lui leur prochain repas. Mais il les repoussait, car il voulait vivre. Il voulait vivre, car il souhaitait savoir qui il est. Dom Fulmen, c’est son nom, et c’était alors son seul héritage, le seul vestige d’un passé qu’il ignorait. Loin au fond de sa mémoire, il voyait des formes floues, de vagues images faussées et incomplètes. Mais impossible de ramener à lui ses souvenirs enfouis. Alors Dom voulait tout simplement vivre, afin de retrouver peut-être la trace de quelqu’un qui saurait lui parler de son ancienne vie. Pour cela, ces monstres non-morts devaient périr. Il récupéra ses flèches parmi celles qui n’étaient pas brisées entre les yeux ou dans la nuque des créatures qui jonchaient la devanture de la petite caverne. Écœuré, il essuya dans l’herbe verte le liquide visqueux et nauséabond qui recouvrait les pointes acérées des projectiles. Ou du moins, celles qui avaient abattu ces créatures verdâtres qui étaient inconnues au jeune assassin. Par son équipement et ses réactions en situation de combat, il en avait déduit qu’il devait probablement, assurer ou avoir assuré un poste de tueur silencieux, ou une quelconque fonction similaire. Il se demanda tout de même depuis combien de temps il avait perdu la mémoire. Il ignorait jusqu’à son âge. Le seul souvenir qu’il avait gardé, c’était cette blessure à la tête, dont la douleur l’avait assailli dès son réveil sur les rives de la rivière avoisinante, où il s’était retrouvé inconscient et amnésique. Malgré tout cela, il lui fallait se nourrir, et se bâtir un abri digne de ce nom. Dom empoigna donc son grand arc d’if enchanté, et ajusta le fourreau à sa ceinture. S’assurant bien de noter son chemin, il s’enfonça dans la forêt dense qui bordait la sortie de sa cachette. L’humidité du matin encore jeune après la nuit noire perlait dans les boucles de sa barbe rebelle qui commençait à pousser depuis son arrivée ici. Par une autre habitude qu’il avait inexplicablement, il rabattit la capuche de sa cape, et cacha sa chevelure blonde et bouclée qui commençait elle aussi à s’humidifier. Pas après pas, il slalomait entre les arbres mornes et sombres, au milieu de la brume matinale. Ceux-ci commençaient à perdre de plus en plus de feuilles à l’approche de l’hiver. Expirant de petits nuages de brume sous la fraîcheur ambiante, Dom rajusta son écharpe grise. Il avançait rapidement, se faufilant entre les branches et les fourrés. Chacun de ses pas se posaient à côté des feuilles sèches et des brindilles, privilégiant la mousse humide et silencieuse étendue tout au long du sol forestier. Bientôt, il approcha d’une petite clairière baignée progressivement par les chauds rayons du soleil qui dépassait peu à peu la ligne d’horizon, au loin à travers les arbres. Il trouverait peut-être ici une proie qu’il pourrait chasser. Il ralentit l’allure, et se glissa doucement derrière un rideau de feuillage. Seuls deux petits papillons nocturnes virevoltaient en rejoignant leurs abris où ils pourraient passer la journée. Le jeune homme encocha tout de même l’une de ses flèches de frêne, qu’il sortit lentement de son fourreau de cuir noir. Toujours rien en face de lui. Il s’éloigna et contourna la zone à découvert qu’offrait la clairière afin de s’enfoncer encore davantage dans les bois de conifères. Un bruissement de feuille attira son attention dans son dos. Il fit volte-face d’un mouvement fluide, rapide et silencieux, tout en tendant la corde de son arc. Rien. Il relâcha non sans un faible soupir le long filament de chanvre tendu sur lequel reposait le trait. Il se retourna afin de reprendre sa route. En face de lui se trouvait une créature de morphologie humaine, le teint verdâtre, qui poussait de longs gémissements gutturaux et bestiaux. Sa chair tombante et en décomposition empestait la mort et la putrescence, tandis que ses yeux vides étaient posés avec un air de profonde envie sur la nuque de Dom. La créature fit un pas. Elle n’était qu’à un mètre du jeune homme. Il devait absolument réagir. Le zombie était bien trop proche pour qu’il puisse dégainer. Il n’avait plus qu’une fraction de seconde pour réagir, donc hors de question de se jeter sur un côté ou en arrière, action qui prendrait trop de temps et le rendrait vulnérable. Il baissa les yeux sur son arc abaissé, mais toujours armé de la flèche profilée. Lui non plus il n’avait pas assez d’espace devant lui pour le redresser tant le non-mort était proche. Simplement, il tendit la corde, alors que les mains s’apprêtaient à le saisir. Il décocha la flèche dans le pied du monstre, qui eut un mouvement d’hésitation et regarda le trait. Dom profita de la distraction du monstre pour faire un bond en arrière et se placer à distance respectable. Voyant son repas s’enfuir, le monstre souhaita le rejoindre. C’était sans compter la flèche qui l’ancrait au sol. Il tomba sur le côté, brisant sa cheville. À terre, il gesticulait en gémissant, tendant ses bras mous vers le jeune assassin. Il faisait pitié à Dom. Par compassion, il tendit une nouvelle fois sa corde, et décocha une flèche dans la tête de celui qui aurait dû séjourner parmi les morts, afin de l’y renvoyer. Celui-ci s’effondra sans un soupir, et cessa tout mouvement. Dom récupéra ses flèches, afin d’être certain de ne pas en être à court trop tôt, puis reprit sa route. Bientôt, des conifères sans cesse plus nombreux se mêlèrent au reste des arbres environnants. En dessous de Dom, tout en bas de la pente raide et moussue qui fendait le sol, à quelques centaines de mètre, il aperçut une laie solitaire entre les pins sombres et givrés. La bête fouillait le sol à la recherche d’une pitance, très probablement de champignons. Enfin une proie accessible. La femelle semblait seule, et n’avait probablement aucun petit à nourrir. Il n’aurait donc aucun remord à lui ôter la vie. Le jeune Dom tendit sans peine la corde et l’if gravé. L’empennage caressant sa joue, son index gauche pointé tel un viseur, tous les muscles de son corps raidis, sa respiration coupée, en attendant que la cible soit visible entre les dizaines, les centaines peut-être, de troncs et d’arbres qui le séparaient d’elle. L’animal s’arrêta dans une magnifique ouverture, mais dont la fenêtre de tir était terriblement étroite. Alors que le sanglier femelle commençait à relever les dépôts divers entassés sur le sol à l’aide de son groin, Dom expira lentement avant de relâcher la corde. Le trait siffla, et fusa droit entre les branchages. L’animal s'effondra de tout son poids avec un faible bruit sourd. La flèche l'avait touché à la nuque, dans la colonne vertébrale, et avait coupé net tout système. La femelle n'avait pas souffert, et n'avait donc pas crié. Satisfait, Dom entama prudemment sa descente de la pente raide, s'aidant des troncs de conifères afin de freiner sa course. Après plusieurs minutes laborieuses, il déposa finalement les pieds sur la couche d'épines orangées qui s'entassaient au fil des jours. Par un élan de maniaquerie, Dom chassa les quelques brindilles et traces qui avaient altéré le fin tissu de ses vêtements. Par prudence, il dégaina sa dague. Pas un seul bruit ne se laissait entendre aux alentours. Pas un seul bruissement dans les branchages. Pas un seul cri animal. Pas même un souffle de vent. Malgré le froid du petit matin automnal, l’atmosphère lourde, pensante, oppressait le crâne du jeune homme en chasse. Sa courte lame légèrement courbe dans la main droite, il empoigna tout de même son arc, et tira une flèche entre son poignet droit et deux de ses doigts. Dague vers le bas, il encocha le projectile. Quelque chose clochait. Dom faisait aveuglément confiance à ses sens et à son instinct, et ceux-ci lui exhortaient vivement de faire demi-tour. Le léger brouillard laissait apparaître l’ombre de la victime de Dom. Une ombre dense. Trop dense. Et plus grande qui plus est que la taille qu’il avait estimée en voyant la laie du haut de son surplomb. L’air, lourd, vrombissait faiblement à ses oreilles tant le sentiment d’insécurité qu’il ressentait était oppressant. Il n’entendait plus que sa respiration, pourtant presque imperceptible. L’ombre de sa proie, cette impression insupportable, tout laissait penser à Dom qu’une force étrange et foncièrement mauvaise était à l’œuvre en ces lieux. Dom cligna des yeux. En une fraction de seconde, alors que ses paupières se relevaient, la légère ombre du sanglier femelle allongée sur le sol se tenait là où était l’ombre noire auparavant. En un instant, la corde était tendue, et le jeune homme fut prêt à décocher au moindre mouvement. Il fit un pas en avant. Rien. Pas à pas, il s'approcha. Malgré son angoisse, il conservait un calme impassible, et parvenait à retenir son cœur et sa respiration affolés. Qu'il soit dans un tel état le terrifiait également. À quelques mètres de distance, il pouvait enfin voir sa victime. Allongée, l'air paisible, elle semblait dormir. La flèche n'avait donc pas été douloureuse. Dom jeta un coup d'œil alentour. Rien. Quelque peu rassuré, il relâcha consciencieusement la corde, laissant tout de même la flèche encochée. Il se pencha sur le cadavre encore chaud. Un mouvement derrière lui se fit entendre, accompagné d'un bruissement de feuille. Par réflexe, Dom fit volteface, envoyant du mêle coup sa dague tranchante. Celle-ci tourna plusieurs fois sur elle-même avant d'entailler profondément l'écorce d'un pin et d'y rester bloquée. Rien. Seules quelques aiguilles voletaient entre les conifères. Immobile quelques instants, le jeune homme finit par retourner à sa principale préoccupation. Il lia les deux pattes postérieures de l'animal, et conserva une longueur de corde suffisante afin de pouvoir la mouvoir avec plus de simplicité. Enfin, il se redressa, passa le lien par-dessus son épaule, et entama le voyage de retour. Passant proche de l'arbre, il en retira sa dague d'acier d'un mouvement sec, et la rengaina. Et, alors qu'il s'éloignait et grimpait avec difficulté la pente humide, encombré par son futur repas, loin derrière lui, une silhouette indistincte aux yeux d’un blanc brillant l'observait avec intérêt entre les troncs innombrables des bois illuminés depuis peu par un pâle soleil masqué par la brume d'automne. Dom s’essuya les lèvres du revers de la manche, les yeux perdus dans les flammes. Sa chasse le laissait perturbé. Il s’était sentit observé alors qu’il ramenait sa proie à son repère, mais lorsqu’il s’était retourné, il n’avait vu que les mêmes arbres moqueurs, raillant sa paranoïa par leur silence exaspérant. Pourtant, ce sentiment ne l’avait pas quitté, et il lui semblait sans cesse qu’une présence épiait ses moindres faits et gestes. Mais partout où il entendait un bruissement quelconque, une silhouette inhabituelle, il ne trouvait que la même forêt qu’il parcourait depuis un nombre de jours dont il avait perdu le compte, inchangée. À présent rassasié, il mit de côté ses préoccupations et plaça le reste de la bête de façon à ce qu’elle rôtisse lentement sur le feu qui mourrait peu à peu. Avant que les braises ne s’éteignent, il aurait le temps d’achever la cuisson afin que la chair de dépérisse pas. En attendant, il lui faudrait un abri, afin de pouvoir s’établir hors de portée des monstres. Un solide pin au tronc large pointait vers le ciel légèrement nuageux, et se trouvait à proximité d’un surplomb que formait la falaise, à quelques mètres du sol. C’était idéal. Ainsi, il ne serait exposé ni d’en dessous, ni d’en dessus. Tout d’abord, il devait tailler les branches qui se trouvaient au futur emplacement de l’habitation de fortune. Le branchage et les aiguilles étaient nombreux et denses, ce qui lui fournissait une bonne base pour établir des cloisons et un sol. Il frotta ses mains l’une contre l’autre, fléchit les jambes, puis bondit. Agrippé par la main gauche à la branche la plus base qu’il avait trouvé, il s’appuya sur le tronc de son pied et, d’une impulsion, se hissa jusqu’à une fissure dans le tronc. Ainsi, il grimpa une branche après l’autre, et atteignit la zone qu’il avait repérée depuis le bas. Dégainant son épée, il trancha sans difficulté le branchage dans une zone assez large. Cela fait, il redescendit prudemment, mais sans difficulté, et observa les arbres alentour. Il lui fallait de quoi se faire rapidement et efficacement un support assez solide pour supporter son poids. Hors de question donc d’utiliser des troncs de diamètre trop important. Il repéra vite quelques végétaux qui semblaient utilisables. Il finit la matinée en taillant patiemment les pièces de bois qui lui serviraient à établir une base à son habitation provisoire. Durant l’après-midi il établit un par un les différents fruits de son labeur du début de la journée, et réussit à faire une base honorable pour son futur abris. Malheureusement, le soleil orange comme la braise atteignit la ligne d’horizon avant qu’il ait achevé sa besogne. Il devrait passer une nuit de plus dans sa caverne. Alors qu’il descendait de l’arbre, il observa le ciel teinté par la douce lueur du soir. Seuls quelques nuages de très haute altitude voguaient lentement vers l’est. La nuit serait claire, et le lendemain promettait donc d’être favorable à la poursuite de la tâche que s’était imposé Dom. Il ramassa le reste de la carcasse à présent cuite près du feu éteint, pour l’amener à l’intérieur de la caverne. La fraicheur la conserverait mieux, et elle serait à l’abri des créatures forestières susceptibles d’achever de la dévorer. Comme les nuits précédentes, il s’adossa contre la paroi au fond de la cavité, son épée à plat sur les jambes, et son arc armé dans les mains. Il rabaissa son capuchon par-dessus ses cheveux blonds, et reposa sa tête sur la surface humide et rugueuse se trouvant derrière lui. Épuisé, il ferma les yeux et, pour la première fois depuis son arrivée, s’endormit paisiblement d’un sommeil réparateur. Alors qu’il sombrait dans le monde des rêves, une légère brise agita les quelques boucles de la chevelure de Dom, et au loin, le ciel s’obscurcissait rapidement. Le ciel s’abattit sur terre. Au même instant, Dom ouvrit les yeux, parfaitement serein et éveillé. Il ne craignait pas la foudre, il l’aimait même, et se sentait proche d’elle. Lorsque le tonnerre grondait, c’était toute l’impétuosité et l’énergie fulgurante des éléments déchainés qui lui murmuraient leurs secrets les plus intimes. Lorsque la foudre frappait le sol avec fracas, c’était toute la finesse et la précision mortelle et véloce de la lumière suivie de l’obscurité qui lui communiquait ses désirs les plus téméraires. Oui, Dom aimait la foudre, mais pas ce qui l’accompagnait à cet instant précis. Venant de l’extérieur, et s’engouffrant dans la caverne tel un animal en danger, un vent terriblement violent, tranchant comme une lame de rasoir et froid comme la mort sifflait à en rompre les tympans du jeune homme. Luttant contre les éléments, il s’avança lentement et avec difficulté vers la sortie. Les bourrasques étaient telles qu’il ne percevait presque rien de l’extérieur. Des arbres s’inclinaient dangereusement, avant de disparaitre, arrachés à leur terre nourricière et à leurs précieuses racines. Par dépit, il rangea sa flèche et passa son arc en bandoulière. Il serait absurde de tirer à l’arc avec cette tempête : une flèche ne parcourrait pas trois mètres avant d’être emportée. Prudent, il garda néanmoins sa lame à la main. Çà et là, quelques monstres résistaient face au vent déchaîné, mais tous finissaient par s’envoler telles de vulgaires brindilles. Une bourrasque extraordinairement violente déstabilisa Dom, qui perdit l’équilibre et recula de quelques pas. Il secoua la tête, légèrement sonné et assourdit. En ouvrant les yeux, il regarda par hasard en direction des grands pins de la forêt qui s’étendait un peu plus loin. Interloqué, il fronça les sourcils. Malgré le véritable ouragan et les intempéries de l’extérieur, un des conifères était parfaitement immobile. Deux petits points brillants, d’un blanc lumineux et immaculé, scintillaient faiblement à son sommet. Impossible d’en déterminer la provenance, la nuit était trop profonde. Un éclair illumina le ciel durant une fraction de seconde, et une silhouette se laissa distinguer au sommet des branchages. Alors, un coup de vent s’abattit sur Dom, qui résistât. Ses pieds glissèrent sur le sol sur une certaine distance, alors qu’il couvrait son visage de ses bras, mais le vent capricieux eut bientôt raison de son équilibre. Il bascula vers l’arrière, et son dos heurta violemment le sol avec un bruit sourd et inquiétant. Il laissa malgré lui s’échapper un bref râle de douleur avant de se laisser repousser encore et de rouler au sol sur quelques mètres. Il resta quelques minutes allongé sur le flanc, respirant avec difficulté. Lorsqu’il reprit pleinement le contrôle de ses membres endoloris, il retourna s’installer contre son mur, s’entoura de sa cape, l’épée à la main, et ferma à nouveaux les yeux avec un grand soupir. Encore une fois, Dom ouvrit les yeux. Les doux rayons du soleil matinal se déposèrent sur son visage, lui apportant chaleur et réconfort. Il se leva, et rengaina sa lame. Un fond de douleur vacante signala sa présence dans son dos. Interloqué, il jeta un œil sous sa chemise de lin : une longue tâche violacée s’étendait au beau milieu de son dos, résultat douloureux de sa chute de la nuit passée. Par chance, ce n’était qu’un hématome, et il ne semblait pas avoir d’os fracturé. Il sortit donc se rendre compte de l’état des lieux. Alors qu’il arrivait à la lumière chaleureuse du soleil, malgré la fraicheur de la saison, un constat s’imposa à lui : tout était ravagé. Le sol détrempé était recouvert de nombre de débris et végétaux, qui provenaient de lieux lointains. Ici, la carcasse macéré et humide d’un pauvre lièvre pris au piège par les vents meurtriers. Là, les débris d’un squelette fracassé contre le sol. De ce côté, le cadavérique tronc massif d’un pin déraciné sur la colline située quelques miles plus loin. Cet omniprésent spectacle de désolation, accablé par la puanteur marécageuse de l’eau en évaporation força le jeune homme à détourner le regard, pour se pencher sur son objectif premier. Il se dirigea sur sa droite, et fit quelques pas. Il s’attendait à ce qu’il allait voir, mais ne put s’empêcher, de désespoir, de tomber à genoux, les yeux fermés, tentant désespérément de garder son calme. L’arbre, le début de son abri, le fruit d’une journée entière de travail, la seule chose qui lui laissait entrevoir l’espoir de prévoir une solution plus durable… Envolé. Mis à mal comme le reste de la forêt. Pas un seul n’avait échappé à la fureur de la tempête, et tous se retrouvaient balayés, déracinés. Tous, sauf un. Le seul, qui, durant la nuit déjà, restait encore intact, pointant sa silhouette noire devant le soleil levant. Déterminé, le jeune Dom sauta sur ses pieds et fila tel un bruissement d’air en direction du pin mystérieux. Lorsqu’il arriva devant lui, la même atmosphère pesante que la veille au matin l’attendait. Prudent, il restait l’épée et la dague à la main, et commença à inspecter le conifère. Celui-ci était effectivement en parfait état. Pas un souffle de vent ne semblait avoir ébranlé ses aiguilles, pas un seul de ses congénères ne semblait l’avoir heurté. Haut d’environ deux cents pieds, et large de quatre, c’était un spécimen robuste, mais en aucun cas que beaucoup des autres végétaux de la forêt alentour. Alors, pourquoi avait-il échappé à ce carnage ? Quelque chose, ou quelqu’un, l’avait-il protégé ? Mais alors, qui aurait… Non. Dom ne termina pas sa pensée, car un mouvement dans son dos attira son attention. Il se retourna en une fraction de seconde en garde, et prêt à accueillir quiconque se dresserait devant lui. Rien. Mais alors, il ressentit un autre bruissement à l’emplacement opposé. Lorsque ses yeux se posèrent à l’emplacement supposé de ce qui se trouvait là, il ne vit qu’une feuille se balancer légèrement. Étonné, Dom abaissa légèrement la pointe de sa lame. Ses sens ne le trompaient jamais, et pourtant, tout semblait prendre un malin plaisir à le rendre fou. Alors qu’il détournait le regard et s’apprêtait à reprendre ses observations, une ombre bondit derrière lui. Il ne la vit que très brièvement, au bord même de son champ de vision, mais elle était très distincte. Une ombre grande, fine, et profonde. Le jeune homme se figea, les yeux écarquillés. Il n’avait pas senti la moindre présence, et la vitesse de cette créature était au-delà de n’importe quelle créature connue. À présent, elle devait être derrière lui. Était-elle dangereuse ? Peu importe, il était angoissé, poussé à bout. Il donna un coup circulaire de sa lame. Rien encore, si ce n’est quelques particules sombres éparses tombant tel un petit nuage fin et allongé de neige, juste derrière lui. Encore une fois, l’ombre se déplaça à sa droite. Puis à sa gauche. Et derrière lui. Partout. Finalement, pour la première fois depuis son réveil sur la berge de la rivière quelques jours plus tôt, Dom fit entendre sa voix. Une voix grave, empreinte de mélancolie et de peur, rauque de n’avoir sonnée durant de longues et fastidieuses journées. C’était une voix qui, malgré sa jeunesse, portait toutes les joies et les peines de ce monde. Une voix torturée, mais apaisante, de sorte que quiconque l’entendrait n’y verrait qu’une voix banale. Alors, le jeune homme s’écria, d’une voix forte, puissante, et pleine d’assurance : « Montre-toi, lâche ! Qui es-tu pour oser m’épier, me suivre, et me torturer ainsi ? Peut-être sais-tu qui je suis, mais j’ignore qui tu es… Je te le dis, montre-toi sans artifices ni ruses, car mon bras et vif et ma lame acérée, et je n’hésiterais pas à faire à nouveau boire le sang à mon épée ! » Aucun bruit, aucun mouvement ne se fit entendre. De rage, Dom vociféra à nouveau, envoyant une branche au loin d’un coup de pied furieux. « Montre-toi ! Raaaaaaaaah !!! » Une brindille craqua. D’un seul mouvement, il était en garde, pointant de sa lame et de son bras tendu le lieu supposé de l’émission du son. Un simple lapin noir le regardait, d’un air interloqué. Il n’avait pas l’air de connaitre l’Homme ou de le craindre. Ses yeux de jais se distinguaient de sa fourrure avec grande difficulté, et cette dernière était indistincte, floue. À bien y voir, tout devenait flou autour du jeune homme. Il s’agenouilla, s’assit sur ses talons, fixant encore le lapin, et retenant à grand peine les larmes qui se bousculaient le long de ses yeux. « Alors, je deviens fou, c’est ça ? Aurais-je déjà sombré dans la folie ? » L’animal pencha la tête sur le côté. Accompagnant son geste d’un soupire, Dom se releva, se tournant pour la troisième fois vers l’arbre. Le lapin tremblait violemment. Alors, une ombre s’étendit devant Dom. Une ombre terriblement sombre et opaque, qui en vint à cacher le bas soleil du matin, et accompagné d’un grincement sinistre semblable à du bois craquant et se tordant. « Non, tu n’es pas encore atteint de démence. » Dom sentit son cœur s’arrêter. Il se retourna, lentement, effrayé. Une créature improbable se présentait devant lui, parfaitement droite. Une créature aussi sombre que l’ombre qu’elle produisait, mais également légèrement transparente. Une créature aux yeux d’un blanc terrifiant et vide, mais d’une allure profondément ridicule. Un groin porcin, de petites ailes de gallinacé, et une apparence maigre étaient ses seuls attributs en plus de sa grande taille. Et pourtant, Dom était loin d’être petit. Ou du moins, il lui semblait que c’était le cas. Incapable de prononcer le moindre mot, mais toujours prudent, Dom Décida de contourner le nouvel arrivant. Désespérément droit, celui-ci regardait droit devant lui, dans le vague semblait-il, bien que personne n’aurait pu déterminer ce que regardait son regard blanc et vide. Mais, plus le jeune homme tournait autour de l’étrange créature, plus il en vint à la conclusion que cette dernière restait tournée face à lui en permanence. Curieux, il fixa le bas de ses longues jambes noires et fines. Lorsqu’il reprenait son mouvement de rotation, les jambes – et vraisemblablement le reste du corps – restaient fixes, mais dès qu’il relevait les yeux, c’était toujours le même visage dérangeant qu’il voyait. Par dépit, Dom recula, toujours l’épée à la main. « Mais… Qui êtes-vous ? dit-il enfin. — Je suis ton dieu, Dom Fulmen. — Pardon ? — Comme je te le dis, je suis ton dieu. J’ai beaucoup de noms, mais tu peux m’appeler le Chickenderpig. — Soit, mais si tant est que ce soit le cas, que me vaut l’honneur de cette visite ? Et pourrais-je savoir de quel droit vous m’oppressez et m’observez depuis deux jours ? Que vous ai-je donc fais ? » Cette fois-ci, la réponse se fit attendre. Ce « Chickenderpig » mettait Dom mal à l’aise. Inexplicablement, il ressentait à sa présence l’odeur du sang, un sentiment de mort, et il ressentait une profonde haine. Il éprouvait une grande difficulté à le regarder dans les yeux, mais il brava son regard sans détourner le sien une seule seconde. Sans même s’en apercevoir, Dom avait saisi le manche de sa dague de sa main gauche, prêt à la dégainer, et celle qui tenait son épée était crispée sur la gaine de cuir recouvrant la fusée de celle-ci. « Rien du tout. Je t’observais juste, j’étais curieux. Mais par-dessus tout, j’ai bien vu que tu es désespérément seul. Ainsi, j’ai décidé de te faire une proposition. — Quel genre de proposition ? demanda Dom, prudent. — Tu es seul, perdu, et tu as d’ailleurs tout perdu. Ainsi, je te propose de t’envoyer dans des contrées bienfaisantes, nouvelles, qui te permettront de tout recommencer, et de tout finir, car tout s’achèvera là-bas. Si tu acceptes, je te suivrais dans ta nouvelle vie et t’aiderais de mon mieux. Tu peux avoir confiance en moi, car je suis Chickenderpig, ton dieu. » Dom le regarda d’un air incrédule. Faire confiance à un inconnu qui nous demande de le faire est peut-être bien la situation suscitant le plus de méfiance. Néanmoins, le jeune homme était désespéré, et l’offre était tentante. Trop tentante. Dom devait se contenir pour ne pas lever sa lame vers lui, et il ignorait la raison de ce sentiment. Il hésita, puis dit enfin : « Quel est le nom de cette contrée ? — Minefield, le monde gouverné par le grand empire de Stendel. — C’est une blague ? Ne venez pas me redonner espoir avec ces ridicules comptes pour enfants. Je ne sais peut-être plus rien, mais je sais encore discerner le vrai du faux. D’où je viens, où que ce soit, Minefield n’est qu’une misérable légende destinée à faire rêver les petits souhaitant aventures, gloire, et épopées. Ce n’est qu’un rêve futile. — Que crains-tu ? Tu pourrais vérifier par toi-même. Tout ce que tu as à faire, c’est toucher cette pierre de diamant, rétorqua-t-il, tendant ladite pierre du bout de l’un de ses bras sans mains. — Est-ce que quoi que ce soit me prouve que je peux avoir confiance ? » Sur ces mots, le Chickenderpig détourna la tête pour la première fois, et regarda un arbuste rescapé. Celui-ci noircit, ses feuilles tombèrent, mais en l’espace de quelques instants l’ensemble se dissipa en une nuée noirâtre. « Tu es encore en vie non ? » Dom fronça les sourcils. Était-ce une menace ? Pouvait-il réellement avoir raison de lui si facilement ? Finalement, il n’avait pas tellement le choix. Lentement, avec beaucoup d’hésitation, il libéra sa main de la dague à sa ceinture, pour la tendre vers le cube bleuté, translucide, aux reflets irisés. Alors qu’il hésitait une toute dernière fois et qu’il s’apprêtait à retirer sa main, son doigt effleura la surface froide et parfaitement lisse de l’objet. Tout tourna autour de lui, et la dernière image qu’il eut fut celle du Chickenderpig l’observant de ses yeux insondables. Bien qu’il n’en fût pas sûr, Dom crut voir se dessiner un large sourire sur le visage noir de l’étrange « dieu ». Une seconde plus tard, il s’effondrait sur le sol. Autour de lui se trouvait de l’herbe, et quelques arbres. Il se trouvait dans une prairie douce, fraiche, et ensoleillée. L’herbe verte lui caressait délicatement le visage. Serrant les dents, il se releva malgré la douleur de son dos. Il s’assura que tout son équipement soit bel et bien avec lui, et observa le paysage nouveau qui se trouvait autour de lui. Il remarqua assez vite une île. Sur cette île se trouvait une gigantesque tour irrégulière de roche. Son regard remonta la colonne, qui supportait en réalité une masse colossale. À son sommet reposait en parfait équilibre une masse énorme, répandant son ombre sur toute la zone alentour. Une ville. Une ville se trouvait là, au beau milieu du ciel d’un bleu profond, reposant simplement sur son simple pied de pierre. Alors cette soi-disant divinité disait vrai. Il s’y trouvait bel et bien. Il était sur les terres de Minefield. Chapitre 2 — De Doute et de Lapins La solitude. L’inconnu. Les regards. Alors que Dom marchait prudemment sur les pavés de cette ville qu’il découvrait, c’était les seuls sentiments qui lui parvenaient. Cette fabuleuse cité, que tout le monde semblait nommer New-Stendel, était magnifique bien entendu. Mais il était étranger à ces terres, il le savait. Et toutes ces personnes qui le regardaient passer d’un œil méfiant le savaient aussi. Par chance, beaucoup étaient en bordure de la ville, là où les gouverneurs avaient organisé un évènement. Un anniversaire, semblait-il. Curieux, Dom s’esquiva dans une ruelle. Navigant entre ombre et obscurité dans la nuit encore jeune, il atteint bientôt les murs surplombant le jardin au nord de la capitale. Là, tous les habitants, même lointains, étaient rassemblés. Un peu à l’écart, au-dessus, se trouvait un gigantesque gâteau flottant par la magie des empereurs et des mages, confectionné spécialement pour l’occasion. Le jeune homme observa la foule en contrebas, joyeuse et festive.Il n’osait pas se mêler à elle. Il s’éloigna simplement. Au coin d’une échoppe marchande, de légers cris se faisaient entendre, couverts par les détonations des feux d’artifices et le murmure bruyant de la foule. Alors que la ville est vide, que les ténèbres se sont répandues sur les pavés, un voleur arrachait sa bourse à une passante, retardataire de la fête. Celle-ci céda en titubant. Elle reprit son équilibre en reculant son pied, alors que le brigand fait volte-face. Dom était en face de lui. Un éclair brillant fusa vers son cœur. La femme leva la main, prête à appeler à l’aide. Une dagua entama sa chute. Près du visage de Dom se trouvait une main gantée et déformée par la force de torsion exercée par celle du jeune homme. Le malfrat entrouvrit les yeux, surpris et entraîné en avant par son élan. Il dépassa Dom, qui lâcha sa main. Déséquilibré, il fut heurté par la lourde botte de son opposant, et roula au sol. La femme commença à crier. « À l’aide ! Au vo… » Interrompue, dans sa main se trouvait sa bourse, alors que Dom s’éloignait et que le voleur fuyait. Sa dague tinta sur le sol pavé. L’ombre de la ville assombrissait d’avantage la nuit sans lune qui baignait le monde. Le tangible n’avait plus sa place ici, où tout n’était que ténèbres, alors que Dom glissait sur les herbes humidifiées par la rosée naissante. Au-dessus de lui, c’est un monde à part qui se réjouissait avec moult rires et boissons. Il ne connaissait pas ces gens. Il n’était pas à sa place ici. Pas pour l'instant. Au moins, il n’était plus seul. Le Chickenderpig avait dit vrai, et il était bien à Minefield. Se trouvait-il cependant dans le même monde que là d’où il venait ? C’était la seule grande question qui se posait à lui. Malgré tout, il souhaiterait pouvoir revenir parmi les siens un jour. Quoi qu’il en soit, seul cet étrange dieu pourrait répondre à ses questions. Souvent, il se sentait observé depuis la veille où il s’était retrouvé envoyé dans ces nouvelles contrées. Même encore à l’instant, il sentait le même regard pesant qui avait retenu ses yeux ouverts la nuit précédente. Mais le Chickenderpig ignorait dédaigneusement ses appels. Qu’importe. La quête de ses souvenirs importait plus. Les lumières de la ville s’estompaient alors qu’il s’en éloignait. Ici au moins, les monstres ne déambulaient pas — ou plus si ce fut le cas un jour — dans la campagne sombre et éloignée des villes. Quelques bruissements et cris fugaces trahissaient même les quelques animaux sauvages cherchant leur pitance du soir. Vers le nord. Il ne savait pas où aller, mais son cœur lui disait de s’y rendre. Il saurait, de toute façon, retrouver son chemin. La solitude pour seule compagne, c’est à la seule et faible lueur des quelques étoiles présentes ce soir-là qu’il se mouvait. Une contracture l’oppresse. Un poids le comprime. Dans cette nuit fraîche et calme, la rosée est partout présente. Ici, seule la douce bise de l’air réconforte, et seul le chant mélodieux et solitaire des grillons apaise. Ici, seule la terre meuble recueille, et seul l’astre lointain veille. C’est vers le nord que va une âme en peine. Solitaire. On dit souvent que c’est à l’aube que l’espoir et la magie œuvrent. Que c’est lorsque les fines gouttelettes de rosée scintillent sous le pâle soleil que les miracles ont lieux. On dit aussi que c’est là, alors que l’esprit est vagabond, qu’il sommeille et veille, que tout est susceptible de se produire. Or, ce matin-là, le soleil levant baignait le monde de sa chaleur autant qu’il brûlait mille fois à travers les nuées iridescentes du matin naissant. C’est aussi là que Dom avait évacué toute pensée. Les yeux flamboyants et agressés — tant par la braise de son sang battant à ses tempes et inondant ses sclères de vaisseaux écarlates, que par la fraîcheur mordante de l’air — il était alors contre un frêne. Il était épuisé, mais une nuit entière à réfléchir et lutter contre lui-même et son désespoir l’avait rendu serein. Fort heureusement, malgré plusieurs jours sans sommeil, la fatigue n’avait encore eu raison de ses sens, à défaut d’avoir sérieusement altéré ses nerfs. Sans un bruit, la corde était déjà tendue et la flèche armée, alors même que le jeune homme était toujours avachi, le dos contre le tronc et couvert de minuscules perles de rosée. Au milieu des brumes en suspension du petit matin, quelques herbes s’agitaient. Alors que les feuilles s’écartaient, deux petites créatures en émergèrent simultanément, face au chasseur immobile et indécis. Deux petits lapins. L’un était d’un blanc immaculé, pur et sans souillure aucune. Indéniablement, son pelage moelleux était dénué de toute poussière. Mais le plus frappant était sans conteste ses yeux, d’un bleu profond, complexe, si bien que Dom eut du mal à s’en détacher pour observer le second. Celui-ci lui était étrangement familier, comme le souvenir vague et confus d’un rêve lointain et incertain. Avant qu’il puisse s’interroger, le second lapin, plus noir que la nuit qu’avait traversé Dom, bondit droit vers son congénère blanc. Pris par surprise, celui-ci n’en était pas moins vorace. À une vitesse alarmante, les coups de griffe et de dents fusaient alors que les deux léporides roulaient au sol dans un ballet de poussière et de fourrure, sous le regard médusé de Dom. Passé l’étonnement de la scène, Dom retrouva le visage calme et épuisé qu’il avait quelques secondes auparavant. Les yeux clos, il entendait toujours le raffut du combat. Déterminé et agacé, il releva les paupières, regardant les deux adversaires sans les regarder. Ombre blanche et ombre noire, chacune fusait. Ces deux petites créatures engagées dans un titanesque combat lutaient ardemment. Dom en avait assez. Assez de ces mystères, assez de ces évènements étranges et vils qui le poursuivaient. Et ce lapin noir, indéniablement lié d’une façon ou d’une autre au Chickenderpig, le mettait mal à l’aise, encore une fois. C’en était trop. La flèche venait de traverser la fourrure sombre lorsque son propriétaire s’évanouit en une vapeur dense et volatile. Ôtant d’une main fébrile le gant de sa main droite, Dom tendit celle-ci vers la frêle boule de fourrure couleur de neige. Sans paraître hésiter ou craindre le jeune homme, il s’approcha en sautillant paisiblement. Malgré son combat, il ne semblait pas blessé, et son pelage immaculé illuminait d’avantage la clarté de l’aurore aux teintes rosées. Le lapin tendit le cou vers les doigts usés et sales d’un homme épuisé, les oreilles droites. Puis il approcha son minuscule museau rose de l’index de Dom, rabattant les oreilles. Il s’approcha encore davantage, jusqu’à finalement agripper la manche de l’habit usé de l’aventurier. Malgré sa petite taille, il tira de toute la force dont il disposait. Dom, intrigué, ne bougeât cependant pas. Le léporide renonça finalement à cette méthode, et s’éloigna quelque peu de quelques bonds avant de tourner un regard interrogatif sur le jeune homme adossé. Puis il refit quelques bonds, et s’assit finalement sur le sol humide, attendant patiemment à l’écart. Que voulait-il ? Que Dom le suive ? Mais pourquoi ? Toujours le bras tendu, le jeune homme s’interrogeait. Finalement, il se risqua à déposer sa main sur le sol humide, et se releva avec peine. Il tituba quelques instants sous le regard presque inquiet du petit animal. Finalement, ce dernier repartit en quelques bonds, suivi de peu par un Dom qui peinait à progresser entre les troncs de chênes et de hêtres centenaires. Pas après pas, il s’éloignait. De minute en minute, d’heure en heure, il continuait de suivre son guide. Sans même y prendre garde, il traversa des forêts, des plaines, une jungle, des plaines enneigées et les flancs de montagnes escarpées. Au loin, il aperçut même un désert solitaire et bouillant de magma visqueux, gouverné par l’ombre lointaine et vague d’une mystérieuse et magnifique construction. En face de Dom, une forêt aux couleurs d’émeraude s’étendait, en bordure même du désert brûlant alors même que le jour commençait à manquait. Une douce fraîcheur aux senteurs de pin, de sève, et de terre humide emplissait l’atmosphère des lieux et éveillait les sens du nouvel arrivant. Malgré son peu d’heures de sommeil, la fatigue qui le tiraillait, il était serein pour la première fois depuis des jours. La lumière décroissante qui s’immisçait entre les branches et les feuilles couleur de jade qui ornaient les branches des chênes et des conifères lui offrait depuis longtemps un état de somnolence reposante et agréable. La végétation, pourtant très dense, ne freinait pas sa course, comme si elle souhaitait son arrivée. En face de lui, la petite créature blanche le guidait toujours entre les racines noueuses et les mousses moelleuses sans se retourner. Puis soudain... Au détour d’un noisetier solitaire, confondu dans la marée immense de ses confrères habitant les bois alentours, s’ouvrit une place sans végétation. En lieu et place de celle-ci se dressait subitement, comme surgissant de la nuit naissante elle-même, une énorme bute de terre recouverte d’herbe verdoyante et abondante. Les flancs de celle-ci, au premier abord abrupt, s’inclinaient progressivement en une courbe discrète mais assurée. Enfin, le tout se rejoignait, formant un dôme à la régularité trop évidente pour être naturelle. Dom ferma un instant les yeux, stoppant sa remontée et son inspection des lieux, envoûté par le calme des lieux. Alors qu’un murmure indistinct grondait calmement à l’intérieur de son crâne, il rouvrit avec émerveillement ses yeux brillants. À présent, il remarquait qu’une ombre imposante lui masquait le soleil, pourtant alors encore à l’horizon. Puis il vit le long des parois de petits filaments, incroyablement nombreux. Il le suivit et arriva bientôt à ce qui semblait être de nombreuses fines et courtes cordelettes. Continuant de suivre la piste, il s'aperçut que celles-ci rejoignaient ce qui était en réalité de petites racines, grosse comme le doigt. Celles-là même étaient issues de plus grosses encore, de la largeur d’un bras, d’une jambe, puis bientôt d’une paire d’hommes placés côte à côte. Ces racines, de plus en plus nombreuses, se mêlaient les unes aux autres, à la terre, plongeaient et émergeaient en un flot confus d’autant de liens reliant leur porteur au sol nourricier. Plus haut, vers le sommet, ces racines se rejoignaient, fusionnaient, jusqu’à former bois et écorce épaisse. Un arbre, s’élevant sur des mètres et des mètres, étendait sa parure sur tous les environs, voilant de son feuillage épais tous le dôme massif sur lequel il reposait et masquant les rayons de l’astre. Un arbre grand, élancé, mais imposant et écrasant de noblesse. C’était un arbre dont le voile était magistral, veillant sur ses serfs en bon seigneur des bois qu’il était, et qu’il est toujours. Dom était émerveillé, et ne pouvait s’empêcher d’éprouver un grand respect pour ce végétal séculaire. « C’est impressionnant n’est-ce pas ? Je ne connais personne qui n’ait pas eu cette réaction en arrivant ici. » Une voix venait de se faire entendre juste en face de Dom. Sortant de son état second, il fit un bond en arrière, surpris. C’est la main à la garde de sa lame qu’il se risqua, une seconde plus tard, à lever les yeux vers son interlocuteur. Il vit tout d’abord une longue robe bleue ciel, semblable aux habits que peuvent porter les magiciens. Puis il vit vite le visage de son interlocuteur. Un visage blanc et qui n’avait rien d’humain. Puis il aperçut son petit nez rose, ses moustaches, son pelage blanc... et ses grandes oreilles dressées. Un lapin. Mais un lapin qui parlait et qui faisait la taille de Dom.Ne sachant que penser, Dom cligna des yeux quelques fois, avant de se les frotter d’un air niais. « Mais qui êtes-vous donc, lança-t-il, est-ce vous qui m’avez mené jusqu’ici ? — Moi ? Non. Je n’ai pas bougé d’ici depuis des jours. Tu peux m’appeler SL. Tu n’es donc pas venu ici de toi-même ? — Un lapin blanc m’a guidé jusqu’ici. — Un lapin blanc ? Hum... Curieux, je ne me rappelle pas avoir croisé un confrère bestial récemment... — Mais, où suis-je au juste ? — Ceci, mon bon ami, est Bel-o-Kube, la seule et unique cité myrmécéenne de tout l’empire. Mais tu n’es pas là par hasard. Viens, je vais te conduire jusqu’à la Reine. — Myrmécéenne ? C’est à dire ? — Suis-moi, je vais te montrer. » Dom était prudent, mais ce lapin géant le mettait tout de même en confiance. Il le suivi donc et s’enfonça dans une cavité à même la paroi de la coupole. Celle-ci était apparemment composée d’une terre très compacte, et assez solide pour soutenir l’arbre au-dessus. Malgré sa mémoire honorable, le léporidé mena son hôte dans une succession improbable de galeries, d’escaliers, tant et si bien que le jeune homme en fut bientôt totalement égaré. À mesure qu’il avançait, le murmure qui résonnait dans son esprit se faisait plus bruyant. Le reste fut assez flou. Tous ces chuchotements de plus en plus oppressants commençaient à tirailler son crâne. Comme la douleur le préoccupait quelque peu, et que le trajet était bien trop complexe pour qu’il puisse le retenir, il fut bientôt arrivé à destination sans y avoir pris garde. Il passa avec une certaine timidité les montants de la lourde et large porte de bois qui ouvrait l’accès à la salle. À peine posa-t-il le pied sur le bois du sol que son esprit fut libéré du flot qui l’assaillait. Une présence indiscernable, lointaine était toujours présente, mais il était de nouveau capable de réfléchir et de penser correctement. Un silence respectueux régnait à présent, et baignait l’atmosphère. La pièce, de forme elliptique, était sobre mais instaurait un respect solennel. Sur les côtés, de petites chutes déversaient paisiblement leur eau claire, tandis qu’à l’opposé de la salle se trouvait une imposante forme. En face de lui se trouvait un trône de terre et de bois. Et sur ce trône se trouvait une créature improbable, si tant est qu’il y ait plus improbable qu’un lapin géant. En face de lui, une fourmi bien plus grande qu’un homme de grande taille se tenait sur le siège. Surpris, Dom ne sut quoi dire. Finalement, c’est SL qui prit la parole. « Ma Reine, voici la candidate donc vous aviez prédit l’arrivée. Jeune homme, à présent présente-toi à la Reine de Bel-o-Kube, Jesollas. » Choisissant d’ignorer pour le moment les questions qui se posaient à lui, mais surtout pourquoi ce lapin mélangeait féminin et masculin, le jeune homme se lança, hésitant. « Eh bien... Je m’appelle Dom Fulmen, à votre service votre Majesté. — Mais d’où viens-tu, et qui es-tu plus exactement ? demanda SL. — Je... Je ne sais pas. Ou plutôt je ne sais plus. Voilà plusieurs jours que j'erre sans savoir qui je suis ni d’où je viens. Je me suis simplement réveillé un soir sur la berge d’un torrent, blessé et trempé. J’y suis resté quelques jours et puis... Enfin c’est une longue histoire. Toujours est-il que j’ai fini par atterrir ici. Mais malheureusement, je ne peux pas répondre plus précisément à cette question » Les minutes furent longues tandis que la Reine semblait tour à tour scruter Dom fixement et regarder le léporidé d’un air interrogatif. Seul le clapotis de l’eau et les cliquetis qui provenaient probablement des mandibules de la fourmi brisaient le silence pensant. Puis une présence. Un esprit étranger s’infiltra brusquement dans l’esprit de Dom, qui, prit par surprise, ne put contenir l’attaque. Enfin, ç’aurait été le cas si il s’agissait bel et bien d’une attaque. La présence, plutôt reposante et rassurante, resta en retrait. Surpris, Dom regarda les yeux à facette de la Reine en face de lui. Puis une voix masculine résonna. « Bienvenue à toi mon jeune ami. Tu n’es pas ici par hasard, sois en sûr. Au fond de ton esprit dort un esprit fourmi, et c’est pourquoi j’ai demandé à Deuxième d’aller t’attendre. — Deuxième ? Un esprit fourmi ? Mais qu’entendez-vous par là ? — Tu as l’esprit fourmi, c’est à dire que tu as la possibilité d’intégrer notre fourmilière en tant que fourmi à part entière. Deuxième, ou SL comme il préfère qu’on le nomme, est le premier que j’ai rattaché à la collectivité. — Mais pourtant, c’est un lapin non ? — Exact. Mais comme tous ici, il a l’esprit fourmi. Il a simplement préféré conserver son apparence. À présent je te le demande : souhaites-tu rejoindre la fourmilière ? Bel-o-Kube sera ton nouveau foyer, et toute notre communauté sera ta nouvelle famille. — Moi ? Une fourmi ? » Dom se retira un instant avec lui-même. Après tout, pourquoi pas ? Avait-il encore seulement de la famille, des amis et compagnons sur qui compter ? Avait-il seulement encore une vie ? Il était temps de prendre un nouveau départ. « Si j’accepte, je pourrais conserver mon apparence humaine ? — Si tel est ton désir. — Alors très bien. Je souhaite me joindre à vous. — Qu’il en soit ainsi. » Aussitôt, son esprit s’ouvrit de lui-même et fut envahi par un flot de paroles, de sentiments. Beaucoup de curiosité surtout, de la part de toutes ces fourmi qui touchaient de la leur sa présence nouvelle. Et des félicitations, des paroles de bienvenue, des encouragements, des messages d’amitié, de fraternité. Ça y est. Il était relié à la collectivité, connecté à toutes ces consciences étrangères et nouvelles, mais terriblement familières. Tant de considération et d’attention lui réchauffa instantanément le cœur, car c’était plus que ce qu’il n’avait jamais eu ces derniers temps. Ça y est, il était une fourmi. Chapitre 3 — De Gemme et de ChangementsLien vers le troisième chapitre. Chapitre 4 — Première partie : D'Ombre et de QuêteLien vers le quatrième chapitre, première partie. Chapitre 4 — Seconde partie : D'Ombre et de QuêteLien vers le quatrième chapitre, seconde partie. Chapitre 5 — Première partie : De Souvenirs et d'AdoubementLien vers le cinquième chapitre, première partie. Chapitre 5 — Seconde partie : De Souvenirs et d'AdoubementLien vers le cinquième chapitre, seconde partie. Chapitre 6 — De Livres et de Marie Lien vers le sixième chapitre. Chapitre 7 — De Retrouvailles et de Vengeance Lien vers le dernier chapitre Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
antonin91 Posté(e) le 18 février 2013 Partager Posté(e) le 18 février 2013 Franchement, J'aime. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Zovsky Posté(e) le 19 février 2013 Partager Posté(e) le 19 février 2013 Mouhaha ! Dom, je me dois d'apporter mon opinion sur cette première publication ! Sans surprise, tu nous sers là un premier très bon cru de ce que j'espère être une longue série d'aventures. Soyons poètes, et disons que tu manies aussi bien les mots que ton personnage manie les armes ! Plus sérieusement, tes passages descriptifs sont rondement menés tout au long de ton texte -j'aime particulièrement le moment précédant le combat avec le zombi, et ton évocation de la foudre De plus, ton personnage est rudement intéressant, tu ménages bien tes lecteurs question suspens et je pense parler au nom de tout lecteur sensé en disant qu'on veut tous connaître son passé. Bref bref bref, vivement que tu nous rédiges la suite ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 19 février 2013 Auteur Partager Posté(e) le 19 février 2013 Merci à tous les deux, ça fait plaisir et ça me motive ! La suite viendra, j'ai toutes les idées pour le chapitre suivant, il faut simplement que je m'y mette. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
ChupaPink Posté(e) le 4 mars 2013 Partager Posté(e) le 4 mars 2013 Yo! Pour voire que c'est pas un style d'écriture que j'affectionne, je dois avoué que c'est vraiment bien écrit. Il en a fait du chemin notre petit Dom, ça grandit si vite ces choses là. Même si ce n'est pas forcément le type d'écriture que j'aime, J'ai quand même bien envie de lire la suite. Bravo Dom Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Mutsuomi Posté(e) le 4 mars 2013 Partager Posté(e) le 4 mars 2013 je t'avoue j'ai pas tout lu encore, j'en suis au début et j'apprécie le style. Mais sérieux, j'ai qu'une chose à dire : LIGERI TE SALUTANT ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
erazat Posté(e) le 14 mars 2013 Partager Posté(e) le 14 mars 2013 Me gusta ! Très bon RP, j'attend impatiemment la suite, Continu ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
antonin91 Posté(e) le 15 mars 2013 Partager Posté(e) le 15 mars 2013 Bon allez tout le monde veut la suite, j'veux que tu continues, c'est un ordre !! Sinon je vais lâcher les chiens et je pense que tu vas avoir très mal ! Va écrire maintenant x) ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 15 mars 2013 Auteur Partager Posté(e) le 15 mars 2013 J'ai commencer à rédiger la suite, rassurez-vous. Ça arrivera quand ça arrivera, même si dans les prochains jours j'aurais un peu plus de temps pour m'y consacrer. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
rodrigo16 Posté(e) le 22 avril 2013 Partager Posté(e) le 22 avril 2013 Jet bien aimmé, continues comme sa! PS: IPhone. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ashugeo Posté(e) le 22 avril 2013 Partager Posté(e) le 22 avril 2013 Jet bien aimmé, continues comme sa! PS: IPhone. Dat troll Vincent, on sait tous que t'as pas assez d'argent pour t'offrir un iPhone. PS : iPhone. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
antonin91 Posté(e) le 22 avril 2013 Partager Posté(e) le 22 avril 2013 Mwahahah quel troll x) Dom, tu fais la suite sinon tu vas souffrir ! J'm'ennuie la ! Il me faut de la lecture Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Knamys Posté(e) le 2 mai 2013 Partager Posté(e) le 2 mai 2013 Dom, dom, dom, dom, dom, la suite, vite ! Oui ! J'ai trop hâte ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 2 mai 2013 Auteur Partager Posté(e) le 2 mai 2013 Yop ! Vos demandes ont été entendues, chers lecteurs, et le chapitre deux est d'ores et déjà disponible ! Vous pourrez le trouver sur le premier post des chroniques. Je vais également rajouter un petit blabla explicatif sur le second chapitre. Rien de très important. Dans tous les cas, bonne lecture à tous, et n'hésitez pas à poster vos commentaires ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
antonin91 Posté(e) le 7 mai 2013 Partager Posté(e) le 7 mai 2013 J'adore le deuxième chapitre, Dom t'as vraiment du talent o/ ! Ps : 1000 message Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 29 août 2013 Auteur Partager Posté(e) le 29 août 2013 Yop à tous ! Ça y est, vous l'attendiez, le voilà : le troisième chapitre de mes aventures ! Tout d'abord, avant de faire une petite introduction à ce chapitre, je tiens à m'excuser de n'avoir pu le poster sur le premier post de mon topic. J'ai (déjà...) atteint la monstrueuse et tant redoutée barre des 60 000 caractères maximums sur celui-ci, et mon troisième chapitre l'amène aux 90 000 et quelques. Je le poste donc sur ce topic-ci directement, et je me contenterais à l'avenir de mettre des liens vers les différents chapitres sur le premier post. Ce troisième chapitre donc est une sorte de chapitre passerelle entre mon RP de Bel-o-Kube et mon RP citoyen. Mon style et mes idées pour l'histoire de mon personnage ayant bien évolué entre les deux, le RP citoyen monstrueusement long que j'avais alors fait en était par extension flou et peu compréhensible, car il manquait cette partie. La voilà donc : ceux qui étaient sortis de mon RP citoyen plein de questions y trouveront une partie des réponses. Pour le reste, il faudra attendre quelques chapitres pour avoir le chapitre rempli de révélations que je prévois depuis quelques temps (et qui sera sans doute mon RP chevalier, j'annonce !). Je précise également que comme dans les précédents chapitres, certains évènements (la fin notamment) son tirés de faits réels qui me sont arrivés sur le serveur mais que j'ai romancé volontairement. Sur ce, bonne lecture, et comme d'habitude n'hésitez pas à commenter ! Chapitre 3 : De Gemme et de Changements L’émerveillement. La surprise. En dessous et loin vers l’horizon s’étendait un océan. Un océan couleur d’émeraude et de jade, mouvant sans cesse et pourtant solidement ancré. La forêt, ondulant sous la douce brise légère du printemps, murmurait avec conviction ses secrets séculaires et agitait ainsi ses bras et parures innombrables. Elle était si dense que l’on en aurait pas vu un nain repus au travers de son feuillage, et les troncs étaient si nombreux que l’on aurait manqué une troupe de nains ivres (en revanche, il ne fait aucun doute qu’on les eut écouté à des lieux de là, à défaut de les apercevoir). Cependant, ces bois n’en étaient pas moins frais, lumineux, et semblaient ouvrir amicalement leurs branches pour quiconque viendrait en paix. Par-delà la cime des chênes, des hêtres, des merisiers, des saules scintillait près de la ligne d’horizon une autre mer, d’azur et de saphir, une mer calme et caressant tendrement la côte de sa houle légère. Ici, un merle bavard faisait entendre son chant. Là, un autre lui répondait ; plus loin, une jeune hirondelle prit part à leur conversation, tandis qu’une adorable famille hérisson rentrait paisiblement au terrier. En effet, le soleil commençait à présent à s’élever et à répandre sur ces terres ses rayons chauds et apaisants. Mais, malgré tout cela, malgré la beauté et la magie enchanteresse de ces lieux, les yeux de Dom n’avaient fait que les apercevoir tant qu’il était resté sans voix. Dans la mer, sur le littoral sud-ouest se jetait une rivière, un maigre fleuve large d’une petite dizaine de mètres à son endroit le plus large, et guère plus profond que la moitié de sa largeur. Ce cours d’eau discret parcourait l’ensemble du territoire, serpentant entre les arbres et les petits reliefs. Il prenait sa source à l’extrême est de la zone accordée aux gens de Bel-o-Kube et du Lac d’Émeraude, au sommet d’une montagne moyenne. L’écume naissante jaillissait de son antre, vive et fraîche, avant de tomber en une colonne fumante jusqu’au pied de la montagne. Là, le courant se séparait en deux, contournant un véritable îlot de terre avant de se rejoindre de l’autre côté. Les deux côtés de cet anneau d’eau enfin réunis, ils poursuivaient ensemble leur route, entre petits lacs et chute, jusqu’à la mer. Or, au centre de cet anneau, régnant et veillant sur le monde, se dressait un improbable géant. Il était si immense que même du haut de la petite colline d’où étaient arrivés les colons, il les dominait tous. Partout sur la petite île, dépassant guère deux centaines de mètres de diamètre, légèrement masquées par quelques arbres plus épars qu’ailleurs, d’énormes racines parcouraient la terre douce et humide. Longues et larges, telles qu’un homme de grande taille aurait pu les parcourir sans se courber sur presque toute leur longueur, elles se rassemblaient au centre du monticule de terre, pour bientôt former un formidable tronc, large et élancé autant qu’il fut régulier et harmonieux. Et ainsi, le corps s’élançait droit vers les cieux, dépassant les nuages. Pourtant, malgré sa hauteur – dépassant de plusieurs fois la taille de la montagne voisine – le diamètre du tronc et la force de ses racines l’empêchait de ployer ne serais-ce que de quelques centimètres sous l’action du vent. Loin au-dessus des quelques amas estivaux de nuages cotonneux, le tronc se séparait en six branches d’un diamètre comparable, bien qu’inférieur. Chacune d’elle ployait jusqu’à s’étendre à l’horizontale sur une centaine de mètres, dépassant ainsi le diamètre de l’îlot en contrebas. Sur chacune de ces branches se ramifiaient de plus petites, et sur chacune d’entre elles une myriade encore plus fine. Ainsi, peu à peu, les branches devenaient brindilles, et celles-ci accueillaient – pendues courageusement – une infinité de feuilles. C’est ainsi que, la tête relevée et le cou endolori d’une torsion prolongée et inconfortable, Dom vit l’Acacia géant, étendant ses majestueux bras au-dessus de sa forêt. C’était en effet un gigantesque Acacia Cornigera, que tous ici surnommaient « Kubnigera ». Les éclaireurs myrmécéens avaient donc dit vrai. Comme décidé durant le voyage, à l’unanimité, leur nation serait donc La Colonie du Kubnigera. Le souffle coupé, Dom s’élança le long du sentier pour aller aux pieds du maître de la forêt. Bien qu’il n’y prêta aucune attention à cet instant, tout captivé qu’il était par cette merveille, chacun de ses camarades près de lui, qu’ils fussent lacustres ou fourmis, était tout aussi émerveillé que lui. Bien vite, une fois qu’il eut trouvé une navette et qu’une jeune fourmi très agréable eut la bonté de lui faire traverser le versant sur de l’anneau aquatique, il fut face au tronc du gigantesque Acacia. Il paraissait vertigineusement grand à présent qu’il se trouvait sous son feuillage illuminé de mille reflets d’émeraude par le soleil matinal, bien davantage que du haut de là où Dom était quelques minutes auparavant. Ce dernier remarqua bien vite qu’un passage était ouvert à hauteur du sol, d’où sortaient moult fourmis. C’est vrai : l’Acacia Cornigera est un habitat de choix pour les fourmis ordinaires. Contre sa protection et son entretien, l’arbre offrait le gîte et le couvert à ses locataires. Maintenant qu’il s’en souvenant, Dom vit effectivement de nombreuses épines sur les hautes branches, qui seraient leur logement à elles autres de Bel-o-Kube, tandis que les gens du Lac s’établiraient dans un village le long des lacs et cours d’eaux qu’ils affectionnaient tant. Curieux, le jeune homme s’enfonça à travers l’écorce épaisse. À l’intérieur, le tronc était creux, de sorte que l’on pourrait plus tard aménager l’intérieur. Déjà quelques échelles étaient disposées, et l’on pouvait aisément se mouvoir dans l’arbre. Fait étonnant, il remarqua que les racines elles aussi étaient creuses. Mais malgré ça, l’intérieur était lui aussi tapisse d’écorce, comme si le Kubnigera avait poussé de manière à ce que l’on puisse l’habiter sans lui faire de mal ou tailler une quelconque galerie dans son bois dur et noueux. Comme chaque Bel-o-Kubien ventait avec ardeur la qualité de la structure supérieure, au niveau des branches, et disait qu’on en ferait une ville aussi belle que la fourmilière, Dom fût curieux et souhaita se faire sa propre idée de tout ceci. Patiemment, il gravit donc la multitude de barreaux d’une des échelles posée çà ou là, pour arriver plusieurs minutes plus tard au sommet, là où toutes les branches se rassemblaient. Comme il s’y attendait, chacune d’entre elles était creuse, de la même manière que le reste de l’arbre. Depuis chaque branche on pouvait atteindre nombre des épines de l’Acacia. Comme il pût en juger, elles feraient en effet de formidables habitations. Bien qu’il ne fût pas une fourmi au sens morphologique du terme, il appartenait tout de même à la fourmilière, était relié à la collectivité. Par conséquent, il souhaitait tout naturellement s’établir dans le Kubnigera même. Inexplicablement, il s’y attachait déjà et avait au fond de lui un désir naissant de veiller sur ce géant. Il repartit bientôt au niveau de l’herbe fraîche. Il croisa bien certains de ses camarades lors de ses pérégrinations, mais comme il devait attendre le soir tard le premier conseil général de la Colonie du Kubnigera, il choisit d’explorer un peu les environs. Dom se choisit donc une direction en fonction de la course du Soleil afin de pouvoir retrouver aisément son chemin, et, s’y tenant, il s’enfonça dans la forêt. Il appréciait, pour une fois, de se retrouver seul et loin de la vie bouillonnante et conviviale de la fourmilière. Il marcha donc, slalomant entre les arbres et déposant pas après pas ses pieds sur la mousse fraîche du sol, jusqu’à ce que vienne – d’après son estomac et la position de l’astre dans le ciel – l’heure du déjeuner. Le jeune homme affamé s’installa donc sur un petit rocher émergeant du sol et dégusta son repas précaire – du pain, un morceau de saucisson et du fromage de brebis sortis d’une de ses fidèles sacoches – sous le regard attentif et investigateur d’une famille de moineaux. Une fois sa collation dégustée, il reprit sa route, toujours aussi curieux de savoir quel secret pouvait renfermer cette forêt coupée du monde. Il ne fût pas déçu. Il marcha durant deux heures, peut-être trois, de sorte que l’après-midi avait bien débuté et que le soleil avait depuis un certain temps déjà amorcé sa descente. Le jeune explorateur était donc sur le point de décider son retour sur ses pas afin de rentrer avant que les ombres ne s’étirent et qu’elles incitent les créatures hostiles de la nuit noire à se montrer, lorsqu’un détail attira son attention. Intrigué, il s’écarta légèrement du chemin qu’il avait pris, et s’approcha de l’objet de son interrogation. Comme il n’avait cru le voir, une racine du Kubnigera sortait effectivement du sol sur une demi-douzaine de mètres de longueur pour deux bons mètres en hauteur. Surpris, et avec raison, de trouver une racine si éloignée de l’arbre, Dom s’en approcha donc afin de l’examiner. La racine semblait banale, et elle regorgeait de vie comme le reste de son propriétaire ? Le jeune homme en fit le tour, passant sa main sur l’écorce rugueuse. Soudain, sa main s’adapta bien – étonnamment bien même, si ce n’est parfaitement – à un nœud. Étonné, il regarda avec curiosité ses doigts placés dans les plis ligneux. Sans trop savoir pourquoi, il appuya de ses doigts sur certaines des aspérités du bois et effectua rotations et manipulations selon un ordre qu’il semblait connaitre, ou comme si une ombre lui dictait la succession tel un marionnettiste. Surpris de ce qu’il venait de faire malgré lui, Dom recula d’un pas et retira sa main. Il ne s’éloigna pas beaucoup plus, car un subit tremblement du sol, bien que léger de prime abord, devint si violent que le jeune explorateur médusé posa un genou au sol afin de conserver un relatif équilibre. Près de lui, quelques animaux fuyaient le raffut qui vrillait les tympans du jeune homme, tandis que des feuilles détachées de leur propriétaire par la secousse se déposèrent sur le dos, la chevelure et le sol autour de lui un tapis de feuillage. La protubérance d’écorce qu’avait manipulée l’intéressé quelques secondes auparavant entama une rotation horaire lente mais sûre, et ce faisant s’enfonça dans la racine. Alors qu’une raisonnable et légitime inquiétude gagnait peu à peu l’aventurier, tout bruit et toute secousse cessèrent, mis à part peut-être la fuite éperdue de quelque animal effrayé. Quelques secondes à peine, alors que Dom n’osait plus faire un mouvement et se relevait simplement, à l’affut et la main à la garde de son épée, et un claquement sourd à la sonorité étrangement métallique autant qu’elle fût profonde et lourde, se fit entendre et résonna quelques instants. À tout ce capharnaüm inaudible succéda bientôt un silence oppressant et dérangeant. Le nœud reprit la rotation qu’il avait stoppé, mais dans l’autre sens, et bien plus vite. Le bois craquait, grinçait, gémissait en un son aigu en un son désagréable. Le morceau indistinct de racine en rotation gagna de l’ampleur, et était maintenant un large cercle tourbillonnant sur toute la hauteur de la racine. Enfin, aussi surpris que fût Dom, il vit du centre du cercle jusqu’aux bords, la spirale s’ouvrir et glisser, couler sur l’intérieur. Durant ces quelques secondes – des siècles pour le jeune homme – une ouverture béante ouvrant sur le sombre intérieur de la racine s’était formée. Pour Dom, la curiosité surpassa l’inquiétude. Nouant une bande de lin usée sur un morceau de bois trouvé par terre, sous le lit de feuilles nouvellement tombé, il l’enduisit d’un peu d’huile prévue pour cet effet qu’il gardait pour ce genre d’usages, et l’enflamma d’un mouvement sûr et avisé de son briquet. Il passa la tête par l’ouverture. Comme il ne pouvait aller à droite, la racine étant bouchée, il se dirigea donc sur la gauche, en direction de l’arbre, et s’engagea sur la pente douce et humide de l’intérieur de la racine. À la suite d’un tremblement, plus court et violent que quelques secondes auparavant, un claquement retentit. L’ouverture s’était refermée plus loin, et Dom ne pouvait qu’avancer à présent. Longtemps, il marcha dans l’obscurité, à la seule lueur de sa torche, tantôt courbé sous le plafond bas et marchant d’un pas vif mais prudent sur le sol glissant et moussu, tantôt avançant lentement et à tâtons dans d’étroits rétrécissements du conduit. Bientôt, le passage s’élargit et gagna en hauteur. Par chance, comme sa torche commençait à faiblir – et, comme il s’en aperçu sous peu, n’allait de toute manière plus être utile – le tunnel végétal aux senteurs multiples et envoutantes de sève semblait arriver à sa fin. La botte du jeune homme butta contre un obstacle, qui selon toute vraisemblance obstruait la totalité du chemin. Il tâtonna quelques minutes la paroi d’un bois froid et impénétrable avant de se rendre compte qu’un léger courant d’air passait par-dessous la cloison. Ou plutôt, la porte. Il tenta vainement de la pousser, ma ne l’ébranlât pas d’un cheveu. Sans savoir quoi faire, alors que les ténèbres voletaient autour de lui, il effectua sans trop y penser quelques manipulations sur le battant. Encore une fois, sans qu’il ne sache comment il pouvait savoir comment faire, la porte s’ouvrit et glissa sur le sol. Subitement, la racine s’évasa, et rejoignit le tronc de l’arbre. Une énorme caverne se trouvait à l’intérieur, et la base où marchait Dom rejoignit la roche de la cavité. D’un pas lent et solennel, le jeune homme s’avança, les yeux écarquillés. Incontestablement, il se trouvait sous les racines du Kubnigera, plus profondément que personne n’oserait jamais creuser. Il marchait à présent sur une plate-forme entourée d’un gouffre qui semblait sans fond. IL voyait ainsi un immense pilier, large et solide, s’enfoncer et disparaître dans les ténèbres suffocantes, et qui soutenait la passerelle. De l’eau cascadait çà et là, et de nombreux joyaux et minerais d’une valeur inestimable scintillaient à fleur de roche, ciel étoilé au milieu de la nuit caverneuse. Cependant, Dom n’aurait jamais pu en voir autant avec sa simple torche, qu’il ne tarda pas à déposer sur le sol, toute inutile qu’elle était à présent. Une lumière brillante et diffuse émanait du centre de la salle, pareille à l’éclat froid et apaisant d’un ciel d’été lors d’une nuit de pleine lune. Irréelle, une immense gemme, si grande que même en tendant le bras le jeune et grand homme qu’était le Bel-o-Kubien n’en atteignait clairement pas le haut, reposait là. Elle brillant d’un fort éclat vert profond sans pour autant que sa lumière fût agressive, et elle illuminait toute la caverne, se reflétant comme autant de lanternes sur toutes les gemmes et métaux des parois. Une colossale énergie s’en dégageait, et Dom soupçonnait, bien qu’il n’eût alors aucune notion de magie, que la puissance dégagée par cette pierre était directement liée à la vigueur de la forêt comme à la taille de l’arbre. D’une forme parfaitement ovoïde, légèrement translucide, elle siégeait là. De même que l’Acacia géant semblait veiller sur sa forêt, il tenait ici sa bienfaitrice entre ses racines, la couvant et l’abritant. Bientôt, Dom s’aperçut qu’en réalité le joyau flottait dans le vide au-dessus d’un trou géant dans la plate-forme, sans aucun support ni accroche qui fut apparent. Décidément, il découvrait dans une même journée toutes les merveilles les plus exotiques et étonnantes que plus jamais le monde ne pourrait lui offrir à l’avenir. Craintif autant qu’il fût respectueux, il osa tout de même s’approcher. Ce soir, une fois que les conseillers de la Colonie seraient choisis, il leur en parlerait en secret. Si les personnes administrant la cité se devaient de connaître l’existence d’une telle pierre, la nouvelle ne devait pas s’ébruiter. Dom avait déjà délibéré que celle-ci était trop précieuse et vitale pour le Kubnigera pour prendre le risque de la laisser à portée du premier venu. Dom tendit un bras hésitant vers la gemme, mourant d’envie mais n’osant la toucher. Elle était tellement belle qu’il craignait de la briser ou de l’altérer de ses mains impures. Une ombre. Alors que les doigts tremblants du jeune homme frôlaient presque la surface de la pierre, il aperçut une silhouette sombre de l’autre côté, à travers les miroitements, qui l’observait fixement. Lentement, alors que ses instincts se réveillaient, le jeune guerrier tira légèrement sa lame et recula de quelques pas. Au sol, la flamme de sa torche vacilla, s’éteignit en un claquement sec. Sursautant, Dom fit volte-face et tira son épée. Rien. Seulement la torche fumante. Sans attendre, il se retourna vers la gemme. Il lâcha un juron : il était tombé droit dans le piège, et durant la seconde où son dos était tourné, l’ombre avait disparue. Même sans l’avoir clairement vue, il n’avait aucun doute sur l’identité de celui qui se jouait de lui à cet instant. Par prudence, il fit tout de même un tour de la gemme. L’intrus semblait s’être échappé. Dom redirigea donc son attention sur la merveille qui trônait toujours à côté de lui, non sans oublier d’aucune façon son visiteur surprise. Celui-ci s’était fait plus discret depuis l’arrivée à Bel-o-Kube du jeune aventurier, et malgré quelques fois où il se sentait observé, ce dernier était en paix. Le Chickenderpig ne lui inspirait pas confiance, et même s’il lui devait une certaine reconnaissance pour l’avoir mené sur les terres Minefieldiennes, il restait tout de même sur ses gardes à chacune de ses apparitions. À présent, il était mal à l’aise autant que préoccupé. Ses yeux se perdirent au milieu du flot indistinct et mouvant qui semblait parcourir l’intérieur de la pierre précieuse. Alors seulement, Dom s’aperçut que l’air était très frais, et qu’une brume légère y flottait lentement. Sans doute la nuit était-elle sur le point de tomber au-dehors ? Dans tous les cas, le jeune homme s’emmitoufla dans son écharpe et sa cape tout en laissant s’échapper un frisson. Il commençait à présent à se dire qu’il ferait mieux de remonter à la surface. Malheureusement, l’entrée qu’il avait empruntée s’était vraisemblablement refermée, et il était à présent enfermé dans cette salle close, seul avec lui-même et la gemme. La gemme ? Oui. Il l’avait oublié l’espace de quelques instants. Mais à présent, il la contemplait de nouveau, oubliant le problème de la sortie. Malgré toutes ses craintes et son admiration devant elle, il fut tout de même saisi d’un profond désir de ne serais-ce que l’effleurer. Après tout, quelle importance ? Qui le verrait ? Lui en voudrait ? Et pourquoi avoir peur de toucher une simple roche translucide ? Non. Non ! Dom secoua vivement la tête. Il perdait ses esprits, il le sentait. Il ne savait pas pourquoi ni comment, mais quelque chose – ou quelqu’un – lui faisait perdre toute raison. Il devait s’éloigner, partir d’ici avant de faire quelque action inconsidérée. Quelque chose de mauvais était sans nul doute à l’œuvre. Il ne devait pas céder. Son instinct lui dictait de fuir avant que quelque chose n’arrive contre son gré. Il recula d’un pas. Se retourna. Sa paume rencontra une surface lisse et glaciale. Il retourna la tête d’une lenteur macabre, les yeux exorbités rivés sur ses doigts adhérant à la pierre sans qu’il ne l’eut voulu d’aucune façon. Il arrêta presque de respirer autant que son cœur cessa de battre. Le temps lui semblait stoppé, et il était comme paralysé, tant par la frayeur irrationnelle qui s’emparait de lui que par le froid ambiant de plus en plus prononcé qui l’engourdissait. Un picotement léger parcourut son membre tendu. Sa tête bourdonnait, tandis qu'une présence à l'esprit étrange et vaste s’insinuait lentement et sans aucun mal dans ses pensées, se glissait avec une mortelle et implacable lenteur dans chacun des recoins les plus sombres et oubliés de son âme. Dom ne pouvait opposer aucune résistance et devait, impuissant, rester le témoin impuissant de cette chose qui explorait sans distinction chaque bribe et chaque cachette de son esprit, de ses souvenirs, de tous ses sentiments les plus secrets et enfouis. Celui ou ce qui l'explorait aussi librement dégageait une aura de malfaisance et de sadisme qui ne semblait pas lui appartenir. Au fond de cette noirceur apparente survivait une faible lueur, un mince et survivant éclat de bonté teintée de peine et de regrets qui luttait lui aussi. Le picotement devint une morsure et se répandit dans son corps tout entier. Un brasier le consuma de l'intérieur, sans qu'une seule partie de son être en réchappe. Chacun de ses muscles était un incendie, son cœur fondait telle la roche brûlante d'un volcan, et des étoiles naquirent à l'intérieur même de ses yeux, lui ôtant la vue. Le jeune homme meurtri aurait hurlé à la mort s’il avait pu ne serait-ce qu'entrouvrir les lèvres. Des odeurs nouvelles et nauséabondes lui parvinrent sans même passer par ses narines, comme s’il les sentait depuis sa tête. Ces odeurs avaient un sens, se déclinaient en des milliers de variantes au sein de la pièce seule, et transmettant des sensations et des pensées primaires. La peur, la faim, le sommeil, toutes étaient mélangées en une myriade de déclinaisons, et Dom les comprenait. La noirceur de l'assaillant prenait sans cesse plus possession du garçon impuissant, le repoussant jusqu'à ce qu'il ne soit qu'une petite chose craintive tassée dans un coin de sa conscience et luttant sans relâche. Soudain, le dernier maigre morceau de bienfaisance au milieu de cet océan sombre qui malmenait Dom, dans un dernier effort, repoussa ses propres démons. Un instant plus tard, la douleur que subissait Dom s’en retrouvait amoindrie, supportable, et bien qu’il fût encore figé par quelque sortilège, il eut un bref moment de répit. L’esprit était toujours dans sa tête, mais il était contenu et isolé. L’espace d’un instant, Dom se demanda si ce n’était pas la gemme elle-même qui était aux prises elle aussi avec le sombre esprit qui semblait l’habiter, et si ce n’était pas elle qui venait de le repousser pour ces quelques infimes instants. En un éclair, le jeune homme fut une nouvelle fois traversé par un flot rapide qui sonda l’intégralité de son intimité. Cette fois-ci, ce fut en douceur, et extrêmement rapide. Il ressentit de la part de son sauveur un profond regret teinté de tristesse. Il sentit que la gemme souhaitait se faire pardonner d’une façon ou d’une autre. Tu moins, si c’était bien elle. Les brûlures qui consumaient chaque partie du corps du jeune homme s’éteignirent un peu plus, et de légers fourmillements y prirent place, comme si un quelconque processus c'était stoppé. L'esprit se retira subitement moins d'une seconde après avoir repoussé son ennemi, incapable de le retenir davantage, et Dom fût de nouveau envahit. Au retour si brutal de la douleur, il lâcha un cri rauque et guttural qui résonna sur les parois de la pièce et fit vibrer la gemme délicate. Sa main se détacha de sa surface, et alors que le jeune homme tombait à la renverse, il sombra dans les ténèbres, inconscient. La douleur. C'était la première chose que Dom ressentit à son réveil. Son premier réflexe fût de lâcher une série de juron. Puis il se souvint : la gemme, Chickenderpig, l'esprit qui s’était insinué dans sa conscience... Sans attendre, il bondit sur ses pieds, sur ses gardes. Il fit un tour sur lui-même. Une goutte de rosée naissante lui effleura la joue. Un loir gambadait gaiement aux alentours. Plus loin, un cerf brama, et une douce brise se déposa comme un voile sur le visage épuisé et sale du jeune homme. Aucune trace de roche. Aucune trace de pierres précieuses à flanc de paroi. Mais surtout, aucune trace de la gemme ni de sa salle du trône. Dom s'était retrouvé étendu là, dans ce qui semblait être la forêt Kubnigérienne, inconscient. Ses affaires étaient toutes près de lui, même sa torche, enduite d'huile et prête à être rallumée. Il se trouvait justement que le soleil de laissait plus qu'une mince traînée rouge vermeille à l'horizon, et que la nuit avait déjà étendu son long manteau sur la cime des arbres.Dom remarqua très vite que des murmures, des voix résonnaient à l'intérieur de son crâne. Ou plutôt, ce n'était pas des voix, mais une myriade de sentiments variés qui dans leur ensemble formaient un langage compréhensible. Secouant la tête et décidant de ne pas s’en préoccuper, il fit un premier pas vers ses affaires. Il stoppa son pied avant même qu'il ne touche le sol. La peur. Une intense frayeur était tout ce qui lui revenait de ces voix. Une frayeur à dix, vingt, plusieurs centaines d'exemplaires tous différents. Dom réfléchit à toute allure, paniqué. Mais qui ? Quoi ? Qui pouvait se trouver assez nombreux pour... avoir peur de son pied ? Qui ? Ce scarabée ? Cette fourmi retardataire rentrant à sa colonie ? Et si... c'était eux ? Tous ces insectes ? Et s’il les comprenait ? Mais comment dialogue les insectes habituellement ? Des phéromones. C'était la seule explication. Dom captait et comprenait d'une manière ou d'une autre les émanations chimiques de toutes ces petites créatures qui craignaient son lourd pied d'humain. À peine conclut-il son raisonnement qu'il sursauta et bondit en arrière : une étrange petite forme transparente était apparue dans son champ de vision. Sans même qu'il puisse se questionner quant à son origine, une autre apparut sur le côté. Puis une autre ailleurs. Il se rendit bientôt compte que c'était sur ses yeux mêmes que ces choses apparaissaient, et qu'ils en seraient bientôt recouverts. Le jeune homme commença à s'affoler, à battre des bras, et tomba à la renverse. Mais une fois sur le sol humide, il resta bouche bée. Il y voyait à présent étonnamment clair. Son champ de vision s'était élargi, et il voyait son environnement avec plus de détails, de précision, mais aussi de lumière : malgré la nuit noire qui s’étendait autour de lui, il y voyait très clairement, comme en plein jour ou presque. Toutes les centaines de facettes de ses yeux étaient autant de prismes minuscules et invisibles au premier abord, captant avec brio le moindre détail, la moindre lueur, pour l'amplifier et la rendre visible à un Dom ne sachant pas ce qu'il lui arrivait. Ou plutôt si, il le savait au moins en partie, car il était très familier de tout ceci, pour le côtoyer depuis des semaines et des mois : il était à présent capable d'une façon ou d'une autre de faire appel à certaines capacités de ses camarades fourmis. Capter et émettre des phéromones, ces yeux à facettes, étaient des traits caractéristiques des insectes, et plus particulièrement des fourmis. Était-il donc en quelque sorte devenu une sorte d'hybride mi-homme mi-fourmi ? Avant même de pouvoir se questionner davantage, Dom ressentit une grande fatigue. Très vite, ses yeux perdirent leurs facettes et revinrent à la normale. Cette particularité semblait donc l'épuiser assez rapidement. Mais peu importe : il se poserait des questions plus tard, lorsqu'il conterait ses aventures au conseil qui devait être choisi ce soir même. Se saisissant de sa torche, il estima sa direction et se mit en route. * * * Demo était en route vers le lieu de réunion mit en place pour choisir les membres du Conseil de la Colonie. La jeune fourmi était encore fourrée dans ses formules alchimiques et n'avait pas vu passer le temps : un peu plus et il aurait été en retard. Il espérait bientôt devenir un grand joaillier, et mettait tous ses efforts dans son rêve. Alors qu'il longeait paisiblement la forêt, appréciant la fraîcheur de la nuit encore jeune et de la brise légère qui lui chatouillait la carapace, il entendit un bruissement curieux dans les buissons poussant à l'orée du bois. La curieuse petite myrmécéenne attendit quelques instants, espérant voir un animal sauvage. Sa soif de savoir n'avait pas de limite, et là où plusieurs de ses camarades prenaient plaisir à la lecture et l'écriture, lui le prenait dans les sciences et les expérimentations diverses. Bien trop de fois il avait semé la panique au sien de la fourmilière à cause d'une expérience quelque peu téméraire. La perspective de voir une créature peut-être inconnue était donc irrésistible. Ce qui en sortit n'était pas non plus pour lui déplaire. « Dom, c'est toi ? lança-t-il dans une phéromone aux dominantes de surprise, avant de se souvenir qu'un humain ne pouvait pas le comprendre ainsi. — Oui, c'est bien moi Demo, lui répondit-il identiquement à la stupéfaction de son camarade. Je n'ai malheureusement que peu de temps devant moi, et je dois vite savoir qui sera choisi pour le conseil : je le solliciterais dès ce soir, ainsi que quelques autres personnes. Tu en fais partie d'ailleurs. » Sans s’arrêter pour saluer davantage son ami, le jeune homme continua d’un pas rapide vers la petite clairière où tout le monde était déjà rassemblé, suivi de près par un pauvre Demo Crite déconcerté. En demi-cercle, des dizaines de gens connus ou non de la colonie étaient assis dans un brouhaha constant et aussi tamisé que les lumières vacillantes des torches disposées çà et là au sein de l’assemblée. Lorsque Dom sortit de l’ombre, tous les regards se tournèrent vers lui, et les uns comme les autres chuchotèrent de plus belle. Il était clair que toutes les fourmis présentes décelaient un changement chez lui, sans pour autant qu’elles puissent en déceler l’origine. Les autres murmuraient entre eux : depuis que SL, le lapin diplomate de la fourmilière, avait annoncé son départ prochain et qu'il avait pris Dom sous son aile pour qu'il prenne son poste par la suite, ce dernier s’était taillé une réputation inattendue autant qu'originale. Personne n'ignorait sa détermination sans faille des intérêts de Bel-o-Kube, et la rumeur courrait d'elle-même comme quoi il en ferait de même avec le Kubnigera. Que ce soit d'approbation quant à cette rumeur ou de crainte sur la menace qu'il représentait lors du choix du conseil, chacun ne restait pas insensible. Anticipant les questions des quelques représentants de Bel-O-Kube et du Lac d'Émeraude, Dom prit la parole. « Bonsoir à vous messieurs. Je vous prie de bien vouloir m'excuser de mon retard à notre assemblée : j'ai - dit-il en désignant sa tenue sale et esquintée - rencontré quelques imprévus en chemin qui ont mobilisé toute mon attention. Je souhaiterais par ailleurs m'entretenir avec le conseil à ce sujet dès qu'il sera en fonction. J'endosse par ailleurs la responsabilité du retard de mon camarade ici présent, ajouta-t-il à propos du jeune Demo en arrière en lui lançant un regard complice. Il s’est retrouvé bien malgré lui retardé par ma faute. À présent, si je puis me permettre, puis-je savoir où vous en étiez de la réunion ? » Certains habitués sourirent : c'était bien là Dom, sans l'ombre d'un doute. Maniant avec habileté chacune de ses paroles, il avait esquivé chacune des questions en suspens que tous se posaient ici, et s’était assuré un résumé de la situation en toute impunité sans qu'aucune rancune quant à son retard inconvenant ne demeure : tous à présent se questionnaient sur les raisons de son retard ou hochaient des têtes satisfaites quant à son élocution. Le jeune diplomate ne l'était pas pour rien, et son amour des lettres et des mots y faisait pour beaucoup. Les joutes verbales ou les concours de jeux de mots étaient monnaie courante parmi nombre de Bel-o-Kubien, bien que cette passion soit également partagée par Tybalt l'Ancien, vieux dirigeant du Lac et ami des fourmis, notamment pour son amour partagé des écrits et calembours. Finalement, l'un de ceux présidant le rassemblement – un lacustre dans la fleur de l'âge inconnu de Dom – prit la parole. « Nous comprenons, annonça-t-il d'un regard entendu avec ceux qui se tenaient près de lui. Prends place si tu le souhaites, nous allons poursuivre. Nous étions sur le point de commencer le vote pour choisir les conseillers du Kubnigera. » Le jeune homme prit place sur une souche non loin de là, satisfait d'être passé entre les mailles du filet. Peut-être était-il destiné à se plonger dans la politique en tant que diplomate, mais il détestait par-dessus tout tous ces politiciens véreux pullulant à la capitale, tout autant que leurs magouilles égoïstes ; il souhaitait donc être tout leur inverse, et pouvait se montrer pire qu'eux lorsqu'il s'agissait de leur parler ou de contrer leurs idéaux malsains. Ceux qu'il estimait se comptaient sur les doigts d'une main, et il plaignait sincèrement les empereurs et les gouverneurs d'avoir à supporter une telle masse avide. Alors que deux fourmis faisaient le tour des personnes présentes pour leur tendre un papier et de quoi y gribouiller un nom, le jeune homme pût sentir le questionnement croissant de ceux de Bel-o-Kube. Si ceux du Lac étaient seulement curieux, les autres sentaient clairement un changement. Lorsqu'il leva les yeux, le jeune diplomate aperçu le regard interrogateur de SL sous ses sourcils froncés. En tant que mage, il en avait probablement compris plus que les autres, ou du moins le supposait. Bientôt, chacun eût un papier avec lui. Le principe du vote était simple : chaque votant notait sur un papier ceux qu’il jugeait aptes à devenir conseillers, en notant leur nom sur la feuille à raison d’un lacustre et d’une fourmi par vote. On recueillait ensuite dans une jarre en terre cuite les votes de chacun, et on retenait les deux personnes du Lac et les deux de Bel-o-Kube les plus cités. Ainsi, à l’issue du vote, quatre conseillers seraient choisis. Si chaque membre de la colonie peut être noté sur le vote, si quelqu’un est choisi il peut néanmoins choisir de refuser le poste, et un nouveau vote est alors effectué. Les conseillers n’ont pas de “temps” de fonction, comme dans certaines autres cités. Un conseiller est choisi et demeure jusqu’à ce qu’il cède sa place ou que la majorité juge qu’il n’est plus apte à son poste. Les jarres furent remplies, puis un lacustre et une fourmi l’emportèrent un peu plus loin pour faire le compte. Tout était calme : plus personne n’osait parler en attendant le verdict. Pour sa part, Dom avait voté pour Tybalt et pour Opera. Il aurait bien voté pour SL, car celui-ci avait un sens de la diplomatie très aiguisé et qu’il aurait donc fait un très bon conseiller pour le Kubnigera, mais il savait que celui-ci aurait de plus importantes occupations d’ici peu même s’il refusait de dire lesquelles. Il avait donc voté pour Opera, l’un de ses très bons amis, amoureux des lettres, qu’il jugeait d’une très grande qualité. Les porteurs de l’urne improvisée revinrent, les résultats avec eux. Un homme annonça les résultats au groupe impatient. Tybalt l’Ancien et Mougatine en tant que conseillers représentants le Lac. Opera Mundi et Dom Fulmen en conseillers de Bel-O-Kube. Lorsqu’il entendit son nom, Dom ouvrit de grands yeux, alors que des applaudissements de contentement naissaient autour de lui. On lui faisait assez confiance pour lui confier une telle tâche. Mais plus important, il pourrait lui-même veiller sur l’arbre, sur la gemme ; il pourrait accomplir lui-même ce dont il avait rêvé quelques heures plus tôt. Les nouveaux conseillers se rassemblèrent, aux anges, et furent bientôt entourés par la foule, serrant des mains et proférant des remerciements sans même avoir le temps de voir à qui. Mais peu à peu, tous partirent, vaquant à leurs occupations ou répandant la nouvelle. Dom reprit son calme et son sérieux habituel. Il rassembla le conseil à l’écart des oreilles indiscrètes, ainsi que quelques personnes et amis qu’il voulait voir se joindre à eux. « Mes amis, je vous ai demandé pour vous faire part de mon aventure des heures précédentes. Simplement, c’est une affaire qui doit rester entre nous, et qui reste malgré tout mystérieuse. » Un grommellement curieux et impatient s’éleva parmi l’assistance. Certains se demandaient quel était leur rapport dans l’histoire. « C’est parce que vos conseils me seront précieux, répondit le jeune homme. Vous êtes tous des amis que j’estime beaucoup, et en tant que tels vos remarques et votre point de vue me sont indispensables. Le conseil se doit d’être au courant ; SL est un mage et pourra donner son expertise sur tout ce qui touche à la magie ; Demo est notre scientifique et joaillier en herbe et pourra donner son opinion. » Tous acquiescèrent : ses raisons étaient justifiées. Simplement, leur curiosité en était redoublée. Dom s’arma de sa voix la plus claire, s’éclaircit la gorge, rassembla ses souvenirs et toutes ses compétences de conteurs afin de leur faire ressentir tout ce qu’il avait vécu, de les faire frémir et sourire. Enfin, il débuta. « Tout commença à mon arrivée au Kubnigera avec le reste des colons. Lorsque j’achevais de gravir la petite colline qui bordait notre territoire, je ne ressentis qu’émerveillement et surprise, car en dessous de moi s’étendait un… » Et ainsi longtemps il les captiva dans l’obscurité de la nuit, poursuivant son récit sans une seule fois en perdre haleine, et sous l’oreille attentive de la forêt de jade qui jamais ne révéla ce qu’elle entendit ce soir-là... Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
ArthurB Posté(e) le 30 août 2013 Partager Posté(e) le 30 août 2013 En revenant au seins de la communauté du Kubnigera sur mumble, je fus accueilli dès mon apparition par une créature humanoïde sauvage me criant à maints reprises une phrase n'ayant aucun sens, perplexe, je découvris que celles-ci étaient codés, elles me menèrent alors en ces lieux à la découverte d'un troisième écrit de l'étrange créature communément appelé le "Domfulmenolivrodocus-rex", ou plus familièrement le "Dom". Malgré quelques affaires pressentes nécessitants ma personne, la créature sauvage du Dom réapparu me forcant alors à me retourner vers ses nouveaux écris. Alors, dans l'obligation, et aussi par pure curiosité, je fus obligé de m'intéresser plus profondément dans l'immédiat sur ces écrits. Après presque une heure de lecture, je finis par arriver à la fin de ce nouveau récit, me livrant alors son histoire et ses secrets. Ce récit s’avéra alors d'une grande qualité, tant par sa construction simple, compréhensible, et lisible, grâce à une grande quantité de descriptions détaillées, nous permettant alors de suivre de manière claire et net l'histoire, comme si nous la suivions à même les yeux du héros, voir à même son esprit. Ce récit s'avère aussi d'une grande qualité car celui-ci se place alors dans un plus grand récit, devant ainsi faire le liens entres plusieurs événements, révélant ainsi une zone d'ombre dans cette grande histoire, et ainsi révélant de nombreuses explications, et dévoilant à l'opposé, de nouveaux mystères, venant alors remplacer ceux précédemment révélés. Ayant finis la lecture de l'ouvrage nouvellement apparu, et en même temps la critique de celui-ci, je me retourna vers l'emplacement où ce tenait le "Domfulmenolivrodocus-rex" sauvage, qui m'avait alors fais part de ce récit, mais je m'aperçu que celui-ci n'étant plus là, sûrement partir dormir vu l'heure me dis-je, je pense que je devrais en faire de même repris-je. (Bon en bref c'est chouettes les lettres, c'est beaux les mots, ... et aussi ... ne me demandez pas pourquoi j'ai écris comme ça mon commentaire ... cchhuuuuttt ...) Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 16 octobre 2013 Auteur Partager Posté(e) le 16 octobre 2013 Yop et bonsoir à tous !Tout d'abord, avant toute chose, je tenais à tous vous remercier pour vos commentaires qui me font extrêmement chaud au cœur et qui m'encouragent à continuer cette aventure dans laquelle je me suis lancé ! Même si je ne répond pas tellement sur ce topic (chose que j'essaierais de changer), je vous adore et j'apprécie énormément tout ce que vous me dites. J'en profite pour vous introduire le chapitre que vous pourrez trouver juste en dessous de ce petit blabla. Il est un peu spécial de deux points de vue.Premièrement, c'est tout simplement mon RP de ma candidature citoyenne. Il n'a pas tant changé ; j'ai simplement procédé à une relecture et correction complète, amélioré quelques passages et tournures, aéré des zones du texte un peu trop compactes et indigestes et contribué à quelques changements scénaristiques. Comme mon style et mes idées pour la suite de l'histoire - mais aussi les changements sur mes trois premiers chapitres par rapport à ceux d'origine - ont évolué, j'étais en quelque sorte obligé de passer par là, comme son écriture est antérieure de bien quelques mois par rapport au premier chapitre de mes chroniques. La qualité sera donc sans doute inférieure à celle de mon premier chapitre, mais je n'ai pas souhaité trop y toucher. Juste ce qu'il faut. Vous me reconnaitrez, je n'en doute pas, mais sans doute l'apprécierez-vous moins que les précédents.Tant pis, je prends le risque.Deuxièmement, le chapitre, comme sur ma candidature citoyenne, sera coupé en deux. Déjà parce qu'il est trèèèèès long et ne tiendrais pas en un seul message (encore et toujours ces 60 000 caractères), mais aussi parce que cela me permet de plus espacer les sorties de mes chapitres. En effet, en parallèle de la correction/amélioration de la seconde partie de ce quatrième chapitre, je compte travailler sur un chapitre totalement différent qui me prendra beaucoup plus de temps (ce sera une surprise !). Couper ce grand chapitre en deux me permettra de ne pas vous laisser sans contenu pendant trop longtemps.Voilà, je pense avoir tout dit. Je vous laisse donc découvrir ce nouveau chapitre, le 4.1 de mes chroniques, et vous souhaite une bonne lecture ! :air: Chapitre 4 - Première partie : D'Ombres et de Quête. [justify] Il faisait noir à présent. Terriblement noir. Les éléments étranges se multipliaient autour du jeune homme apeuré. En face de lui, des ombres d’une rapidité improbable apparaissaient régulièrement par l’ouverture de la porte, d’où provenait la faible lueur du croissant de lune se déversant dans la pièce précédente. Elles semblaient s’amuser avec lui, l’effrayer par un simple et pur élan de sadisme et de cruauté. Il lui fallait un plan. Acculé contre le mur, assis et essayant pourtant de reculer encore et toujours, la panique prit peu à peu possession de son esprit, et ses membre refusèrent bientôt de bouger tant la peur le tétanisait. Le sang s’écoulait lentement de sa blessure à l’épaule, qui le meurtrissait, sous le rythme précipité de son cœur paniqué. Il était pris au piège. Sa vue se brouilla, et il se sentit défaillir. C’était la fin. Il allait mourir ici, ignorant tout et ayant échoué son entreprise. Non. Non, il ne pouvait pas mourir ici. Pas maintenant. Pas sans se battre. Il gonfla ses poumons de tout l’air possible, lentement, comme profitant de cet air frais et brumeux s’offrant à lui. Tout sembla ralentir autour du jeune homme, les battements de son cœur pulsant avec d’autant plus de force que leur vitesse ralentissait. Le sang battait à ses tempes. Les ombres paraissaient à présent être immobiles, comme chaque chose autour de lui. Le temps semblait s’être arrêté. Il ferma les yeux… « Souviens-toi, souviens-toi Dom de tout ce que l’on t’a appris… Réagis ! Qu’est-ce que tu as ? Que peux-tu utiliser ? Que sais-tu ? Qu’as-tu en ta possession ? Réfléchis Dom… Dom… Dom. Dom ! » « Dom ! » Le jeune homme se réveilla en sursaut. Devant ses yeux gonflés et accablés par le poids de la fatigue se trouvait son bureau provisoire, une large et commune planche déposée sur deux tréteaux branlants, stabilisés par le poids des documents que le plateau soutenait. Leur équilibre tout de même relativement douteux occupa l’esprit du pauvre Dom l’espace d’un instant, incrédule. Il se rendit vite compte qu’il s’égarait, et son attention se reporta rapidement à son interlocuteur. Le rouge lui monta aux joues. Il s’était assoupi au beau milieu de la conversation. Il était tard, et l’épuisement avait eu raison de lui, malgré les paroles de la boule de poils blancs. Ces derniers, parfaitement lustrés, s’échappaient de la robe de mage d’un bleu assez clair qui se trouvait par-dessus son porteur. Au niveau de la tête de cette forme globalement humanoïde, on pouvait voir deux yeux surplombés de deux longues oreilles dont l’intérieur était d’une douce et fine couleur rosée. Juste en dessous de ces yeux d’un bleu profond, entre eux deux, se trouvait un petit museau, d’un rose identique et apaisant. De l’autre côté du bureau, SL regardait d’un air inquiet son pauvre camarade mi-fourmi. Sa transformation quelques semaines auparavant l'avait épuisé. Ou était-ce des mois ? Dans tous les cas, Dom ne s'en était toujours pas remis, et son état actuel était presque devenu une habitude pour lui. Au moins il y avait un mieux ces temps-ci, et il sentait que son état s'améliorait. Le jeune homme arbora un maigre sourire gêné : « Pardonne-moi, la fatigue se fait sentir, dit-il en se frottant les yeux. » Le lapin blanc sourit à son tour, mais sans pour autant quitter son air de profonde inquiétude. Il connaissait parfaitement l'état et l'aventure du jeune homme, qu'il avait examiné à de nombreuses reprises pour essayer de comprendre sa transformation, en vain. « Ce n’est rien, je comprends. N’en parlons plus. — De quoi parlions-nous ? Je crains n'avoir plus suivi grand-chose de notre conversation depuis quelques minutes déjà… — Eh bien, vois-tu, depuis quelques temps d’étranges rumeurs courent à propos d’apparitions fantomatiques, qui semblent être associées à des disparitions. Or ces incidents se trouvent sur notre territoire. Je pense donc que tu comprends sans mal pourquoi il nous faut mener l'enquête… — Oui, c’est compréhensible. Je suppose que tu es venu me voir car tu as un plan ? — C’est là qu’est le problème. Tous nos nouveaux sont trop peu intégrés ou disponibles pour s'en charger. La plupart sont monopolisés par nos chantiers, et beaucoup de nos anciens sont en voyage vers les contrées voisines afin d'établir le contact. Tu es le seul qui reste. Crois-moi, c'est à contre-cœur que je viens te demander cela, et je vois bien la pile de missives et de courriers divers qui s’entassent sur ton bureau. Je ne peux moi-même m’y rendre, mes obligations de gouverneur me retiennent à la capitale, et c’est déjà un miracle que j’aie réussi à m’en échapper pour venir quérir ton aide. — On en revient toujours aux mêmes problèmes en somme : le temps et les effectifs. Et si nous ne faisons rien cela va nous retomber dessus, c'est bien ça ? — Je crains que tu n'aies que trop bien saisi l'idée. — Comme d'habitude, n'est-ce pas ? ajouta le jeune homme avec un sourire. — Oui. Tu sais Dom, la Colonie va mal. Non. Pas seulement la Colonie. La fourmilière, le Lac, on dirait que tout part en vrille, et je ne me l'explique pas. Nos cités meurent. Voilà longtemps que j'y pense, mais je pense que tu devras prendre les rênes d'ici peu, au moins de la Colonie... — C'est hors de question, répliqua Dom un sourire aux lèvres. Je suis conseiller avec les autres parce que tous l'ont voulu ainsi. Et c'est un honneur et une joie que de siéger au conseil, ne te méprends pas. Cependant, je refuse d'obtenir les pleins pouvoirs sur le projet. C'est en dehors de ma portée. » Le lapin blanc hocha la tête d'un air soucieux. Seul l'avenir pourrait leur dire le déroulement des choses. Dom quant à lui réfléchissait. Il allait accepter, évidemment. Pour sa cité. S’il ne le faisait pas, leur image n'en ressortirait que péjorative, et ils recevraient de nombreux reproches pour ne pas avoir enquêté sur ces incidents. Ils étaient sur leur sol, et donc sous leur juridiction. Intérieurement, le jeune homme riait de l'ironie de la situation. En fin de compte il n'avait pas réellement le choix. Il regarda les trois épais monticules de manuscrits dactylographiés. Le travail ne manquait pas dès qu’il s’agissait de participer à la gestion du Kubnigera. De plus, les voyages réguliers à la capitale que Dom était contraint d’effectuer le poussaient à envisager une solution. Depuis son arrivée, de nombreuses aventures s’étaient présentées à lui. Il avait rencontré un « dieu » étrange et inquiétant, qui l’avait épié sans relâche, le menant au bord de la folie avant de l'amener sur les terres Minefieldiennes. Suite à ça, il avait intégré Bel-o-Kube, la cité fourmi où il vivait depuis. Puis est venu le Kubnigera, sa transformation, et le lot de paperasse administrative qui l’accompagnait, qui a permis l'alliance Myrméco-Lacustre de coloniser ce nouveau monde qu’est Stendel. Dom était épuisé, car son rôle de conseiller en charge de la diplomatie Kubnigérienne était extrêmement prenant. Cette mission lui changerait ses habitudes le temps qu’elle soit menée à bien, et lui ferait prendre l'air. C'était déjà ça. « Quels sont les détails de l'affaire ? dit-il enfin. » Un sourire faussement rassuré se dressa timidement sur le museau du lapin au pelage blanc immaculé. Il vint l’idée l’espace d’un instant au jeune Dom de caresser cette fourrure qui semblait si douce et moelleuse. Il secoua bien vite la tête pour se réveiller et s’enlever ces idées absurdes de son esprit embrumé. D’un simple hochement de tête reconnaissant, SL tendit à la jeune fourmi un petit dossier contenu dans un rouleau, et qui relatait de tous les éléments concernant cette quête improvisée. Il quitta le petit bureau provisoire qui se situait dans la nouvelle mairie du village, encore en construction. Dom déroula la longue page de manuscrit qui entourait le cylindre de bois. C’était une feuille fine, mais robuste. Le papier qui l’enveloppait était de très bonne facture, résistant, et montrait même certaines similitudes avec du parchemin ou du papyrus. De fins fils d’or, d’encre noire ou violette décoraient avec une extrême précision les bords de la feuille, qui arborait ainsi les couleurs de Stendel. Il huma lentement l’odeur du rouleau, celle de l’encre fraichement couchée sur son support. Dom appréciait cette odeur, elle lui inspirait la sérénité et lui donnait l’inspiration pour ses pensées et écritures diverses. Il alluma deux bougies supplémentaires encore inutilisées sur son petit chandelier, déposé sur la planche en bois de noyer qui lui servait de bureau. La nuit avait bien débuté, et la lune avait déjà accompli une partie de sa course. Le rapport relatait des témoignages de plusieurs personnes qui avaient fui, effrayées par de soi-disant fantômes. D’autres avaient semble-t-il mystérieusement disparu. Étrange en effet, bien que ces histoires d’ectoplasmes semblaient plus absurdes qu’autre chose. Il ne tirait cependant pas de conclusions trop hâtives. Il savait pertinemment que dans ces contrées emplies de magie tout pouvait arriver. Il en était l'exemple vivant. Il lui fallait partir au plus vite. Il comptait tout de même rendre visite à Demo Crite, en espérant qu’il ait à présent achevé sa commande. Si c'était le cas, elle tomberait à merveille. Il descendit de la petite pièce où se trouvait son lieu de travail, et se dirigea vers l’arbre et l’une de ces racines. Après s’être enfoncé de quelques mètres sous la surface, il atteignit une petite porte peu visible au premier regard, au détour d’un virage. Discrètement, il poussa la porte et entra dans la salle. Le dernier cours du soir de la jeune fourmi n’était pas encore terminé. Une vingtaine d’alchimistes de tous horizons et de tous niveaux profitaient de son art et de son tallent de joaillier, observant et reproduisant avec fascination ses gestes et manipulations. Tous menaient chaque fois indubitablement à une gemme merveilleuse d’une rare beauté, et resplendissante de clarté et de finesse. Ce n’était pas sans raisons qu’il était considéré comme le meilleur de sa profession dans toute la région. Ses pattes manipulaient les ingrédients avec une telle dextérité qu’il semblait être né avec un tel talent. Encore quelques minutes, et la leçon s’achevait enfin. Tous les élèves sortirent. Ils discutaient et débâtaient activement de leurs nouvelles connaissances, enthousiasmés et satisfaits. Encore quelques secondes, et Dom put approcher du bureau où était assis la fourmi joaillière. Il s’occupait de quelques besognes administratives inévitables pour quelqu’un de sa profession. Son échoppe lui prenait un temps précieux, et il songeait sérieusement abandonner son commerce. Malgré son apparence humaine, le nouvel arrivant libéra une phéromone d’amitié pour signaler sa présence. Comme il était à la fois homme et fourmi, il possédait l’avantage de pouvoir converser avec l’un et l’autre sans intermédiaire. Comme il venait de terminer de lire sa phrase entamée de ce qui semblait être une missive de Stendel, Demo leva vers Dom ses yeux à facette. Il lui offrit un nuage similaire composé des mêmes aérosols chimiques. Le jeune diplomate les accueilli avec un sourire. Il put voir des croquis de pièces et d’objets étranges, que son camarade retira afin de les ranger au milieu d’une pile plus importante de missives. Ses phéromones indiquèrent alors qu’il s’interrogeait sur le motif de sa visite. Il répondit verbalement par commodité : « Bien sûr, c’est avec plaisir que je te fournirais quelques explications, déclara le visiteur sans attendre. Te souviens-tu de cette pierre spéciale que je t’avais commandée ? — Oui, évidemment, répondit la fourmi à l’aide d’une phéromone de surprise et de questionnement. Pourquoi donc ? — J’en aurais besoin d’ici peu. Je vais dans quelques heures partir en expédition. Pour faire simple, j’ai été chargé de régler une complication apparemment due à quelques ectoplasmes. » Demo agita ses mandibules en signe de surprise et d’inquiétude. Fidèle à lui-même, il pesa ses mots, songeant aux informations qu’on lui apportait lors d’une discussion, puis réfléchit à sa réponse. Le mélange complexe de particules chimique, bien plus complet qu’une langue ordinaire, parvint enfin aux zones réceptrices de Dom. Bien plus que des mots, chaque mot synthétisé par les glandes phéromonales de son interlocuteur était également teint par ses émotions, ses sentiments. Ce langage riche plaisait au jeune homme. Demo fournit sa réponse au bout de quelques secondes : « Je vois. Je vais te la chercher, je l’ai justement terminée il y a quelques heures. Elle m’aura demandé beaucoup d’efforts et de temps, mais elle est parfaite à présent. Sois prudent néanmoins, bien que je ne croie pas en eux, les histoires de fantômes n’ont jamais fait bon ménage. As-tu songé à quérir l’aide d’une de nos consœurs ? Je ne suis pas rassuré que tu partes seul. — Merci à toi, répondit Dom en inclinant la tête en signe de reconnaissance et de respect. Mais ne te fais pas de soucis pour moi. Tu me connais, je vais m’en sortir, ajouta-t-il avec un petit sourire en coin. » Son ami hocha la tête et agita légèrement ses antennes. Il le quitta quelques instants, à la recherche du fameux objet. Quelques bruits seulement ponctuaient la vivacité de la recherche qui se tramait hors du champ visuel du champ visuel du jeune homme. Quelques mots lui parvinrent également, bribes de ce qui semblait être une conversation avec lui-même du joaillier. Il revint bientôt en possession d’un objet soigneusement emballé dans un épais chiffon de lin. Il tendit le paquet vers son destinataire, qui s’en saisit avec une once d’appréhension. Étonnamment, il était plutôt lourd pour sa taille. De forme sphérique, un peu plus volumineux qu’un gros œuf de poule, il laissait filtrer une douce chaleur apaisante à travers l’épaisseur de tissu. « Je te conseillerais de te garder de le sortir dès maintenant, précisa-t-il. Il est encore très chaud. D’ici quelques heures, tu pourras t’en servir sans aucun danger. — Merci beaucoup, mon bon ami, le remercia le nouveau propriétaire de l’objet en s’inclinant. Tiens, accepte ces quelques pièces comme gage de ma gratitude. » Il reçut timidement entre ses pattes le sac dodu et sonnant que Dom lui tendait, puis relâcha une phéromone de gratitude et de gêne très abondante. Après lui avoir répondu par une autre de respect et d’estime, Dom s’inclina une dernière fois avant de quitter la pièce, satisfait. Le jeune joaillier l’observa partir, non sans appréhension. Un mauvais pressentiment le préoccupait. Ce n'était pas à propos de la mission de son ami, mais plutôt quelque chose de plus lointain, qu’il n’aurait su définir. Au moment où son précieux camarade fourmi formulait ces pensées, Dom remontait les quelques marches qui parcouraient la racine et sortait de l’arbre géant. Il se dirigea vers la salle des coffres de la cité. Là, dans son coffre personnel, il entreposa les quelques affaires qu’il portait sur lui. Il sortit son sac de voyage, une petite besace de cuir, assez grande pour pouvoir transporter un certain nombre de provision, mais trop peu pour être lourde ou encombrante. Le tout était attaché sûrement et fermement sur son dos, hermétique. C’était un sac qui l’avait accompagné de nombreuses années. Il y glissa quelques provisions, une couverture de laine, un nécessaire de soin, et diverses affaires qui lui seraient éventuellement nécessaires, comme la corde que lui avait enchantée Jesolas, la Reine de Bel-o-Kube. C’est dans ses sacoches accrochées à la ceinture que trouvèrent place le briquet, le couteau, le tabac, la pipe, et bien entendu le précieux présent de Demo Crite. Il ôta la lourde cape blanche qui reposait sur ses épaules et le recouvrait entièrement. Les armories brodées sur celle-ci étaient en deux parties. À l'avant, d'un côté de l'ouverture, elles étaient composées d’une représentation de l’arbre, enlaçant la gemme sous ces racines. Les fières couleurs du Kubnigera. Bien peu de personnes connaissaient la réelle existence de la gemme, et la plupart des autres ignoraient son emplacement exact. De l'autre côté de l'ouverture se trouvait une simple broderie représentant une fourmi, symbole de Bel-o-Kube, sa cité d'origine. À l'arrière était tissé une bougie, symbole des scribes de l'empire. Il était déjà équipé sous sa cape, un réflexe dont il ne pouvait s’empêcher. Il n’était tranquille qu’armé et équipé, bien que cela soit en totale contradiction avec son rôle de diplomate de la Colonie. Ainsi, il avait déjà épée, dague, et flèches à la taille, arc à l’épaule. Son habit noir et rouge n’était couvert que par des protections d’acier aux avant-bras, aux tibias et aux épaules. Il portait une paire de gants dénués de leur extrémité, excepté à l’index et au majeur de la main droite, tous deux destinés à protéger ses doigts qui devaient tirer la corde de son arc. À la place de la lourde cape blanche il enfila sa fidèle écharpe, puis une cape plus fine et légère, noire cette fois et dotée d’une capuche. Il la rabattit par-dessus ses cheveux blonds et bouclés. Il acheva de disposer quelques éléments utiles sur ses sacoches, lanières, et poches diverses de ses vêtements. C’est arborant fièrement les couleurs de ses deux cités qu’il retrouva avec un étonnant soupir rassuré son équipement complet. Il ajusta ses brassards et se dirigea d’un pas résolu vers l’échelle menant à la sortie. Dans la fraicheur apportée par l’obscurité, il leva les yeux vers le Kubnigera, puis vit à la base du tronc SL, qui utilisait sa magie pour contacter quelqu’un. Probablement les renforts qu’il avait promis. Dom lui adressa un respectueux signe de la tête, se retourna et partit d'un pas vif. Il s’enfonça très vite dans les forêts denses recouvrant les terres de la Colonie. Le doux et scintillant croissant de lune avait maintenant accompli la moitié de son trajet céleste. C’est en compagnie d’un jeune renard que Dom avançait. Il semblait inexplicablement apprécier sa compagnie, et gambadait joyeusement autour de lui malgré son allure rapide. Le jeune guerrier le regardait se rouler dans les herbes couvertes d’un maigre début de rosée avec amusement et attendrissement. La quête le menait à l’extrême nord du territoire Kubnigérien, à la frontière entre la forêt et les marais sombres qui bordaient cette partie-ci de la province. Le ciel n’était pas très nuageux, mais assez pour cacher une assez grande partie des étoiles. Dom ne pouvait donc compter que sur la pâle lueur de l’astre au-dessus de lui pour se diriger. Hors de question d’allumer une torche ici : cela signalerait automatiquement sa présence à toutes les créatures alentour, si toutefois il y en avait. Un squelette se laissa justement apercevoir entre deux arbres au loin. La forêt était néanmoins trop dense et la nuit trop sombre pour le toucher de là. Le jeune homme grimpa rapidement dans l’arbre le plus proche, et passa de branche en branche pour s’en rapprocher. Bientôt, il se tint à une dizaine de mètres seulement de l’infâme créature. Il banda son arc, et patienta quelques instants que le monstre se décale et ne soit plus masqué par l’arbre qui se trouvait devant lui. Pas à pas, il avança vers l’extrémité de la branche. Le bout de l’arc du squelette apparut. Puis son bras. Au moment où son corps entier était à découvert, la branche céda. Le trait siffla. Dom amortit sa chute en roulant sur le sol. La flèche fît mouche au niveau de la nuque de la créature, la trancha net, et se logea dans le sol juste derrière. La masse d’os s’effondra, inoffensive, comme elle aurait dû le rester avant de revenir d’entre les morts pour persécuter les vivants. Il ne fallait pas que Dom prenne de risque, il lui restait encore du chemin à parcourir, et le mieux était encore de le faire en sûreté. Il avait été imprudent et ne s'attendait pas à ce que son support se brise ainsi. Malheureusement, la chute avait fait beaucoup de bruit. Alors que Dom se remettait de sa légère désorientation, un grognement se fit entendre derrière lui. Par réflexe, il fit un bond de côté et évita de peu la mâchoire d’un zombie attiré par le chahut. Il dégaina et trancha sans attendre la tête molle et en décomposition du corps macabre. Il avait eu de la chance. Il se dirigea vers l’amas d’os pour y récupérer sa flèche encore en parfait état. La colonne vertébrale du monstre était altérée par le temps, et n’avait même pas rayé le projectile. Ce dernier retrouva sa place parmi ses semblables. Dom reprit sa route et retrouva son compagnon improvisé un peu plus loin. Il tenait entre ses fines mâchoires un petit rongeur. Probablement un mulot, ou un rat des champs. Il le brandissait fièrement, laissant son nouvel ami admirer le fruit de sa chasse. Le jeune homme retint un frisson. Une crevasse démesurément profonde fendait le sol en travers de son chemin, dont un vent glacé s’échappait par fortes rafales régulières. Ce souffle semblait étrangement geler le sol sur quelques centimètres à proximité du rebord du gouffre. Dans tous les cas, il lui faudrait contourner cet obstacle. Après un regard rapide de chaque côté, il décida de contourner la difficulté par la droite. Le chemin semblait plus court et direct. Au loin, à travers les épais feuillages obscurs, il aperçut la montagne qui s’était développée sans prévenir. Les pouvoirs de la pierre contenue sous les racines de l’arbre artefact étaient décidément étonnants. Stupéfiants même. De petits et brefs bruits provoqués par les quelques animaux sauvages fuyant à l’approche du voyageur et de celle du jeune renard se faisaient sans cesse entendre. Autour d’eux, la forêt se faisait de plus en plus dense. Soudain, une ombre – probablement un animal sauvage – passa très près du jeune aventurier. Il semblait fuir, apeuré. Dom le regarda disparaitre dans les fourrés, fronçant les sourcils. Ce n’était sans doute rien. Il reprit paisiblement sa route. Quelques minutes plus tard, le scénario se répéta. Une seconde bête le frôla, de la même taille, et exactement de la même manière semblait-il. Étrange. Laissant de côté les questions qui se bousculaient dans sa tête, il se concentra sur sa marche. Il n'eut pas l'occasion d'ignorer le phénomène bien plus longtemps. Le même manège se répéta, en tout point identique à ceci près qu’un second animal accompagnait le premier, fuyant dans la même direction. Puis quelques secondes encore après ceci, le tout se répéta à nouveau. Dom s’accroupit et resta immobile pour observer le phénomène. Régulièrement, de plus en plus d’animaux noircis par l’obscurité ambiante fuyaient un danger inconnu, et revenaient comme pris au piège d’un cruel sortilège à leur point de départ, pour effectuer des actions en tout point identiques à leurs précédentes. Inquiet, Dom libéra la lanière de cuir qui solidarisait son épée à son fourreau. Il se tramait bel et bien quelque chose ici. Une étrange sensation, un mauvais pressentiment lui oppressait les tempes, comme le prévenant d’un danger inconnu. Il devait impérativement tirer cette affaire au clair. Un flash lumineux l’éblouit. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il se trouvait dans un lieu inconnu. En face de lui se trouvait une grande salle sombre, où s’étendaient de grands piliers. À l’extrémité se trouvait un trône, où siégeait un vieil homme à la barbe blanche et fournie, derrière lequel s'étendait sur le mur une ombre profonde. Un homme armé était à genoux devant lui. Un second flash éblouissant avala la scène, pour laisser place à une forêt sombre. Une profonde angoisse noua le ventre du spectateur de la scène. Des cris se faisaient entendre, des hommes tenant des torches couraient, galopaient bride abattue, vociférant des injures envers un fuyard. Dom rouvrit les yeux et tomba à genoux. La main contre son cœur affolé, il respirait bruyamment, les larmes aux yeux. Au bout de quelques secondes, il regarda autour de lui. Le jeune renard, inquiet, s’approcha pour venir lécher doucement le bout du nez du jeune homme sous le choc. Celui-ci s’assit quelques instants, la tête entre les mains, pendant que les ombres continuaient leur raffut alentour. Il se releva enfin. Il avait repris son calme habituel. Quoi que ce fût, c'était terminé. Il avança recroquevillé, lentement et en silence, et se fondait dans la nuit et la végétation. Autour de lui, les créatures continuaient à fuir dans le sens contraire au sien. La flore s’éclaircit peu à peu, laissant un peu plus de possibilités de vision. Une petite clairière légèrement surélevée s'étendait devant lui. Elle était remarquablement bien éclairée par la pâle lumière de l’astre lunaire. Les animaux paraissaient fuir à partir de ce lieu pourtant en apparence si banal. Après un peu d’observation attentive, Dom vit que le troupeau de bêtes prenait vie dans une boucle sans fin autour du petit monticule te terre et d’herbe. On les aurait cru formées d’ombres et de ténèbres, et elles apparaissaient sans fondement rationnel telles des fumées sombres et compactes. Il se frotta les yeux quelques instants, tentant de trouver quelque explication tangible à ce phénomène. Il ouvrit les paupières. À sa droite se trouvait une grande forme noire, apparue sans bruit. Il dut se contenir et se faire violence pour retenir le cri et le sursaut d’effroi qu’il ressentit à cet instant. Dom fit néanmoins un bon de côté, et retira à demi sa lame de la gaine de cuir rigide. En face de lui se tenait, immobile, le Chickenderpig qui observait le phénomène. Dom, à peine rassuré, se déraidit, tout de même prêt à tout. « Bonsoir, Chickenderpig, lança-t-il avec un semblant de respect en réalité plus que sarcastique et teinté d'ironie. Que me vaut l’honneur de votre visite ? Auriez-vous une explication pour tout ceci ? Est-ce lié à vous ? » La créature tourna sa tête vers son interlocuteur, plongeant ses yeux blancs et vides de toute expression dans les siens. Certaines ombres animales semblaient le traverser, comme s’il se trouvait être encore moins solide qu’elles. « Par ailleurs, reprit Dom en l'absence de réponse, vous n'avez rien à me dire ? Vous êtes la cause de ma transformation n'est-ce pas ? C'était vous ce jour-là non ? — Ceci n’appartient pas à ce monde. — Pardon ? — C’est donc que ceci appartient à un autre. — Je crains de ne pas vous suivre malheureusement. — Mais comment peux-tu les vaincre ? Que sont-ils ? Je vois bien ce que tu te demandes. Cependant, seule la solution à l’une de ces deux questions te sera révélée le moment voulu. Tu as déjà en ta possession l’étincelle capable de chasser les ténèbres. La seconde, libre à toi de le découvrir. Tu seras très probablement en danger lors de cette quête. Comment intervenir ? Même moi je ne peux rien faire lorsqu’il est ainsi… — Encore une fois, vos propos sont flous. Pour une fois, j’apprécierais quelques explications, même si ce n’est pas vraiment dans vos habitudes il semblerait. Et il me semble vous avoir aussi posé une question à laquelle j’attends une réponse. » Pas de réponse durant quelques minutes. Pendant ce laps de temps, Dom put observer à nouveau l’évènement surnaturel, toujours sur la défensive. Il gardait cependant toujours un œil prudent sur le Chickenderpig. Quel nom ridicule il portait par ailleurs. Le jeune homme constata des variations dans la vitesse de déplacement des animaux d’ombre. Soudain, l’un d’entre eux bondit dans sa direction, et fit mine de l’agresser. Dom fit un bond en arrière, mais l’attaquant le traversa. Dom ne ressentit pas même un souffle, pas un contact. Rien. Chickenderpig fit enfin un mouvement. Il posa simplement ses yeux sur Dom, et reprit son état statique. Cependant, le temps d’attente fut cette fois-ci négligeable. Une sorte de tourbillon légèrement bleuté pris peu à peu forme entre le pseudo-dieu et Dom. Il s’épaissit, et une silhouette humanoïde se forma à l’intérieur. L’effet inverse s’appliqua ensuite au vortex, qui disparut peu à peu. Des chaussures de cuir parfaitement lustrées, un costume repassé à la perfection et sans un seul accroc, un chapeau raffiné, placé idéalement sur une tête aux cheveux châtains… Dom put distinguer bientôt le visage du mystérieux arrivant, et nota non sans un haussement de sourcil le parfait état de son habit, chose inhabituelle vu que rien ne permettait d’éviter les plis à sa connaissance. « Operamundi ? s’exclama-t-il, étonné. — Eh bien me voilà ! Mais… Que fais-je ici ? — Et bien… Il semblerait que le Chickenderpig t’ait invoqué ici. À ce propos ! Chickenderpig, vous ne m’avez… Bon. Ou pas. — Que se passe-t-il ? — Cette vile créature s’est enfuie comme il est venu… — Je vois bien cela. Toujours aussi étrange ce dieu pour ce que je peux en constater. Mais que puis-je faire pour t’aider ? Je suppose que je ne suis pas ici par hasard. — J’ignore pourquoi tu es ici exactement et je ne sais pas plus ce que tu faisais avant… — J’étais avec… — … mais tu devrais jeter un œil à ça. » Dom désigna simplement le spectacle sombre qui se déroulait non loin de là. L’homme au costume l’observa quelques instants, et hocha la tête d’un air soucieux. Il ôtât son chapeau pour se défaire d’une démangeaison incongrue durant sa courte réflexion. Il ôta machinalement quelques malheureuses particules de poussière qui avaient eu le malheur de se déposer sur son costume parfaitement net et repassé. « Tout ceci est bien étrange en effet… Et donc j’ai été conjuré en ce lieu par le Chickenderpig pour t’aider à tirer cette affaire au clair ? — Il semblerait que oui. Ça ou quel que soit son plan. J’avoue ne pas avoir très envie de savoir ce qu’il a en tête. — Eh bien ! Allons-y, hardi mon ami, ce ne sont après tout que des ombres ! » Sitôt eut-il prononcé ces mots que, telle une insulte à ses paroles, une ombre à la silhouette proche de celle d’un goupil bondit et entailla le bord de la cape de Dom. Surpris, consterné, celui-ci regarda le tissu déchiré, puis Opera, qui eut une réaction similaire. Dom se retourna vers le petit escarpement : « Il faut faire vite, le phénomène empire chaque minute qui passe. » Opera acquiesça vivement. [/justify] Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 5 février 2014 Auteur Partager Posté(e) le 5 février 2014 Yop ! Voilà trop longtemps que j'ai laissé tout ça de côté. Ainsi, voilà enfin la seconde partie de mon chapitre de mon RP citoyen. Il fait directement écho à mon RP Chevalier, qui révèle certaines zones d'ombres ouvertes par les chapitres précédents. Comme le précédent, je l'ai retouché et mis à jour par rapport à la version originale. Autrement, j'ai préparé des fichiers PDF et epub pour liseuses pour ceux qui préfèrent lire comme ça, que je mettrais lorsque j'aurais publié les deux parties de mon chapitre Chevalier. En attendant si certains d'entre-vous veulent que je leur donne les liens, n'hésitez pas. Sans plus de discours, bonne lecture ! Chapitre 4 — Seconde partie : D'Ombre et de Quête [justify] Dom confia à son compagnon une dague, ainsi que sa torche et son briquet. Les deux camarades se frayèrent un passage entre les apparitions pour accéder au dénivelé. Ils inspectèrent les lieux, à la recherche d’un quelconque indice sur cet endroit et ses évènements. Tous deux engagèrent une ronde étrange autour du sommet, où ils espéraient trouver la clé du mystère. C’est bien malgré lui que le pied de Dom buta sur une petite protubérance dans le sol. Il l’inspecta. Enfoncé dans le sol se trouvait une sorte de disque de diamètre environnant la dizaine de centimètres, et qui en dépassait de seulement un ou deux. Une mince couche de terre négligemment assaisonnée de brindilles d’herbes le dissimulait maladroitement. Néanmoins, le constat était clair : il était désormais évident que quelque chose était terré ici, et que l’on ne souhaitait pas le laisser savoir. Belle réussite au vu du capharnaüm visuel ambiant. Après avoir observé la petite proéminence quelques secondes, Dom nettoya du revers de la main sa face visible. Une poignée repliée se dévoila à l’intérieur. Il s’en saisit, tira, et souleva le cylindre. Ce dernier effectua de lui-même une rotation d’environ cent-quatre-vingts degrés, suivant ce qui semblait être un pas de vis qui guidait l’objet jusqu’au bout de son trajet. La poignée restait cependant dans la même position, comme indépendante, ce qui facilitait la tâche. Il s’éleva d’une cinquantaine de centimètres, pour s’y bloquer sans pouvoir perdurer dans son ascension davantage que cette hauteur. Un bruit sourd et métallique se fit entendre. Rien d’autre ne se produisit. Après s’être regardés l’un et l’autre, Dom et Opera décidèrent sans un mot de rechercher d’éventuels appareillages identiques éventuellement situés dans le secteur. Au bout de quelques minutes, un autre fut trouvé par Opera, qui en découvrit un troisième peu de temps après. Un quatrième se laissa vite dénicher parmi les herbes humides. Ils décidèrent d’en tirer un second au hasard. Un autre bruit sourd et métallique se fit entendre, plus proche cette fois-ci. Ces bruits ressemblaient à un bruit de porte ou de verrou très lourd. Mais rien d’autre ne se produisit cette fois-ci non plus. Du moins, à première vue. En effet, quelques petites secondes plus tard, le premier mécanisme que Dom avait activé se rebaissa, laissant encore une fois retentir le court grondement sourd et lointain de loquet imposant et massif. Perplexes, les deux aventuriers se dirigèrent donc vers un troisième ustensile. Ceux-ci étaient – semblait-t-il – disposés aux quatre points cardinaux, centrés autour du sommet de la petite butte. Ils se retrouvèrent tous deux de chaque côté du troisième. Le premier correspondait à la direction ouest, le second au sud, et celui en face d’eux, le nord. Chacun de nos deux héros hésitait à présent. Leurs regards se croisèrent, et le même éclat d’inquiétude et d’appréhension luisait dans leurs yeux. Ils avaient activé les deux commandes précédentes, mais n’avaient en réalité aucune idée sur quels pouvaient être leurs effets ou conséquences. L’accélération de l’activité des spectres les força à agir. Par chance, ils apparaissaient sur les bords de la motte de terre et d’herbes. Dom et Opera n’avaient malheureusement pas de meilleure piste pour avancer. Le premier se saisit de la poignée. Il inspira, gonfla ses poumons du bon air frais au doux parfum de verdure, affirma sa prise, et tira. Cette fois, l’effet se fit attendre. Au bout d’un certain temps, un bruit sourd et grave provint du sol de manière continue. D’abord très faible, il gagna en intensité pour en devenir assourdissant. Le sol tremblait légèrement et donnait l’impression que quelque chose de massif se déplaçait sous terre. Le centre de la colline commença à se soulever selon une forme parfaitement circulaire. Le tremblement ne cessait pas, s’intensifia même. Dom jeta un rapide coup d’œil alentour. Les ombres semblaient comme figées, ou tout du moins elles se déplaçaient à une vitesse presque imperceptible. Le cylindre qui s’élevait en face des deux compagnons laissait apparaitre une cage circulaire contenant un escalier en colimaçon escarpé. À présent élevée de presque deux mètres, elle était taillée dans une roche parfaitement lissée, très lourde et dense, parcourue de veinures jaunâtres. Dom ignorait quel système pouvait déplacer un tel édifice, mais il était sans aucun doute très complexe. Le tout s’immobilisa brusquement, arrivé au bout de sa course. Les grondements stoppèrent instantanément. Un vent glacial et nauséabond sortit en quelques bourrasques du gouffre sombre en face des deux hommes étonnés. Il fut suivi peu après d’un autre bruit de verrou, cette fois plus net et distinct. Le silence fit place au vrombissement assourdissant qui venait de cesser. Les secondes passaient, lentement, s’étendant dans l’ambiance étonnamment calme du lieu. Opera et Dom regardaient autour d’eux, étonnés de l’immobilité des ombres. On les distinguait beaucoup mieux à présent qu'elles étaient immobiles. De nombreux animaux d’origine forestière étaient modélisés sous ces formes brumeuses et sombres, et semblaient créés dans les ténèbres eux-mêmes. Soudain, dans un brouhaha aigu et désagréable, tous reprirent inexplicablement leur course effrénée. Il leur fallait décider quoi faire. Dom choisit de descendre prudemment le colimaçon. Doté d’une torche fraichement allumée, il commença à emprunter les marches légèrement humides. Au bout de quelques marches, la température de l’air ambiant avait déjà chutée de plusieurs degrés. Une légère brume épaississait légèrement l’atmosphère. Encore quelques marches et de la mousse verte et épaisse commença à se laisser distinguer par endroits, disposée par petites plaques irrégulières et aléatoires sur les parois et les marches. Cela faisait quelques minutes déjà que la descente se poursuivait, où il descendait chaque marche prudemment. Celles-ci aboutirent finalement, après cet enfoncement au sein même d'une obscurité humidité qui les rendait alors glissantes par moment, sur un court couloir sombre. Celui-ci ne s’étendait que sur quelques mètres, mais même à l’aide de son flambeau, la visibilité restait très faible pour Dom. Le corridor étroit semblait interminable, et le rendait tellement mal à l’aise qu’il eut un instant d’hésitation. N’importe qui aurait eu une telle appréhension. C’est seulement après avoir pris une profonde inspiration, malgré l’odeur immonde semblable à une mixture composée de soufre et de pourriture vieillie, puis avoir dégluti d’anxiété que Dom osa poser un pied devant lui. Il stoppa immédiatement son geste, aux aguets, et légèrement vouté, prêt à réagir au moindre signe. Patient, il attendit le signe du déclenchement d’un éventuel piège, les bruits de pas d’une créature démoniaque et redoutable. Rien ne se produit. Il avança donc, prudemment et un pas après l’autre, plus lentement et silencieusement que jamais. Au bout de quelques mètres, le bout de sa botte de cuir butta contre un lourd et épais objet métallique obstruant le passage. Il approcha sa torche, intrigué, et y passa une main tremblante. Une porte imposante, à la face sculptée finement d’arabesques et dessins stylisés, complexe, empêchait quiconque de continuer sa route au cœur de ces ruines. Ces dessins, intacts et sans accrocs malgré le grand âge qu’ils semblaient avoir, représentaient diverses créatures et constructions qui semblaient dater d'une époque légendaire et lointaine. Dom tenta de pousser le lourd bloc de métal, qui ne fit pas même mine de s’ébranler. Aidé de sa torche, il se mit désespérément en quête d’un interrupteur, d’un levier, qui lui permettrait de déverrouiller l’obstacle. Ses recherches demeurèrent infructueuses. Un appel paniqué d’Opera parvint timidement au fond du corridor. Il s’inquiétait du silence prolongé de son ami, et du temps qu’il prenait pour remonter. Dom débuta l’ascension des marches qu’il avait longuement descendues pour lui faire part de ses découvertes. Opera vit finalement apparaître le sommet de la capuche de son compagnon. Accueillant avec joie l’air frai de la nuit, Dom abaissa le col de sa cape, et inspira enfin une profonde bouffée de dioxygène fort bienvenue. « L’escalier débouche sur un couloir. Cependant, il est obstrué par une lourde porte en métal, ajouta-t-il en désignant l’entrée des ruines. Je pense qu’elle ne peut être actionnée que par un mécanisme, or rien en bas ne permet une telle chose. Ce qui veut donc dire… — Ce qui veut donc dire que c’est l’un de ces leviers qui l’active, termina son compagnon. — Exactement. — Mais comment faire pour avancer ? Même si je reste ici, comment pourrais-je savoir quel levier actionner, et quand le faire ? » Un court silence s’installa entre les deux camarades durant leur courte réflexion. Une idée traversa l’esprit de Dom. Il fouilla dans son sac sous les yeux interrogateurs de son pair, en sortit la fine corde de Jesolas, qu’il avait bien heureusement pensé à prendre avec lui pour ce périple. Il la tendit enfin à son compagnon surpris. « En quoi ce bout de ficelle nous sera-t-il utile ? s’enquit le jeune homme en costume. — Attention, ce n’est pas un simple bout de ficelle. Cette corde m’a été offerte par notre Reine lors de mon arrivée à la fourmilière. Bien qu’elle soit fine, il l’a personnellement enchanté, et elle est particulièrement résistante. De plus, elle possède une caractéristique qui va nous être très utile ici. — C'est-à-dire ? — C'est-à-dire que cette corde est enchantée pour permettre aux phéromones des fourmis de se déplacer en son sein. Ce qui veut dire qu’elle va nous permettre de communiquer. » Il le regarda, l’œil brillant, un sourire satisfait aux coins des lèvres : « Merveilleux ! Il faudra que je félicite la Reine pour cette idée, et que je lui en fasse commande. — Oui, c’est une bonne idée. À présent, prend ce bout. Elle devrait être assez longue pour me permettre d’aller où bon me semble. » Dom noua la solide cordelette à sa ceinture, saisit sa torche, et s’enfonça à nouveau dans les épaisses ténèbres des vestiges ancestraux qui s’étendaient sous ses pieds. Il emporta le rouleau de corde avec lui, par mesure de prudence, et le déroula au fil de son avancée. Rapidement il atteint de nouveau le même point, qui provoquait chez lui toujours la même appréhension mêlée de peur, d’inquiétude. Il avança d’un pas empli de doute jusqu’à la cloison de métal sombre. Bien que très inquiet, il tremblait également d’excitation, sentant le danger approcher. Il prit quelques secondes pour l’observer à nouveau, y cherchant un indice ou un avertissement sur ce qui l’attendrait une fois la cloison franchie. Il ne vit que les mêmes créatures étranges et inconnues que lors de son premier passage. Certaines semblaient simplement décorer, d’autres étaient représentées luttant contre des personnages humanoïdes qui semblaient apeurés. Mais tous étaient très finement gravés, présentaient nombre de détails subtils, encadrés d'arabesques couvertes de roses, ronces, et autres fleurs exotiques. Dom était subjugué devant cette œuvre d’art, captivé, imaginant le travail colossal de l’artisan qui avait autrefois réalisé cet ouvrage. C’est finalement un bref appel inquisiteur d’Opera qui le tira de sa rêverie. Il libéra quelques phéromones pour lui demander d’activer l’un des trois autres leviers, peu importe lequel. Il leur faudrait essayer dans tous les cas, car ils ignoraient tout de leur effet à chacun, et il fallait avancer. Le jeune homme en costume opta pour la quatrième et dernière commande qu’ils n’avaient pas encore activée. Le son du cylindre frottant contre les parois de son réceptacle lui parvint faiblement, lointain mais tout de même audible. Les secondes d’attente s’étendaient longuement, trop longuement, avant qu’un signe visuel ou auditif ne se manifeste. Rien ne s’ébranla en face du jeune guerrier. En revanche, un son d’ouverture relativement proche se fit entendre. Dom envoya par notification chimique à Opera de noter l’emplacement du levier qu’il venait d’activer, et lui demanda d’en essayer un second. Il lui dit ensuite de se diriger vers celui se trouvant en face. Par chance, quelques secondes plus tard, la paroi se souleva lentement pour s’enfoncer dans la voute. Même avec tous les efforts possibles, Dom n’aurait pas pu ouvrir cette porte d’une manière traditionnelle. C’était un stratagème simple, mais efficace pour freiner les intrus. Cela poussa davantage sa curiosité envers cet endroit, mais aussi sa méfiance. Des pièges pouvaient être disséminés n’importe où, et il lui fallait être prudent. Une fois la voie dégagée, il s’engagea dans la suite des ruines. Le chemin semblait interminable, mais le couloir s’élargit peu à peu, jusqu’à atteindre une largeur d’environ cinq mètres, pour six de hauteur. Quant à la longueur, Dom l’estima à une centaine de pas, peut-être le double : la faible visibilité et la brume légère l’empêchaient en effet d’être précis dans ses mesures. De plus, ces lieux donnaient l’étrange impression d’être hors du temps, hors de l’espace. On y vagabondait sans aucune notion qui peuvent à l’accoutumée accompagner et coordonner les journées, comme l’écoulement des minutes, la course du soleil, ou encore les distances et mesures. Ici, tout semblait différent, appartenant à un monde différent, inconnu et subtil. Sur les murs, au départ tout juste taillés au strict minimum de soin qu’un sculpteur eu pu leur offrir lors de leur conception à même la roche, apparaissaient à présent – timidement, sans cesse plus nombreuses, fines et soignés – des gravures, taillées elles aussi dans ces murs de granite. Ceux-ci étaient sans cesse plus finement travaillés, à présent décorées de fresques complexes. Ces œuvres paraissaient semblables à celles que Dom avait auparavant remarquées et admirées sur la cloison mobile qui lui obstruait la route. Fasciné, il sortit d’une de ses poches un petit carnet, conçu à l’aide d’un papier assez grossier et peu fin, et dont la couverture et la reliure étaient d’un cuir simple mais de bonne qualité. Il sortit également une fine plume, et un encrier facile à transporter. Il nota brièvement ses observations, persuadé qu’il s’agissait d’une découverte unique. Une fois ses notes achevées, il rangea paisiblement son carnet et ses ustensiles dans une poche, et se releva. Il avait presque oublié où il se trouvait. Néanmoins, il était parfaitement conscient de la présence sur sa droite, plus loin dans le couloir, qui l’observait avec insistance depuis plusieurs minutes, prêt à l’attaquer à tout instant. Il discernait une forme massive, dont se dégageait des sentiments bien trop nombreux et désordonnés pour pouvoir être interprétés. Il sentit néanmoins parmi eux un fort désir de se défendre, et une forte envie de tuer l’intrus. Il saisit à nouveau sa torche déposée au sol, et il fit volteface en direction de la sortie. Il la secoua d’un geste sec. Elle tomba sur le sol en résonnant, encore fumante et rougeoyante. La présence eut un mouvement de recul, puis s’approcha en bondissant, se demandant où avait disparu son visiteur. Elle gratta nerveusement le sol, frappa un mur, emplie de rage, et balaya nerveusement le couloir de son regard. Dom avait glissé dans un recoin, se fondant dans l’obscurité. Sa respiration imperceptible accompagnait seulement son cœur, et il ralentissait de plus en plus ce dernier. Quelques secondes plus tard, une forme glissa devant lui, avant de revenir et de s’appuyer contre le mur où il se trouvait. Il entendait et sentait sa lourde respiration. En face de lui se trouvait une ombre imposante, recroquevillée pour tenir dans le couloir néanmoins très large et haut. Il la distinguait à peine tant elle se fondait parfaitement dans le noir du lieu, bien qu’elle soit très proche. La créature cherchait du regard l’intrus qui s’était introduit dans les souterrains. Il s’éloigna peu après. D’un seul mouvement, Dom, toujours camouflé, attrapa son briquet et dégaina sa lame sans un son. Il bondit hors de sa cachette, roula sur le sol. Saisissant sa torche, déjà rallumée avant même qu’il pose l’un de ses genoux au sol, son autre pied à plat. Il lâcha son épée près de lui, sortit son arc, plaça la flèche contre la corde. La torche tenue en avant par la même main qui tenait l’arc, il tira la corde contre sa joue. La pointe du trait rencontra les langues de feu, et s’embrasa à son tour. La créature se retourna et bondit. L’épée d’acier du guerrier toucha enfin le sol dans un tintement clair. :air: Dom décocha. :air::air: L’éclair ardent siffla en parcourant la distance le séparant de sa cible à une vitesse fulgurante. Il ne fut plus qu’à quelques centimètres avant de toucher la créature. Dom put donc la distinguer un bref instant. La pointe acérée s’enfonça dans la chair de l’assaillant, toujours bondissant vers Dom. Celui-ci avait déjà encoché une seconde flèche lorsque le monstre touché s’effondra devant lui en gémissant, faisant gronder le sol de son poids. Le premier tir l’avait transpercé de part en part. Dom recula de plusieurs pas, le tenant toujours en joue. Il relâcha finalement la corde et rangea la flèche afin de ramasser sa lame au sol. La créature se releva. Elle ne semblait pas blessée, et ne perdait pas de sang. Il sembla secouer la tête, bien qu’il fût difficile de ne discerner que sa silhouette. Il rouvrit les yeux. Des yeux rouges, emplis de peur, et prêts à combattre jusqu’à la mort pour survivre. Le sang de Dom ne fit qu’un tour tant son instinct reprit le dessus. Il bondit en avant, relâchant malgré lui une série de phéromones de danger, de dissuasion. Celles-ci parvinrent à Opera, qui l’oppressa de questions terriblement inquiètes par l’intermédiaire de la corde toujours nouée à la taille du combattant. Il n’y prêtât que peu d’importance. Son saut permit par miracle à Dom d’éviter un coup de la chose située en face de lui, quoi que ce fût. Il sentit néanmoins une masse lourde et glaciale passer non loin de sa gorge, qui par miracle ne fut pas touchée. La lame de Dom luisait faiblement à la lumière de sa torche. Mais il était une fourmi de Bel-o-Kube, certes d’apparence humaine, mais qui en possédait néanmoins les capacités, et de manière bien plus développée que les simples fourmis animales. Ses antennes, internes dans son cas, et ses yeux pouvaient suffire. Les premières pouvaient détecter de manière précise chaque mouvement, flux d’air, ou odeur, et les seconds étaient capables d’avoir une vision large, en raison de leurs très nombreuses facettes, et infrarouge. Pour cela, Dom remercia Jesolas de lui avoir permis de bénéficier de son statut de fourmi, et la Gemme de l’avoir mystérieusement doté de ces capacités myrmécéennes, qu’il ne maîtrisait malheureusement pas complètement. :air::air: Une fois ces nouveaux sens éveillés, la torche lui était à présent inutile. Il contracta son muscle, et envoya le flambeau en direction de son adversaire. Il ne broncha pas, mais à son contact, la flamme disparut instantanément. Néanmoins, le manche du flambeau traversa le monstre, pour ensuite effectuer quelques rebonds sur le sol, et achever sa course en glissant. En revanche, la créature eu une réaction de rejet et de répulsion envers la flamme. Elle se roula en boule quelques secondes, tremblant, avant de finalement se relever lentement. Même recroquevillé sur lui-même comme il l’était, le monstre était très imposant, et obstruait à lui-seul le passage dans son quasi ensemble. Dom couru pour lui porter un coup décisif. Deux traits rouges apparurent sur la forme sombre, s’épaississant, laissant apparaitre deux pupilles verticales à la profondeur insondable. Le jeune homme stoppa instantanément sa course, inquiet, et recula de deux pas par prudence. Il plongea ses yeux dans ceux qui venaient de réapparaitre, tentant de deviner ses intentions, son prochain mouvement. Étonnamment, aucune émotion ne fut visible à aucun moment. Les yeux de la créature étaient vides. :air::air: Un éclair éblouissant aveugla Dom à nouveau. :air::air: Dom était dans une pièce blanche et aux teintes bleutées. Sur sa droite, une grande fenêtre ouverte était assombrie par une grande silhouette sombre. Les fins rideaux de soie volaient sous le doux vent du milieu de la nuit. Au centre de la pièce se trouvait un lit, et près de ce lit un jeune homme au visage masqué par l’obscurité. Les draps immaculés se teintaient peu à peu de rouge, tandis qu’une fine larme tomba sur les dalles du sol. L’homme près du couchage couru jusqu’à la fenêtre, et sauta sur la toiture. Des gardes postés à la porte, lame tirée, vociférèrent des insultes avant de se précipiter vers l’ouverture. L’un d’eux hurla une demande de renforts. :air::air: Une forêt s’étendait autour de Dom, dense et sombre. Un fugitif le fit sursauter en passant près de lui, courant aussi vite que ses jambes pouvaient le porter. Lorsqu’il fut éloigné de quelques mètres, il fit volte-face et décocha une flèche rapide derrière lui. Un homme en armure s’effondra près de Dom, le trait fiché dans la gorge. Dom vit quelque chose briller sous la capuche de l’homme qui venait de décocher. Ce dernier se retourna, et reprit sa course. :air::air: Dom était toujours en garde, le regard dans le vague, lorsqu’enfin il reprit le contrôle de son esprit embrumé. Il cligna à de nombreuses reprises de ses yeux au regard choqué. Profitant de l’ouverture que son adversaire laissait bien malgré lui, le monstre inconnu laissa soudain apercevoir au plus profond de ses yeux une lueur semblable à celle d’une créature tentant le tout pour le tout pour sa survie. Il plongea à une vitesse foudroyante une extrémité extrêmement pointue et acérée située au bout de l’un de ses membres – probablement une griffe – dans l’épaule gauche de Dom. Grace à un miracle, ce dernier réussit à se décaler très légèrement sur la droite, pour ne pas se faire toucher au cœur. L’éperon invisible se retira de la plaie aussi vite qu’il s’y était glissé, et l’ombre, bondissant rapidement sur sol, murs, et voute, s’enfuit rapidement. Le blessé déposa un genou au sol, compressant la plaie, et ne distinguant qu’à peine les appels d’Opera, paniqué, fou d’inquiétude. Un rictus de douleur se dessina sur son visage tant l’entaille était large et profonde. Elle était de forme globalement triangulaire, de la forme de la griffe de son agresseur. Dom eut peur durant un instant que son bras soit presque arraché. Par chance, il n’en était rien. Ses yeux perdirent malgré eux leurs multiples facettes minuscules et invisibles, qui s’effacèrent pour laisser placer à son système visuel humain, qui reprit de lui-même le dessus. Ces transformations partielles étaient certes utiles, mais très épuisantes et complexes à appréhender. Des filets de sang coulaient le long de son bras malgré ses tentatives vaines de stopper l’hémorragie. Luttant contre la douleur, le jeune homme força son corps à se relever, pour ensuite suivre le lien qui le reliait à son compagnon. Il lui fallait à tout prix stopper cette perte de liquide chaud et rougeoyant qui s’échappait de la meurtrissure. Dom indiqua à son ami de relever la cage d’escalier en colimaçon qui lui permettrait de rejoindre la surface. C’est en courant que ce dernier vint pour l’accueillir à sa sortie. :air::air: « Bon sang, Dom, que s’est-il passé au juste là-dedans ? Explique-toi ! :air::air: — Une ombre, grande, très grande, commença-t-il. Elle m’a eu de vitesse. » :air::air: Les jambes de Dom cédèrent, et il s’écroula. Opera l’aida aussitôt à retirer sa chemise de lin noire et à présent trempée de sang. Il lui offrit un morceau de cuir, que le jeune homme coinça entre ses dents. Il mordit fermement. Opera sortit du sac de son compagnon un rouleau de bandages, un nécessaire de soin et une bouteille d’alcool. Il hésita l’espace d’une seconde, puis déboucha la petite bouteille. Une voix lui indiqua de stopper son geste. Ou plutôt une phéromone. Quelqu’un s’empara de la bouteille et renversa le contenu de cette dernière sur son épaule nue. Le contact du liquide avec la plaie brûla horriblement Dom, qui crut que le cuir entre ses mâchoires allait de céder. Le nouvel arrivant s’empara de la trousse médicale de cuir, et entreprit de recoudre l’espace béant créé par la créature, maniant l’aiguille préalablement chauffée à blanc à l’aide du briquet avec dextérité et rapidité. Il parla sans cesse à Dom durant l’opération, pour tenter de lui faire oublier la douleur : :air::air: « Dis-moi, tu as des idées concernant le Big Rock Café ? À présent que l’on a demandé à obtenir l’élargissement de nos frontières à l’est, il faudra que nous aménagions la Montagne. D’ailleurs, Nazgrelx a encore vidé tout un tonneau de Gorgeraide hier, on l’a retrouvé en train de chanter en barbotant dans l’anneau d’eau, près de l’arbre. Il parlait à un panda roux. D’ailleurs, ce n’est pas la première fois que l’on voit passer ce curieux animal, je me demande bien ce qu’il peut faire dans le coin… » :air::air: À cet instant, une intense douleur foudroya le blessé dans toute la longueur du bras, sans doute à cause d’un nerf que le chirurgien de fortune ait effleuré. Les larmes de Dom lui montèrent aux yeux, la bande de cuir approcha de la fin de sa vie, et un bref cri étouffé s’échappa malgré lui de ses poumons. Tel un brasier, la douleur qui consumait son bras s’atténua, restant présente, mais toujours proche et prête à ressurgir. Il inspira profondément, tentant de se contrôler. L’inconnu reprit : :air::air: « Pardonne-moi, j’ai dû replacer un nerf à vif. Toujours est-il, la vie devrait reprendre de plus belle, avec ces nouvelles recrues qui affluent, et qui ont d’ailleurs une fâcheuse tendance à affoler notre compatriote ami du panda. D’ailleurs, à propos de lui, je trouve qu’il commence à avoir une tête d’ours aux yeux écarquillés, pas toi ? Et cette nouvelle alliance qui se profile est une vraie aubaine. Ah ! J’ai presque terminé. Tiens, regardes, et dis-moi si le résultat te convient. » :air::air: Dom observa avec étonnement la mince ligne irrégulière qui partait de l’avant de son épaule vers trois directions : le bras, le torse, et la clavicule. Chaque fente, d’une demi-douzaine de centimètre, attestaient bien de la taille démesurée de l’arme, ou du moins de l’objet acéré qui l’avait transpercé. Par chance, les muscles ne semblaient pas touchés outre mesure, malgré quelques douleurs. Dom releva les yeux, et regarda la fourmi albinos qui venait de lui sauver la vie. Ti-ret se trouvait aux côtés d’Opera. Le premier envoya une phéromone de soulagement, et le second souriait nerveusement, encore inquiet. Le jeune homme les observa avec soulagement. :air::air: « Merci, je vous dois une fière chandelle. Merci à toi Ti-ret, j’ignore pourquoi tu es ici, mais tu tombes à pic. :air::air: — Ne me remercie pas, c’est tout naturel, répliqua-t-il tout en essuyant ses mains souillées du sang de Dom sur un mouchoir blanc sorti d’une de ses poches. » :air::air: En signe de gratitude et de respect, Dom inclina donc la tête. Il prit encore quelques minutes pour se remettre de ses émotions, durant lesquelles il fit un récit de la situation à ses deux compatriotes. La douleur de la balafre s’estompait peu à peu, toujours présente et prête à refaire surface, mais à présent plus clémente après les traitements de la fourmi. Les trois camarades se tournèrent enfin vers l’entrée toujours ouverte. D’un commun accord, ils prirent la décision de se séparer en deux groupes. Opera les soutiendrait dans leur avancée, tandis que les deux autres s’aventureraient plus avant au sein des conduits humides. :air::air: Les deux assassins débutèrent donc la descente de l’escalier. Dom engagea la marche. Bien vite, ils arrivèrent sur le lieu du duel, après qu’Opera leur eut ouvert la porte. Le sang noir de Dom qui avait aspergé le sol n’avait pas bougé. Un grondement sombre suivit d’un bref tremblement se fit entendre. :air::air: Il n’y avait aucune intersection au sein de ce tunnel sans fin. Ils arrivèrent au bout de plusieurs minutes de marche à une autre porte. À présent, chaque minuscule parcelle de mur, de plafond, de sol, était recouverte par des dessins semblables à ceux relevés auparavant par Dom. Ce dernier ne releva qu’un seul point commun : de nombreuses créatures étaient représentées, mais toutes présentaient les mêmes yeux, la même dentition, et chacune étaient affublés d’un étrange symbole sur la pâte gauche. La troisième commande qu’Opera essaya n’était pas la bonne. Il tenta donc la dernière, qui releva lentement la lourde plaque de métal après quelques secondes. Prudemment, les deux compagnons entrèrent dans la nouvelle portion des conduites. L’un et l’autre n’étaient qu’ombre et silence. Le jeune homme hybride et la fourmi albinos progressaient sans aucun éclairage. Ils arrivèrent enfin à ce qui devait être la dernière porte. Un mal de crâne terriblement agressif tiraillait le pauvre Dom. Quelque chose le dérangeait dans cet endroit et le mettait terriblement mal à l’aise. Il demanda à Opera d’actionner le dernier mécanisme. :air::air: Une brume sombre s’infiltra par l’appel d’air créé lors du soulèvement de la cloison d’acier qui renfermait les derniers secrets de ces lieux. Un instant plus tard, les deux infiltrés se trouvaient arme au poing à l’angle du virage emprunté par le corridor. En face d’eux se trouvait une pièce circulaire, dont les murs arrondis n’étaient interrompus que par une simple porte de vieux bois à l’opposé de leur position. Le sol de marbre blanc contrastait fortement avec les murs de roche brute et le plafond de terre. La pièce ne devait se situer juste en dessous de la surface, un peu plus loin que la colline présente à l’entrée. :air::air: Au centre de la salle se trouvait une masse noire et fumante. De la taille de deux hommes et de la corpulence – tant au niveau du volume que de la masse musculaire – de deux gros ours, celle-ci grognait. Malgré l’obscurité quasi-totale, Ti-ret et Dom discernaient bien mieux la créature. Tous deux froncèrent les sourcils. La chose semblait faite de la même matière que les animaux à l’extérieur. Dotée de muscles impressionnants, elle possédait d’énormes bras armés de griffes. Elle semblait endormie et bougeait au gré de ses rêves. Tous deux entrèrent sans un bruit et entreprirent d’explorer les lieux. Dom remarqua dans le fond quelques statues. Il s’en approcha, curieux. Il les observa sans grande attention, jusqu’à ce qu’il reconnut parmi elles une réplique remarquable de Nazgrelx. Étonné, il l’observa avec attention, avant de voir que les yeux de la statue étaient paniqués et qu’ils bougeaient. Ce n’était pas une statue, mais Nazgrelx lui-même, immobilisé au sein d’une geôle de roche le moulant jusqu’à en devenir son effigie. Dom ouvrit de grand yeux et failli lancer une exclamation incrédule, se ravisant juste à temps pour ne pas réveiller le monstre. Il jeta un rapide coup d’œil aux autres sculptures, et il en était de même pour chacune d’entre elles. Tous les voyageurs disparus depuis les derniers jours étaient séquestrés ici-même. Le jeune guerrier fit un signe à Ti-ret, qui vint à son tour constater les faits. Sans un mot ils étaient d’accord : la menace était trop grande pour qu’ils s’en chargent pour l’instant. Ils attendraient que le monstre soit maîtrisé. Dom fit signe à Nazgrelx et ses compagnons de ne pas faire trop de bruit. Ils s’éloignèrent en silence. Néanmoins, rien d’autre ne valait le détour dans la salle. :air::air: Après quelques minutes Nazgrelx s’agita bruyamment, gémissant sous son bâillon minéral. Dom se retourna vivement pour quérir un peu de silence de sa part. Il fit volte-face et se retrouva nez à nez avec la créature qui venait de se réveiller. Il ne bougea pas, et celle-ci grogna enfin après quelques secondes. Dom roula sur le côté, esquivant un coup de patte. Il tira sa lame juste à temps pour en bloquer un second qui le fit reculer sous l’impact. Par chance, sa blessure tint le coup et ne se rouvrit pas. Ti-ret, invisible et rapide comme l’éclair s’approcha de lui et lui taillada la jambe d’un coup rapide et bien placé d’une de ses deux dagues d’adamantine. La bête gémit. La blessure béante fuma, mais se referma après quelques secondes. Lorsqu’elle se tourna en direction de la fourmi, celle-ci avait déjà disparu. Elle se retourna encore, et c’est Dom qui s’était lui aussi envolé. Chacun des deux ombres se fondaient dans l’obscurité. Le cœur de Dom pulsa. Puis à nouveau après quelques secondes. Son souffle était lent, imperceptible, son cœur ralentissant peu à peu jusqu’à son extrême limite. Entre deux statues, son arc fut bandé en une fraction de seconde. Il savait que non loin de là, son camarade était lui aussi prêt à lancer l’assaut. Un grondement sourd se fit entendre. La bête commença un mouvement de la tête vers le plafond afin d’en identifier la cause. Dom lâcha sa corde. Ti-ret s’élança. Une ouverture se dessina sur la voute, jusqu’à dessiner une forme rectangulaire. La flèche de Dom toucha sa cible, les lames de la fourmi firent mouche. À cet instant, le plafond chuta selon la coupure dessinée. Le bloc se brisa sur le crâne du monstre. Dans la fumée, une troupe d’une vingtaine d’homme arriva en sautant depuis l’ouverture fraichement créée, et se dispersa autour de la pièce, encerclant la bête sonnée. Quatre silhouettes se détachèrent de la brume pour avancer vers Dom. La première était surmontée de deux formes allongées. :air::air: « Sieur Fulmen ? Les renforts que j’avais promis sont arrivés, non sans mal. :air::air: — SL ? s’enquit le concerné, surpris. :air::air: — Lui-même, répondit le lapin blanc en émergeant de la poussière, qui n’avait même pas ternit son pelage immaculé. » :air::air: Arthur était avec lui, ainsi qu’Opera et Tybalt. Sans les laisser discuter davantage, la créature noire se releva, laissant tomber au sol de grosses et lourdes pierres. Dom aurait tout le loisir de demander à Arthur et au Chevalier la raison de leur présence plus tard. Le sentiment que la chose dégageait dérangeait Dom, et elle lui semblait à la fois familière et inconnue. L’adversaire se dressa sur ses pattes postérieures, puis poussa un hurlement bestial. Une onde fumante s’échappa de lui, et nombre de répliques miniatures de lui-même se formèrent dans la pièce. SL ordonna à un petit groupe d’assurer la sécurité des statues. De tout côté, des duels et des batailles s’engageaient afin de vaincre les invocations. Le lapin mage débuta la récitation de formules afin de contrer la puissante magie du démon. Une garde de quelques soldats était chargée de le protéger. Par chance, les soldats menés par SL et son camarade chapeauté résistaient parfaitement bien, et durant de nombreuses minutes on ne dénombra que quelques blessures légères. Opera, Ti-ret, Dom, Arthur, Tybalt, tous combattaient valeureusement. Proche d’un mur, après avoir achevé une créature de son épée qui disparut aussitôt dans un nuage de fumée, Dom fut pour une troisième fois aveuglé. Il tomba à genoux, le regard fixé face à lui, inconscient. :air::air: Dom ouvrit les yeux. :air::air: Autour de lui, tout était différent. Dans la salle, tous les soldats encore valides entouraient la créature ténébreuse, dont l’assassin d’albâtre. Les blessés, eux, étaient rassemblés dans un coin, défendus par Arthur et deux des leurs encore en bonne santé, accompagnés par le chevalier au tromblon, vaillant malgré son grand âge. SL, seul cette fois, mais tout autant concentré, continuait ses incantations aux côtés de Dom. Quelques créatures continuaient d’apparaitre par moment, les attaquant tous deux inlassablement. Cependant, aucune d’entre elles ne passaient. Boitant, le visage et le bras gauche ensanglantés, le bras lourd, et le costume sale, Opera se dressait héroïquement devant ses deux compagnons, les protégeant sans relâche. Seul son légendaire chapeau était encore en parfait état. Dom s’empressa de reprendre ses esprits et se releva. À cet instant, le monstre se dressa, et jeta tout le monde à terre par une onde de choc. Opera ne parvint pas à se relever. C’est alors que le colosse lança une vague mentale, agressant d’un même coup les esprits de tous les guerriers, mis à part Dom. Seul SL résistait plus ou moins correctement, psalmodiant des vers afin de garder sa concentration et repousser l’envahisseur. :air::air: Pour la première fois depuis plusieurs minutes, la salle était silencieuse. Seuls les prisonniers ceints par leurs enclaves de roche regardaient la scène figée avec consternation. Voyant tous ses camarades ainsi maîtrisés, Dom commença à perdre son sang-froid. Bientôt, le monstre fut près de lui et lui souffla une longue bouffée d’air sur le visage. Ses yeux étaient terrifiants. Il leva le bras, pointant pour la seconde fois ses griffes acérées sur la poitrine de sa victime. La douleur qu’il avait ressentie revint à l’esprit de Dom. Il paniqua. Plongeant sous les pattes postérieures de celui qui voulait sa mort, il se dirigea vers la sortie, trébuchant sur une roche. Un mouvement brusque fit se rouvrir de quelques centimètres la plaie fraiche à son épaule. Une créature d’ombre apparut sur la route. Tentant le tout pour le tout, le fuyard se dirigea alors vers la porte qu’il avait aperçue auparavant. Il l’ouvrit avec fracas, sortant presque le battant de ses gonds. En face de lui s’étendit seulement une salle vide et sombre. La créature de cauchemar passa par la porte. :air::air: Oui... Car il faisait noir à présent. Terriblement noir. :air::air: Les éléments étranges se multipliaient autour du jeune homme apeuré. En face de lui, des ombres d’une rapidité improbable apparaissaient régulièrement par l’ouverture de la porte, d’où provenait la faible lueur du croissant de lune se déversant dans la pièce précédente. Elles semblaient s’amuser avec lui, l’effrayer par un simple et pur élan de sadisme et de cruauté. Il lui fallait un plan. Acculé contre le mur, assis et essayant pourtant de reculer encore et toujours, la panique prit peu à peu possession de son esprit, et ses membre refusèrent bientôt de bouger tant la peur le tétanisait. Le sang s’écoulait lentement de sa blessure à l’épaule, qui le meurtrissait, sous le rythme précipité de son cœur paniqué. Il était pris au piège. :air::air: Sa vue se brouilla, et il se sentit défaillir. C’était la fin. Il allait mourir ici, ignorant tout et ayant échoué son entreprise. Non. Non, il ne pouvait pas mourir ici. Pas maintenant. Pas sans se battre. Il gonfla ses poumons de tout l’air possible, lentement, comme profitant de cet air frais et brumeux s’offrant à lui. Tout sembla ralentir autour du jeune homme, les battements de son cœur pulsant avec d’autant plus de force que leur vitesse ralentissait. Le sang battait à ses tempes. Les ombres paraissaient à présent être immobiles, comme chaque chose autour de lui. Le temps semblait s’être arrêté. Il ferma les yeux… « Souviens-toi, souviens-toi Dom de tout ce que l’on t’a appris… Réagis ! Qu’est-ce que tu as ? Que peux-tu utiliser ? Que sais-tu ? Qu’as-tu en ta possession ? Réfléchis Dom… Dom… Dom. Dom ! » :air::air: Soudain, il pensa à ce qu’il avait remarqué une demi-heure auparavant. Il revit la réaction de celui qu’il avait affronté face à sa torche. Il se remémora les paroles du Chickenderpig. Puis il repensa à Demo. Sa main glissa vers sa sacoche et attrapa le pan de tissu que lui avait confié la fourmi. Il en sortit une boule de la taille d’une pomme, d’une couleur dorée bien que translucide. Il attrapa la sphère à deux mains, et fit tourner les deux. La pierre s’éleva, puis scintilla d’une lumière pure et couleur or. La créature grogna, se retourna et se gratta les yeux, ébloui et brulé par la lumière. Dom se releva, pensant enfin pouvoir reprendre l’avantage. Son adversaire hurla, et projeta en une fraction de seconde son esprit sur celui du jeune homme. L’esprit de Dom était assailli par la présence, terriblement forte, même contre tant de personnes. Il se recula dans un minuscule coin de son esprit. Son attaquant scrutait violemment son esprit, puis finit par se faire plus doux. C’est alors qu’une voix rauque et grave résonna dans ses pensées : :air::air: « C’est toi ? C’est toi, l’Ombre Foudroyante que même la lumière ne peut dévoiler et de qui mon père se joue injustement ? Que fais-tu ici ? :air::air: — Ma mission était d’enquêter sur la disparition de ces pauvres innocents que tu as fait disparaître sans raison, mais maintenant mon seul but est de t’arrêter. De plus, je ne comprends mot de tes paroles, et elles sonnent comme un mensonge à mon oreille, c’est inutile ! Mais présente-toi tout d’abord, toi qui me prends pour cette « Ombre ». :air::air: — Je suis le fils du Chickenderpig. :air::air: — Comment ça ? Ne te joues pas de moi vile créature, et explique-toi ! :air::air: — Je suis le fils du Chickenderpig comme je l’ai dit. J’ai simplement capturé ces pauvres hommes car ils pouvaient compromettre ma cachette. Néanmoins, la colère et la panique m’ont aveuglés et conduit à un état que je ne maîtrise pas. Je te propose un marché : je libère mes injustes prisonniers, je soigne vos blessés, et je me rends sans autres conditions que l’on cesse ce combat inutile. En échange, je te demande simplement de m’accorder une cachette provisoire, et je répondrais à toutes tes questions. Tu as beaucoup à savoir sur ton origine, et sur bien d’autres choses encore. » :air::air: Dom réfléchit quelques instants. Toujours au contact de son esprit, la présence de celui qui se disait le fils de celui qui l’avait assisté tout ce temps n’était plus du tout agressive, et au contraire était reposante. La tentation d’en savoir plus fut plus forte que la crainte de celui qu’il avait affronté sans relâche depuis la dernière demi-heure. L’assassin décida de le croire, pour l’instant du moins. :air::air: « Très bien, j’accepte. Mais ne retire pas la cicatrice que j’ai reçu de ton attaque, je la garde en tant que gage de la dette que tu as envers moi pour la blessure que tu m’as infligé. Une dernière chose, quel est ton nom ? :air::air: — On me donne beaucoup de noms par vos contrées. Néanmoins, tu peux m’appeler Umbra, car en un sens je ne suis pas si différent de toi. Si je puis me permettre encore une chose : pas un mot à mon père s’il te rend encore visite, ce serait très mauvais pour nous deux. Je t’expliquerais tout, n’ait crainte. » :air::air: L’esprit d’Umbra se retira de son esprit ainsi que de celui de tous les combattants présents. Quelques-uns menacèrent de perdre connaissance, mais un sort de leur ancien ennemi leur redonna vigueur et santé. SL releva le museau, s’apprêtait à lancer un sort d’attaque, mais il vit Dom en face de la créature. Il se retourna vers son ami Lapin et déclara à voix haute : :air::air: « Cessez le combat mes amis, et merci pour votre aide. Je vous fournirais toutes les explications une fois que les aurais acquises. :air::air: — Comment ça Dom, explique-toi ! s’effara le Chevalier au Tromblon. Cette créature a blessé plusieurs d’entre nous, et elle est dangereuse. » :air::air: Sur ces mots, Umbra s’allongea sur le sol et fit retentir sa voix, qui résonna sans qu’il n’écarte ses mâchoires : :air::air: « Et vous m’en voyez navré. Comme vous pourrez le constater, j’ai soigné toutes vos blessures, et les pauvres autochtones que j’ai dû capturer sont libérés. Je me rends sans autres conditions que celles que j’ai énoncées à Dom, je lui dois des explications, et il vous en devra à son tour. » :air::air: Ne sachant plus que dire, chacun regarda son voisin, ne sachant que faire. C’est finalement Opera qui le premier rengaina sa lame, et s’épousseta son costume en très mauvais état. Il lança un clin d’œil à Dom, et aida un soldat à se relever, puis se dirigea vers la sortie. Sans un mot, tous l’imitèrent bientôt, et la pièce se vida peu à peu. Dom était épuisé. Il s’adossa à un mur, soupira d’un air lassé et rassuré. Bientôt, il fut seul avec Umbra. Il observa la créature. Le fait qu’il soit le fils de cette étrange créature le terrifiait, même si il était plus rassurant que son géniteur. Il le fixa avec insistance. Il avait la très étrange sensation de le connaître, mais il ignorait où et quand. Son passé flou ne l’aidait pas, mais Umbra semblait juste en savoir beaucoup. Des images lui parvinrent, des sentiments aussi. Il eut l’impression de se sentir flotter dans les airs, de frissonner sous de l’eau froide enveloppant son corps. Il éprouva un sentiment qu’il n’avait que très peu rencontré ces derniers temps, celui que l’on a lorsque l’on est essoufflé par une fuite désespérée. Le jeune assassin eut également la perception d’une immense tristesse et d’un grand regret. :air::air: Et enfin, il fut épuisé. :air::air: Il fut épuisé, et repensa à sa nouvelle vie. Il repensa à tout ce qu’il avait fait depuis son arrivée parmi les fourmis de Bel-o-Kube, il songea aux personnes qu’il avait assistées du mieux qu’il pouvait. Il sourit en pensant à ses nuits blanches en compagnie de ses compagnons, lors des travaux du Kubnigera ou des Conseils, calvaires d’administration pour la prospérité de la Colonie. :air::air: Finalement, il eut l’envie de continuer sa vie paisiblement, l’envie de se reposer quelques temps. Il était fatigué, mais heureux, et il souhaitait se reposer parmi les siens, parmi ses compagnons de la fourmilière, du Lac, de la Colonie, mais aussi auprès de ceux auxquels il s’était attaché. Sa vie le satisfaisait. Il était heureux. Umbra parla de sa voix profonde : :air::air: « Ton vœux sera exaucé. » :air::air: Surpris par ces paroles, Dom le regarda. Il cligna des yeux. Ses paupières se relevèrent peu à peu. Il était debout, et ses pieds reposaient sur un plancher en bois de chêne. Il releva la tête. Une fille d’attente attendait patiemment derrière lui. En face se trouvait un guichet derrière lequel se tenait une secrétaire – Gertrude d’après le petit panonceau. Cette dernière prit la parole : :air::air: « Alors vous souhaitez postuler au grade de Citoyen de Stendel ? Très bien. Prenez ce formulaire, remplissez-le, et déposez-le dans l’urne à droite, ici, vous voyez ? » :air::air: Bouche bée, il prit la pile de feuille et s’installa sur une table vacante afin de les remplir, laissant donc sa place à la personne suivante dans la file. Sortant sa plume, il allait entamer la besogne lorsque la dame du guichet lui dit encore : :air::air: « Ah, encore une chose ! Vous devriez faire vite, le nouveau grade villageois est sur le point d’être instauré, après ça vous devrez passer par là afin d’accéder au grade citoyen. » :air::air: Une vague de surprise monta parmi la foule. Ne disant mot, Dom se dépêcha de remplir les papiers, et les déposa dans l’emplacement qui leur était destiné. En sortant, il aperçut Umbra, caché dans l’ombre de deux toits. Ce dernier hocha la tête. Dom fit de même. Bien qu’il ignorait encore comment l’étrange créature avait fait, mais il sentait au fond de lui que c’était une bonne chose. Se sentant étrangement bien, il se dirigea pas à pas vers le Kubnigera, entamant le voyage de retour. :air::air: Qui sait, peut-être serait-il bientôt citoyen ?[/justify] Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 12 février 2014 Auteur Partager Posté(e) le 12 février 2014 Yop à tous ! Me revoici pour la suite de mes aventures et de l'histoire de mon personnage ! Cette fois-ci je n'ai pas grand chose à dire de spécial sur ce chapitre, si ce n'est qu'il s'agit de la première partie du RP de ma candidature Chevalier, et qu'il est plus axé sur un certain nombre de révélations, et expliquera une grande partie des zones d'ombre des chapitres précédents. Sans plus de blabla, enjoy, et bonne lecture ! Chapitre 5 — Première partie : De Souvenirs et d'Adoubement [justify] Dom inspira profondément l'air de la campagne, bercé par les mouvements ronds et calmes de la musculature de son cheval. Celui-ci menait son maître sans hésitation : il le connaissait et savait parfaitement où les conduisaient leurs pas. Le soleil débutait sa descente vers l'ouest et rafraîchissait davantage la petite forêt de feuillus où passait le jeune homme. Sans s'endormir pour autant, ce dernier laissa sa monture le mener à bon port et en profita pour abaisser ses paupières quelques instants. Les doux rayons de l'astre lui caressaient la peau, et il profitait de ces quelques instants de calme et de sérénité. Les cris lointains et discrets des animaux, la senteur unique de la sève et du sol légèrement humide étaient autant de détails invitant au calme et au repos. Il en avait bien besoin. Le sabot droit de son cheval claqua. Il était arrivé. Ses paupières se soulevèrent. Il venait de sortir du petit bois aux chemins de terre et de feuilles pour arriver sur le côté d'une route pavée. La monture – bien que connaissant leur destination – attendit les directives de son maître. Celui-ci affirma sa prise sur les rênes et guida l'animal sur sa droite. Il passa au trot. À peine quelques minutes plus tard, à un tournant, un énorme masse de roche se dévoila. Les murs du château s'étendaient sur cinq côtés et ses pierres parfaitement taillées étaient pâles, presque blanches, à tel point que le soleil déclinant les faisaient luire d'une douce teinte rosée. Au sommet de chaque tour flottaient fièrement de larges pavillons blancs. Sur chacun d’eux étaient brodés de fines armories rouges, vertes et or représentant diverses créatures mythiques au sein d'un bouclier orné d'arabesques et de motifs. Les toitures d'ardoise de chaque bâtiment ou de chaque tour à l'intérieur du monument flamboyaient sous l'intense lumière de début de soirée, de sorte que l'on aurait cru qu'un immense brasier y brûlait perpétuellement. Tout autour des murs, les douves remplies d'eau claire attendaient patiemment d'être nourries par les intrus. Dom savait que les sentinelles postées le long des murailles l'avaient déjà aperçu, et il sentait au loin l'agitation qui régnait parmi elles. Tous le prenaient apparemment pour un étranger. Le jeune homme ajusta sa cape et se redressa. Il souhaitait tout de même avoir une allure correcte. Le fier destrier noir s'arrêta à quelques pas de la tranchée. Sous son capuchon, Dom souriait, déjà amusé. Alors que les minutes passaient, sa monture commença à piétiner d'impatience. Un homme se pencha entre deux créneaux et héla le nouveau venu : « Holà étranger ! Qui va là ? Nous vous prions de bien vouloir nous communiquer votre identité et la raison de votre visite ! — Voyons Roland ! J'ignore si tu deviens trop zélé ou si tu t'impatientes de finir ton service, mais le couvre-feu ne débute que dans... sept minutes, lança Dom avec un sourire et en abaissant sa capuche, une petite montre à gousset entre les doigts. Irais-tu jusqu'à refuser à un vieux camarade de la garde d'entrer faire son rapport à son roi ? — Malheur ! Toutes mes plus sincères excuses messire Fulmen, je ne vous avais pas reconnu ! Vous, là ! Abaissez le pont, levez les grilles, et plus vite que ça ! » Le bois du pont-levis craqua alors qu'il se mettait lentement en branle. Sous le grincement naissant de la lourde herse qui s'élevait, le jeune homme amusé s'écria : « Appelle-moi simplement Dom mon vieux ! On en a déjà parlé mille fois ! » Le sol vibra lorsque le pont acheva sa descente. Sans attendre, la monture s’engagea sur l’accès nouvellement ouvert, et passa sous l’ombre protectrice des murs. Dans l’enceinte, partout à travers la cour, tous fourmillaient et s’activaient, pressés de terminer leur besogne avant que les ténèbres ne rendent tout travail impossible. Certains curieux s’arrêtaient et levaient la tête pour observer cet homme en armure de cuir et d'acier, voilé d’une cape, qui venait d’arriver… ce curieux jeune homme qu’ils reconnaissaient aussitôt. Dom se dirigea vers les écuries et posa pied à terre. Il noua les rênes autour d’une attache. Sa cape claqua au vent alors qu’il se dirigeait vers l’aile principale du château d’un pas vif. À sa vue, les gardes poussèrent les lourds battants de chêne. Le son des bottes frappant le sol de pierre lisse résonna dans toute la salle dès que le jeune homme y posa les pieds. Tout autour de lui s’étendait l’espace gigantesque d’une seule et unique salle. Du sol surgissaient d’énormes piliers taillés finement qui s’élançaient droit vers une voûte qui semblait inaccessible. De chaque côté de la pièce luisaient de lointaines torches aux embrasures des portes menant vers les autres parties du château. Sur chaque pilier, des pierres translucides et lumineuses éclairaient l’ensemble tant bien que mal de leur formidable éclat. Au sol, juste devant les pieds de Dom, un magnifique tapis rouge, bleu et or s'étendait jusqu’à ce qui semblait être le fond de la pièce. De manière régulière, de chaque côté de la tenture, des gardes immobiles et chargés d’énormes armures se tenaient parfaitement droits et disciplinés. Comme à chaque fois, le jeune homme posa un pied hésitant sur la surface moelleuse et douce qui recouvrait le sol en face de lui. Il avait toujours du mal à accepter de fouler de ses bottes boueuses et sales une aussi belle œuvre qui avait demandé des semaines entières de travail. Il se força et avança d’un pas solennel. À l’autre bout se trouvait un trône massif en pierre, finement peint et travaillé et qui semblait incroyablement lourd, presque ancré au sol. Un vieil homme y était assis et l'attendait. Il portait des vêtements parfaitement blancs qui paraissaient tellement fins qu'un simple souffle les auraient altérés, et sur sa poitrine reposait une barbe plus blanche encore. À son côté, insérée dans une fente du sol, se trouvait une épée dont les ornements auraient fait la convoitise de plus d'un. Mais ce n'était rien en comparaison de la couronne d'or et d'argent dont les joyaux brillaient de mille feux qui reposait sur ses cheveux longs et pâles. Aux côtés de ce vieillard se trouvait un homme. Celui-ci leva les yeux vers Dom, murmura quelques mots, et disparut rapidement par une porte à proximité. « Approche ! Ne me fais pas plus languir ! lança l'homme sur le trône d'une voix très posée et ferme pour son âge. — Bonsoir et tous mes respects majesté, dit Dom en posant un genou à terre. Je suis de retour de la mission que vous m'aviez assigné. — Oh, je t'en prie, après toutes ces années tu peux me tutoyer ! — Ce serait un scandaleux manque de respect monseigneur. Jamais je ne pourrais… — Faut-il donc que je te l'ordonne ? Arrête donc tes sornettes et viens embrasser ton vieil ami fatigué ! » Dom sourit, se releva et enlaça le vieux roi avec force et émotion : « La couronne ne t'arrange pas mon vieux, j'ai l'impression de te voir plus vieux chaque jour ! lança-t-il une larme à l'œil. — C'est mon lot, voilà ce qui arrive lorsque l'on est roi longtemps avec beaucoup de soucis. — J'ai du mal à croire que je suis seulement plus jeune de cinq ans. » L'homme sourit, une pointe de tristesse dans les yeux. « Viens, marchons. » Ysgorn le Rouge, grand roi de Ryalkan, et plus vieil ami de Dom. Cet homme était un héros, et le peuple l'aimait. Il avait notamment acquis son surnom lors des victoires sanglantes qu'il avait infligé à tous les envahisseurs qui avaient tenté de prendre possession du royaume. Malgré leur peu d'années d'écart, les décennies qu'ils avaient traversées ensemble, et bien qu'ils ne soient pas censés vieillir si vite, les soucis de la royauté avaient été bien plus cruels avec Ysgorn. « Alors, comment se porte Aïda ? — À merveille, répondit Dom. Nous avons fini d'aménager la chambre, il n'y en a plus que pour quelques semaines je pense. — Tu m'en voudrais si je venais en personne la voir à sa naissance ? — Bien sûr que non. Je suis certain qu'elle sera ravie de te voir. Aïda aussi. — Oui, voilà bien longtemps je n'ai pas pris un verre en votre compagnie. :air::air: — Ne te plains pas ! Tu as les meilleurs vins de tout... » :air::air: Dom s'arrêta net, la main sur son épée. :air::air: « Que se passe-t-il ? Tu as vu quel… :air::air: — Chut ! l'interrompit Dom. On nous observe. » :air::air: Le jeune homme fit volte-face et tendit l'oreille. Au sein du couloir vide semblaient résonner des murmures lointains et indistincts, et la luminosité sembla décroître. Alerte, Dom sentait un regard posé sur lui. Il ressentait un picotement léger à la base du crâne et un sentiment désagréable comme si un homme invisible lui pressait les tempes. Il se savait observé, mais sans savoir d'où, car il aurait cru que le regard venait de partout autour de lui. Mais personne. Le couloir était vide, il n'y avait aucune porte, et l'extérieur était trop haut et les parois trop lisses pour que quiconque soit suspendu à la fenêtre. :air::air: Pourtant son instinct ne le trompait jamais. :air::air: Il se fit tout de même violence et se força à relâcher la garde de sa lame. Il n'y avait définitivement personne. Il se retourna. Ysgorn était statique, le regard vide. Dom posa une main sur son épaule : :air::air: « Ysgorn ? Tout va bien ? » :air::air: Le roi sursauta, secoua la tête, et regarda son ami d'un air surpris : :air::air: « Oh... oui, excuse-moi, j'étais... j'étais ailleurs. Tout va bien. :air::air: — Tu en es sûr ? Voilà déjà la troisième fois cette semaine que ça t'arrive. :air::air: — Oui, oui, je t'assure que tout va bien. Viens, continuons notre discussion. » :air::air: Dom emboîta le pas au souverain, sans voir qu'en plus des ombres mouvantes créés par les touches sur chacun des deux murs, une ombre supplémentaire suivait Ysgorn au sol, parfaitement fixe. :air::air: Les deux amis s'installèrent à la table de la chambre royale, où les attendaient deux verres d'alcool. Pendant quelques instants, aucun ne souffla mot. Enfin, Ysgorn repris la parole : :air::air: « Comment s'est déroulée la tâche que je t'avais confié ? :air::air: — À merveille. Ils ne s'en rendront compte que demain matin normalement. :air::air: — Bien. Personne ne t’a vu ? :air::air: — Malheureusement je suis tombé sur quelques gardes un peu trop silencieux et qui somnolaient pendant leur service. Mais rien de notable, je m’en suis tiré sans que l’alerte soit donnée, et les quelques témoins se tairont. :air::air: — Excellent. Cette situation ne pourra pas durer indéfiniment. Heureusement que tu es là, autrement nous aurions de nouveaux maîtres depuis longtemps. :air::air: — Es-tu bien certain qu’il ne vaudrait pas mieux que je reste en Ryalkan pour ta protection ? Nous commençons à nous faire des ennemis et, comme tu le dis, notre tranquillité ne durera pas. :air::air: — J’y ai longtemps pensé, avoua le monarque avec hésitation. Cependant, personne n'est meilleur que toi : d'autres échoueraient, se feraient capturer, et les conséquences diplomatiques seraient désastreuses. Tu es le seul capable d'agir en nous préservant de tout soupçon. :air::air: — Comme tu voudras. Mais ta sécurité m'inquiète. :air::air: — C'est ça ou condamner notre peuple à la servitude. Toutes ces années, toutes ces batailles... tu sais bien que sans ton aide nous serions morts depuis des décennies. Ysgorn, rouge du sang de ses ennemis, et Dom, l'Ombre Foudroyante qui agit en silence sous mes ordres. L'Ombre et le Sang. :air::air: — Je sais. Il en a toujours été ainsi. :air::air: — Pourquoi as-tu refusé le trône lorsqu'il t'a été proposé ? Il te revenait pourtant de droit ! Tu as toujours refusé de me répondre. » :air::air: Dom ne répondit pas immédiatement. Il était hésitant. Ressasser le passé lui importait peu. Mais après tout, après toutes ces années, il pouvait bien lui répondre : :air::air: « Un assassin, voilà ce que je suis. Je suis un chevalier à la solde du roi chargé d'accomplir la sale besogne sans être vu ou entendu. Je ne suis qu'une ombre, un soupir mortel qui ne se montre jamais vraiment au grand jour. Je n'ai pas l'étoffe d'un roi, seulement d'un beau parleur qui manie aussi bien les mots que sa lame. Et tu connais aussi bien que moi mon aversion pour tous ces bureaucrates menteurs et avares. Crois-moi, tu es un homme bon, intègre, qui se soucie de son peuple, et tu es charismatique : le peuple t'aime. Le trône te convient bien mieux qu'à moi. » :air::air: Ysgorn garda le silence. Il était à la fois touché et troublé par l'honnêteté et l'honneur de son ami. Sans lui laisser le temps de répondre, Dom se leva de son siège et vida son verre d’une seule traite. :air::air: « Je vais t’abandonner là vieux frère. Je suis absent depuis trois jours, et Aïda doit m’attendre avec impatience, et je me fais du souci pour elle. :air::air: — Va, et fonce la rejoindre. Merci encore pour tout. Que la sagesse guide ta lame… :air::air: — … et que l’ombre accompagne tes pas, termina le jeune assassin. » :air::air: Les deux hommes s’enlacèrent avec affection. Dom était réellement l’ami et le favori du roi : n’importe qui d’autre se serait écroulé une dague entre les côtes. Sans plus de mots, Dom sortit de la chambre. Une désagréable impression le tenaillait néanmoins. :air::air: Il repassa bientôt dans la salle principale, où seul siégeait à présent l'imposant siège de pierre. À l'écart, entre deux piliers, se tenait l'homme qui parlait au roi un peu plus tôt. Bien qu'il resta parfaitement impassible, le jeune guerrier était troublé : ce personnage arborait un sincère sourire, mais il lui semblait déceler dans ces yeux une mince et incertaine étincelle de violence, un désir enfoui de tuer sauvagement. Pourtant, Dom n'avait en général aucun mal à cerner autrui, mais celui-ci semblait se cacher derrière un masque d'émotions. Sans sourciller, il poursuivit à longues et lentes enjambées sa route vers la porte, et il soutint son regard avec insistance. :air::air: Finalement, l'homme se renfrogna, perdit son sourire, et détourna les yeux. Dom passa devant lui et sourit de contentement. Lorsqu’il s'arrêta devant le battant, il hésita, et décida tout de même de demander son identité à ce curieux personnage. Il sentit qu'un regard courroucé et empli de haine se posa sur lui. :air::air: Lorsqu’il fit volte-face, l'homme avait disparu. :air::air: Lorsque la brise lui caressa la joue en passant les portes de la salle du trône, il faisait presque nuit. Tant pis, il demanderait demain à Ysgorn de qui il s'agissait. Sans s'attarder davantage, il alla vers son cheval à grands pas. Aussitôt en selle, il avança vers la herse et héla les gardes au-dessus de lui. :air::air: Le sol trembla sous le poids du pont. :air::air: Dom lança sa monture au galop. :air::air: ~~~~~ :air::air: La petite maison apparue au loin, en bordure du village. Dom s'en approchait rapidement. Elle était belle et en très bon état, et malgré sa taille modeste, elle était de riche facture. De la lumière douce et accueillante filtrait par les fenêtres, et de la fumée aux senteurs alléchantes s'échappait de la cheminée. :air::air: En vitesse, il entra dans la petite cour en terre battue, sauta au sol, et noua les rennes à une attache. Il s'approcha de la porte et en tourna la poignée. En silence, le battant coulissa sur ses gonds et laissa s'échapper la lumière éblouissante qui baignait l'intérieur. :air::air: « Dom ! » :air::air: Une voix douce et féminine s'échappa à peine il posa un pied sur le parquet. Sans hésiter une seconde, Dom laissa tomber son baluchon au sol et écarta les bras. Sans attendre, Aïda sauta à son cou. :air::air: Un instant magique s'installa durant une éternité. :air::air: Dom s'écarta légèrement et saisit les doigts fins et frais de sa belle. Un sourire lui illuminant le visage. Il déposa ses yeux sur les siens. :air::air: Aïda était une belle jeune femme, mince et élancée. Ses yeux légèrement en amande, d'un bleu profond, s'opposaient en un contraste resplendissant avec l'éclat improbable de sa chevelure châtain. Elle portait sur celle-ci seulement deux tresses partant de ses tempes et nouées à l'arrière de sa tête, tandis que de longues mèches lui tombaient de chaque côté du visage. Mis à part sa frange et ses tresses, ses cheveux cascadaient en une douce et délicate ondulation jusqu'au bas de son dos. :air::air: Le visage fin mais à la détermination sans faille, elle imposait tant le respect que l'admiration par ses traits nobles et délicats. Le nez droit et fin, les pommettes rosées, les lèvres souriantes, les yeux pétillants de malice et de sagesse, la chevelure aux senteurs de noisette... à sa simple vue, un baume réconfortant se déposa sur le cœur de Dom. Après toutes ces années, il remerciait encore la providence. Ils s'étaient rencontrés au détour d'un chemin de leur lointain pays. Le premier regard fut le bon pour eux deux, et Dom se proposa pour l'escorter à destination afin de la protéger des bandits des chemins, prétextant se rendre dans la même direction. En réalité, il avait fait un détour de quatre jours de marche pour elle. Depuis lors, ils étaient inséparables, et Dom lui avait plus tard demandé sa main. :air::air: Dans un instant de tendresse, Dom la serra sans ses bras d'un air protecteur. Elle déposa sa tête sur le torse de son mari. :air::air: « Tu m'as manqué, murmura-t-elle. :air::air: — Toi aussi. Énormément. Comment allez-vous tous les deux ? s'enquit-il en lançant un regard sur le ventre arrondi de sa compagne. :air::air: — À merveille ! Je ne pourrais pas me porter mieux. Je me demande juste parfois quoi faire de mon temps, mais les habitants du village passent souvent me rendre visite. :air::air: — Rassure-toi, je devrais être nettement plus présent dans les semaines à venir. Ysgorn commence à être un peu plus en sûreté suite aux missions que j'ai faites pour lui, les contrées voisines vont y réfléchir à deux fois avant de penser nous attaquer. :air::air: — Évidemment. Ce bon vieux Ysgorn... comment va-t-il ? :air::air: — Plutôt bien à première vue, bien que je le soupçonne d'aller plus mal qu'il ne voudra jamais l'avouer. :air::air: — Que veux-tu dire ? Est-il malade ? :air::air: — Pas le moins du monde ! Il respire la santé ! Simplement... quelque chose m'inquiète et m'intrigue, j'ai comme un mauvais pressentiment. Comme si un malheur allait arriver. :air::air: — Serait-ce à cause de… :air::air: — Oui. Cela fait longtemps que ça me préoccupe, mais d'autant plus ces temps-ci. On sait toi et moi que sa morphologie ne devrait pas lui offrir un vieillissement semblable à celui d'un humain. Qu'est-ce qui le différencie de nous, je l'ignore... » :air::air: Dom regardait par la fenêtre couverte de buée, comme espérant apercevoir au loin le roi dans la chambre de son château. Aïda déposa ses doigts sur sa joue et détourna son regard de la vitre pour lui offrir un sourire réconfortant. Le jeune homme s’illumina à son tour et oublia un instants ses soucis. Il déposa un baiser protecteur sur le front de sa femme. :air::air: « Tu as raison, je m'en fais trop. Je vais aller rapidement desceller Skintila, ça me changera les idées. As-tu besoin que je te rapporte quelque chose de la réserve ? :air::air: — Non, tout va bien. Je vais t'accompagner dans un instant. :air::air: — Avec plaisir ! » :air::air: Il se pencha et lui murmura quelques mots à l'oreille. Elle sourit alors qu'il passait la porte à nouveau. :air::air: Peu à peu, la nuit s'installa sur les terres de Ryalkan. Les oiseaux s'étaient tus, et la lune brillante – presque pleine – s'envolait vers son voyage le long de la voute céleste. Et, en même temps que l'astre s'élevait, la nuit et les ténèbres brumeuses descendirent sur terre. Les chandelles furent éteintes, et bientôt les âtres ne continrent bientôt plus que des cendres et des braises rougeoyantes et fumantes. Le monde était endormi. :air::air: Les quelques jours qui suivirent furent plus calmes. Dom travaillait paisiblement chez lui et faisait quelques travaux. Bientôt, dans quelques semaines, leur enfant naîtrait, et il voulait que celui-ci et Aïda disposent de tout ce dont ils aient besoin. Régulièrement, il rendait visite au roi, afin de calmer ses inquiétudes. En réalité, son état ne cessait de lui donner davantage de soucis, bien qu'il ne puisse rien y faire. Ysgorn semblait de plus en plus absent et avait des absences de plus en plus répétées sans que le jeune homme n'arrive à l'expliquer. :air::air: Plusieurs jours passèrent ainsi. :air::air: ~~~~~ :air::air: Dom était parfaitement réveillé. Sans un seul bruit, il glissa hors des draps, s'équipa entièrement, et sortit de la chambre sans réveiller Aïda. Il se dirigea vers la porte afin d'aller accueillir l'émissaire du roi avant que celui-ci n'arrive et ne frappe. Sa femme avait besoin de repos, hors de question qu'il laisse un messager la réveiller en pleine nuit, quelque soit l'urgence. :air::air: La fraicheur de l'air s'abattit sur son visage telle la morsure d'une bête féroce. Bien que ce ne soit que le début de l'automne, les nuits étaient froides. Sans comprendre pourquoi, il se sentit plus léger au niveau du flanc gauche. :air::air: « Messire Fulmen ! :air::air: — Je sais. A-t-il dit quelque chose ? lança le jeune assassin en se dirigeant vers le box de sa jument. :air::air: — Non, il a juste souhaité vous parler en urgence. Il n'a rien dit de plus. :air::air: — Juste une seconde. » :air::air: En vitesse, il prépara sa monture et mit le pied à l'étrier. Le messager ouvrit la marche et partit au galop, suivit de près par la jument de Dom. Celui-ci se demandait quelle raison pouvait forcer son ami à le tirer du sommeil en pleine nuit. Cependant, l'air encore endormi du cavalier qu'il avait dépêché, les vêtements ajustés en grande hâte de ce dernier, et le fait qu'il monte l'un des étalons les plus rapides du royaume lui faisaient deviner l'urgence et la panique dans laquelle il avait été appelé pour quérir Dom. :air::air: Ils atteignirent le fort en quelques minutes et passèrent au galop le pont-levis demeuré abaissé. Sans prendre le temps d'attacher Skintila, il sauta au sol et entra en courant dans le bâtiment. :air::air::air::air: La salle du trône était vide. Il chercha rapidement du regard son vieil ami. :air::air: Personne. :air::air: Quelque chose n'allait pas. Il n'y avait aucun garde dans la salle, alors que les rondes ne cessaient jamais. Un horrible pressentiment s'empara de Dom. Il s'élança aussitôt vers la chambre royale. En chemin, dans le couloir, il entendit un hennissement provenant de la cour, suivit peu après par le galop d’un cheval. Il décida délibérément d’ignorer ce qu’il avait reconnu comme étant l’appel de sa jument. :air::air: La porte de la chambre d’Ysgorn se trouvait devant lui, entrouverte. Il posa la main sur la garde de son épée et poussa lentement le battant. Dans la pièce, les rideaux volaient sous la houle de l’air s’infiltrant par les fenêtres ouvertes. L'air était glacial. La seule lumière était celle de la pleine lune, qui éclairait la pièce d’une pâle et morbide lueur bleutée. Ysgorn était allongé sur son lit, au centre de la pièce. Dom s’approcha lentement, tremblant. Il s’effondra à genoux. :air::air: Une dague. Une simple dague. :air::air: Sa dague. :air::air: Voilà pourquoi il sentait un poids moindre à sa ceinture. Sa dague avait été dérobée, et reposait figée dans la poitrine immobile de celui qui avait été comme un frère pour lui. Les draps blancs se teintaient peu à peu d’un sang écarlate. Ysgorn le Rouge. Il l’avait été jusqu’au dernier instant. Une larme frappa le sol. :air::air: Figée ? Non. Elle se retirait petit à petit, cette maudite dague. Une forme se matérialisait peu à peu autour de son manche et la retirait. Une créature de cauchemar, plus sombre que les ténèbres eux-mêmes, se tenait au-dessus du corps du roi défunt. Une créature informe, grande et horriblement maigre, dotée d'ailes charnues, d’un nez porcin, et d’yeux d’un blanc à la profondeur terrifiante. Ce qui ressemblait à un rictus de satisfaction se dessina sur son visage, et le monstre se pencha vers Dom. Celui-ci était paralysé. :air::air: Comme elle était apparue, la créature s’évanouit dans l’air en un instant, laissant le dard mortel frapper le sol dans un tintement glacial. :air::air: « C’était un homme bien. Dommage que nous ayons dû en arriver là pour le vaincre. Mais c’est en partie votre faute, sieur Fulmen, si nous en sommes venus à cette extrémité. » :air::air: Le jeune guerrier se releva lentement et se retourna, fou de rage. Il savait parfaitement qui se trouvait à l’entrée de la pièce. :air::air: « J’aurais dû vous tuer dès notre première rencontre, messire Kahlog. Si seulement je vous avais reconnu… :air::air: — Oui, nous nous sommes donné beaucoup de mal. Me faire infiltrer le château, devenir le conseiller du roi… Au fond, je peux remercier mes nécromanciens. :air::air: — Vous demander pourquoi le Prince Renégat Kahlog lui-même est venu en personne sur nos terres serait trop évident je suppose ? :air::air: — Bien sûr ! Je suis simplement ici pour m’assurer que ce trône soit à moi. Et il fallait quelqu’un sur place pour l’invocation. :air::air: — L’invocation ? :air::air: — Mon bon ami que vous avez rencontré il y a quelques instants sera votre nouveau gardien. C’est un démon – le Chickenderpig – que nos mages ont difficilement appelé des mondes inférieurs afin de tuer Ysgorn, de vous persécuter et de jouer avec vous quelques temps, messire. Après tout, nous ne souhaiterions ni vous ni moi que vous interfériez dans nos plans, n’est-ce pas ? :air::air: — Vous dites « nous » depuis le début. Que cela signifie-t-il ? :air::air: — À quoi cela vous servirait-il de le savoir surtout ? :air::air: — À savoir pourquoi vous allez mourir et qui je devrais tuer par la suite, lança Dom un sourire terrifiant en travers du visage. » :air::air: L’homme éclata de rire. :air::air: « Vous allez devoir être patient alors ! Très bien, je vais vous expliquer les grandes lignes : tout est de votre faute. :air::air: — Pardon ? :air::air: — Vous avez fait essuyer à tous les empires voisins souhaitant s’emparer du trône de Ryalkan de cuisants échecs. Vous avez décimé leurs armées, assassiné leurs généraux, empoisonné leurs rois, fait brûler leurs forteresse. Mais malgré tout cela, Vous étiez un véritable fantôme. Pas une trace, pas une preuve. Nous savions que c’était vous, sans pour autant pouvoir vous en accuser. Et les ennemis de tes ennemis sont tes amis. Or personne d’autre que vous n’a jamais eu autant d’ennemis que maintenant : tous se sont alliés dans le seul but de mettre fin à vos victoires incessantes dont seul découlait une traînée de sang. Et j’ai accepté de tous les aider. Je leur ai promis le royaume, en échange de la couronne. À présent, je vais régner sur ces terres, sous les ordres directs de tout votre voisinage. D’ailleurs, acheva-t-il en riant, je crois que mes gardes ont une nouvelle chambre à vous montrer ! » :air::air: Il se retourna vers le couloir : :air::air: « À l’aide ! Au meurtre ! Cet homme a tué le roi ! Appelez la garde ! » :air::air: Le sang de Dom ne fit qu’un tour. Toutes les apparences le rendaient coupables de ce meurtre sans qu’il ait la moindre chance de convaincre la garde de son innocence. Sa seule pensée était à présent vers Aïda. Il ne lui importait que sa sécurité. Alors que les gardes du palais entraient en se bousculant dans la pièce, Dom fit volte-face et s’élança. D’un rapide coup d’œil, il vit Roland, son ami capitaine, le regarder avec de grands yeux. Ce dernier venait de voir les larmes sur le visage de Dom. Il connaissait bien son ami. Il comprit qu’il était innocent. Pas une seconde il n’hésita : il devait lui donner du temps pour sa fuite. :air::air: Le jeune assassin sauta sur le toit en contrebas, puis sur la muraille. Il se faufila entre les soldats désorientés qui effectuaient leur ronde sans avoir reçu l’alerte. Pas encore. Un homme hurla un ordre. Aussitôt, Dom détacha l’arc de ses épaules et décocha une flèche sur la corde qui retenait les poids la herse. Les lourds sacs de sable frappèrent le sol avec un son sourd. À l’approche de l’entrée, plusieurs hommes faisaient bloc afin de lui barrer la route, et tous les autres s’étaient lancé à sa poursuite. Alors que des flèches sifflaient à ses oreilles, dards mortels qui frappaient en tintant sur le mur, Dom prit appui sur l’un des créneaux et s’élança dans le vide sous le regard ahuri des soldats royaux. :air::air: Son bond lui permit de justesse d’atteindre l’autre bord des douves. En revanche, il dut amortir sa chute à l'aide d'une roulade afin de ne pas se briser les jambes. Même ainsi, il s'en fallut de justesse pour qu'il n'ait pas de blessure. Il comprit vite quel était le hennissement d'un peu plus tôt : sa jument l'attendait à l'extérieur. Peu importe pourquoi elle se trouvait là, il comptait bien en tirer avantage. :air::air: Alors que les gardes paniquaient à l'intérieur, bloqués par la herse au préalable privée de ses contrepoids, il partit aussi vite qu'il le put à travers la forêt. :air::air: ~~~~~ :air::air: Aïda se retourna sous les couvertures. Elle dormait toujours paisiblement et n'avait même pas remarqué l'absence de son époux. Celui-ci se tenait là, parfaitement immobile et silencieux au pied du lit, tiraillé par l'horrible décision qu'il s'apprêtait à prendre. Il n'avait clairement aucun moyen de prouver son innocence. On avait tout parfaitement orchestré pour qu'il soit là, que le véritable meurtrier soit un démon aussi impossible à capturer que le vent, et que l'arme du crime soit une des siennes. Le pire, c'est que les gardes viendraient le chercher ici : Aïda et leur enfant seraient en danger. :air::air: Il n'avait pas le choix. Il devait fuir, attirer la garde loin de sa femme, et se retirer seul dans un endroit sûr en attendant de trouver une solution. Tout cela, il l'expliquait à la jeune femme endormie dans une lettre. Le piège dans lequel il avait été pris, les raisons de sa fuite. Tout. Il lui expliquait également qu'il allait lui jeter un sortilège bien qu'il n'ait que de maigres bases en magie. :air::air: Il se concentra, psalmodiant dans sa langue natale incertaine et inaudible. Les mots coulaient entre ses lèvres, emplissaient peu à peu l'air de leur douce et mortelle énergie et rendant par là même l'atmosphère comme électrique. La formule complète, il libéra l'énergie sur sa bien-aimée. Celle-ci se contenta de rajuster la couverture sur ses épaules. Cette incantation, comme il lui expliquait, leur permettrait à chacun de se retrouver. De, peu importe où, savoir dans quelle direction se trouvait l'autre et comment il se portait. :air::air: Dom avait terminé. Il devait partir sans tarder : les ennuis ne tarderaient pas à parvenir au village. Le cœur brisé, les larmes aux yeux, il déposa amoureusement un baiser sur la douce chevelure d'Aïda. Elle ouvrit les yeux, réveillée sans savoir par quoi. La pièce était vide. À la place de son mari l'attendait une enveloppe. Une enveloppe à son nom. :air::air: À l'extérieur, par-delà les champs et les forêts en bordure du village, des cris, des aboiements, un cheval au galop faisaient écho au silence de mort de la vie en sommeil alentours. :air::air: Les doigts tremblants et l'anxiété lui nouant la gorge, elle déchira lentement le papier pour en extraire son contenu. :air::air: Une fois de plus, des larmes coulèrent en silence cette nuit-là. :air::air: ~~~~~ :air::air: Une flèche fendit l’air. Puis une autre. :air::air: Une pluie de traits mortels volait vers Dom, qui tentait tant bien que mal de se servir des arbres pour s'en protéger. Il poussait Skintila au bout de ses forces, presque à l'aveugle. La lune était cachée par la cime fournie des arbres, et le peu de lumière qu'il en résultait permettait à peine de distinguer les silhouettes tortueuses de la végétation. Néanmoins, sa monture se frayait avec brio un chemin parmi les troncs et les racines. Les chevaux de la garde impériale étaient étonnamment rapides par rapport au sien. Il ne parvenait pas à les distancer, quoi qu'il fasse. Était-ce un sort qui les rendait aussi véloces ? :air::air: Un projectile frappa un tronc devant lui et le tira de sa rêverie. Derrière lui, les hommes vociféraient des insultes et des sommations. Un éclair éclaira soudainement les bois sombres. Il embrassa le sol sur plusieurs pieds. Il y avait vraisemblablement des mages parmi eux, et ils avaient apparemment laissé de côté l'idée de le capturer vivant. D'autres charges magiques fusèrent et accompagnèrent les attaques des archers. Le bombardement devenait serré. Trop serré. À ce train-là, ils finiraient par... :air::air: Sans avoir le temps d'achever sa pensée, Dom bascula. Il roula sur le sol sur plusieurs mètres avant que son dos n’heurte le tronc d'un jeune chêne. Il fallait s'y attendre : gisant sur le sol, haletante, Skintila avait une flèche fichée en travers de la patte antérieure gauche. Le jeune assassin jura contre son dos. Ne pas avoir d'os fracturé serait un miracle. Il n'eut cependant pas l'occasion de s'en inquiéter davantage. Les premiers soldats étaient là. Il sauta rapidement sur ses pieds. Bien qu’il eut espéré le contraire, plusieurs de ses anciens camarades de la garde se tenaient en face de lui. :air::air: « Écoutez messieurs, vous me connaissez non ? Croyez-vous vraiment que j’ai pu tuer le roi, mon ami ? Celui que je considérais comme un frère ? On m’a tendu un piège ! :air::air: — Toutes les preuves t’accablent Dom, lança l’un d’entre eux. Viens avec nous sans faire d’histoire. :air::air: — Par pitié, laissez-moi partir. J’arriverais à prouver mon innocence, mais pas si je finis pendu au bout d’une corde ou enterré au fond d’un donjon. Je n’ai aucune envie de devoir verser le sang de personnes chères à mon cœur. J’ai déjà trop perdu cette nuit. :air::air: — Tu ne nous laisse pas le choix. » :air::air: Tous bondirent sur le jeune homme. Celui-ci soupira en dégainant sa lame. Paisiblement, rapide comme la foudre et aussi silencieux qu’une ombre, il s’élança vers eux. Il esquiva d’un simple pas de côté la première lame. D’un coup de pommeau dans le poignet, il lui fit lâcher prise, puis il tira la dague de son adversaire de son fourreau et la jeta au loin. Il se faufila entre les lentes lames en mouvement, qui pour lui semblaient presque immobiles. D’un coup à la nuque, il maîtrisa un deuxième homme, puis un autre en lui brisant les côtes. Il passa entre deux flèches de l'archer du groupe et trancha son arc. Le mage lança un éclair. Dom contourna la décharge, passa dans le dos du sorcier, et plaça sa lame sous sa gorge. :air::air: L'épée et le poignard touchèrent le sol. La corde de l'arc tranché claqua au vent entre les mains de son propriétaire. L'éclair du mage s'abattit sur le feuillage d'un arbre. :air::air: Deux des gardes gisaient sur le sol, inconscients, alors que les autres restaient immobiles, les yeux écarquillés. C'était là la puissance d'un descendant de ce peuple maudit. Il ne lui avait fallu que quelques fractions de secondes pour passer entre eux comme un diable et tous les maîtriser. Il aurait pu les tuer avant qu'ils ne réalisent quoi que ce soit. :air::air: « Navré, mais je dois partir. Je paierais ma dette envers vous en temps voulu. » :air::air: Il relâcha lentement son emprise sur son otage et partit en courant à travers les bois. Plus loin, d'autres voix s'élevèrent par-dessus la cime des arbres. :air::air: Il culpabilisait déjà de laisser sa monture blessée, mais il avait bon espoir qu'elle rentrerait d'elle-même à la ferme. Il courait aussi vite que ses muscles brûlants le lui permettaient. Loin derrière, les tambours causés par les sabots martelant le sol montaient, sans cesse plus proches. Quelques minutes de course haletante passèrent, durant lesquelles les battements se rapprochaient de lui. Il entendit bientôt le souffle râpeux du cheval qui le suivait. :air::air: En un éclair, il s'élança en arrière, prêt à stopper l'avancée de ses poursuivants. Il dégaina sa lame et bondit en avant. D'un mouvement du poignet, il entailla la patte de l'animal, qui trébucha et roula sur le sol avec son passager sur plusieurs mètres. Dans la suite de son mouvement, Dom tendit son arc et décocha plusieurs flèches sur les animaux. Au loin, les feux allumés par les attaques magiques qui s'étaient déroulées plus tôt se propageaient et s'étendaient peu à peu d'arbre en arbre. :air::air: Tous les soldats les plus proches étaient au sol, sonnés par leur chute. Plus loin, les autres continuaient de vociférer et de proférer un flot constant d'insultes et de sommations. :air::air: Dom reprit sa course. Il se faufila entre les arbres et les buissons, sentant qu'il approchait de son but. :air::air: Il émergea du dense amas de végétaux. :air::air: En face de lui plongeait un gouffre creusé durant des siècles par le profond cours d'eau qui s'y écoulait plus bas. Il jura : sa course dans les bois et la poursuite l'avaient détournés de sa trajectoire : il était plusieurs miles trop au sud que ce qu'il aurait dû. :air::air: Il se retourna. :air::air: Face à lui se tenait le Chickenderpig. :air::air: Avant de n’avoir pu faire un seul mouvement, Dom se sentit basculer en arrière, sans pouvoir lutter ou réagir. Les larmes coulèrent sur sa joue. :air::air: Son dos heurta violemment la surface dure et mouvementée des eaux noires en contrebas, et son crâne frappa un rocher au fond de l’eau. :air::air: Un jeune homme meurtrit se relevait difficilement sur une berge, trempé et glacé. Il regarda autour de lui. :air::air: Dom Fulmen. :air::air: Il s’appelait Dom Fulmen. Rien de plus. :air::air: Il n’était plus personne. [/justify] Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 24 février 2014 Auteur Partager Posté(e) le 24 février 2014 Yop à vous chers lecteurs ! Me voici avec le dernier texte que j'avais en réserve avant que je dois me remettre au boulot pour terminer le chapitre 6 que j'ai commencé ! Cette fois-ci, il s'agit de la deuxième partie du RP de ma candidature Chevalier, qui cette fois est plus axé sur mon désir d'accès à la chevalerie et sur plus d'action que la première partie. Par ailleurs, cette fin de chapitre est en relation directe avec celle de la candidature Chevalier de Zovsky, que je vous recommande chaudement ! Nos deux chapitres se complètent, de même que j'apparais dans un grand nombre de ses RP, que je vous invite très vivement à lire également ! Le lien est dans mon premier post. Je vous souhaite donc une bonne lecture, en espérant que ça vous plaise ! N'hésitez pas à laisser un petit commentaire. Chapitre 5 — Seconde partie : De Souvenirs et d'Adoubement Dom rouvrit les yeux, les yeux rougis et humides. Une larme tomba en une perle cristalline sur sa main. Non. Pas sur sa main. Pour la première fois, il vit l’alliance dorée qu’il portait à l’annulaire gauche, comme s’il avait toujours refusé de la voir depuis lors. « Aïda... murmura-t-il, la voix tremblante. — Tu te souviens de tout ? s’enquit une voix caverneuse près de lui. — Oui… Tout est clair à présent. » Près de lui, dans la salle de la Gemme, loin sous les racines du Kubnigera, Umbra se tenait là, patient. Il avait pris une forme globalement humanoïde, mis à part que son corps demeurait plus noir que la nuit, et que seuls ses yeux brillants y laissaient une variation. Il avait gardé cette habitude depuis qu’il s’était installé à la Colonie sous la demande de Dom afin de moins effrayer les habitants. Umbra lui-même avait souhaité s’installer près de la pierre afin de pouvoir la surveiller et ralentir l’emprise de la Corruption sur elle. Depuis l’affrontement contre Umbra, Dom avait été bien trop occupé pour lui reparler vraiment. Il avait été choisi en tant que dirigeant du Kubnigera tant qu’un nouveau conseil ne serait pas éligible, et était venue l’alliance de la SAK, les travaux à la colonie, et toutes les besognes administratives qui lui prenaient un temps fou. Puis un jour, il avait rejoint le fils du Chickenderpig dans son antre, prêt à discuter tout le soir et toute la nuit s’il le fallait. Beaucoup de choses s’étaient éclaircies suite aux explications de la sombre créature. Le véritable nom du Chickenderpig était en réalité Nigrum. Lui et Umbra venaient d’un monde lointain, d’un plan autre que celui d’où venait Dom, ou que celui de Minefield. Umbra était là-bas considéré comme une arme dangereuse, et il restait prisonnier, jugé imprévisible et hors de contrôle par leur peuple. Néanmoins, les ennemis de Dom, de sombres nécromanciens, l’invoquèrent et lièrent un pacte avec lui : contre sa liberté, il tuerait le roi et traquerait Dom, le persécuterait durant des cycles entiers de saisons, avant de le tuer à son tour. Puis il serait libre de sévir à son gré. De plus, comme la Corruption était originaire de son plan, Nigrum était à présent connu dans beaucoup d’autres plans comme l’incarnation de la Corruption, car il était le seul – avant l’arrivée d’Umbra – de ce monde à avoir voyagé entre les plans depuis des temps immémoriaux. Au-delà de l’origine de ces deux créatures, Dom comprenait à présent beaucoup des évènements qui avaient pu se produire depuis son réveil sur cette berge où il s’était retrouvé amnésique. Les lapins noirs, la tempête, le sanglier, ses connaissances sur les entrées et les manipulations des racines menant à la salle de la Gemme, son aventure avec la Gemme elle-même… Tout venait de Nigrum, qui l’avait persécuté tout ce temps. Par ailleurs, il avait aussi appris que la Gemme lui avait sauvé la vie. Elle avait effectivement une conscience propre, et elle était en quelque sorte le cœur de l’arbre. Elle possédait une immense puissance magique, mais le Chickenderpig l’avait repoussé et possédée dans le but de tendre un piège à Dom. Ce monstre avait pour but de prendre possession du corps du jeune homme, ce qui expliquait qu’il ait machinalement effectué les manipulations lui permettant d’atteindre la pierre géante : il commençait déjà à s’infiltrer dans son esprit. Or, la Gemme a réussi à s’extraire quelques instants de son emprise, et à changer suffisamment la constitution du corps de Dom pour que l’emprise de Nigrum soit annulée. Il s’était ainsi retrouvé avec des traits et des compétences de fourmi suite à l’action de la conscience de l’arbre. À présent, Dom y voyait bien plus clair. Ses souvenirs recouvrés, il avait enfin un but : retrouver ceux qui lui étaient chers, et secourir son peuple. Cela lui imposait en revanche d’autres contraintes : il n’avait aucune idée de comment accéder à son monde d’origine, et il n’avait surtout aucune force de frappe suffisante pour reprendre le trône d’Ysgorn. Et surtout, le Chickenderpig était toujours là, quelque part en train de sévir. Il fallait y remédier. Plusieurs heures durant, le jeune homme plein de détermination s’entretint avec Umbra, se renseignant sur nombre de sujets touchant à son passé ou celui qui était à présent son ennemi juré. Lorsqu’enfin il émergea de la dense forêt de la Colonie, la nuit était tombée depuis longtemps. Avec un profond soupir, il s’effondra sur son lit, à l’intérieur de son habitation encore en chantier. Trop d’émotions en si peu de temps avaient eu raison de ses nerfs et de sa résistance. Il était épuisé, mais n’avait aucune envie de dormir, de peur d’être hanté par d’horribles mauvais rêves. On frappa à la porte. Surpris, le jeune homme se demanda qui pouvait bien lui rendre visite au beau milieu de la nuit. Il se leva sans attendre, se rendit à l’entrée de sa demeure, et tourna la poignée. « Marie ? s’exclama-t-il à la vue de la jeune fille qui se tenait devant lui. Mais que fais-tu ici ? Et à cette heure en plus ! — Je t’ai vu venir de la forêt tout à l’heure, et tu avais l’air plus déprimé que moi lorsque je suis à court de chips. D’ailleurs, à propos de chips… J’en ai justement ici avec moi ! Je peux entrer ? » Dom lui sourit et lui fit signe d’entrer. Marie était en visite au Kubnigera, d’une part pour une simple visite de courtoisie envers ses amis, et d’autre part en tant qu’émissaire de la communauté pirate qu’elle représentait. Dom appréciait sa compagnie : tout était simple avec elle, et sa bonne humeur le réconfortait toujours. Tous deux s’assirent à une table disposée aléatoirement dans la pièce : tout n’était même pas encore construit et aménagé chez le jeune homme, et il était donc installé assez précairement. Sans plus de discours, la jeune tête blonde et frisée – comme lui – lui tendit le plat rempli de ces délicieuses gâteries salées. Il en attrapa une et la dégusta. C’était la spécialité de la jeune demoiselle, et elles étaient toujours excellentes. « Allez, dis-moi tout ce qui ne va pas mon Dominou. On dirait que tu vas à la potence ! — Oh, ce n’est rien tu sais. J’ai eu une longue discussion il y a peu, et après avoir recouvré mes souvenirs, je dois dire que ce que j’y ai retrouvé me désespère, lui avoua-t-il avec un maigre sourire qui paraissait tout sauf sincère. — Raconte-moi, insista-t-elle. » Sans se faire prier davantage, Dom lui avoua tout ce qu’il avait sur le cœur. Il avait besoin de parler. Il avait beau prendre un air autoritaire et sérieux en toute circonstance du fait de ses différents statuts, il n’en restait pas moins quelqu’un de sensible. C’est les larmes aux yeux qu’il finit son récit. Mais il se sentait mieux. Sans qu’il s’y attende, Marie se leva et le prit dans ses bras, lui offrant un formidable câlin de réconfort. Pas de doute, c’était une véritable amie. « Mais au fait, lança-t-elle d'un air surpris en le relâchant, ça veut dire que tu es vieux en réalité ? — Il semblerait. Enfin... pour mon peuple je suis jeune, mais en comparaison de toi par exemple, oui, en effet. — Ça alors ! » Tous deux rirent à pleines dents. C'était le pouvoir de la jeune fille : l'art de faire rire en toute circonstance. « Que comptes-tu faire à présent ? — Je l'ignore. Il est évident que je vais tout faire pour retrouver Aïda et pour sauver mon peuple, mais je n'ai aucune idée. Je ne sais pas comment m'y prendre. — Ne pourrais-tu pas quérir l'aide de l'Empire ? — À quoi bon ? J'ai beau être citoyen de Stendel, ou même scribe de l'empire, je n'ai pas assez d'influence pour qu'une telle demande aboutisse. À moins que... non, non, il n'y a pas de moyen. Pas encore. » Malgré tout, sans qu'il s'en rende compte, une idée avait germé dans l'esprit du jeune homme. Bientôt, le plat de chips fut vide, et les deux amis commencèrent à tomber de sommeil. La lune amorçait alors le dernier quart de sa course céleste. Dom raccompagna sa camarade à sa chambre en la remerciant mille fois de lui avoir rendu visite. Lorsqu’il la quitta, le silence lui sembla dur à affronter. Sans plus de cérémonies, il se contenta de rentrer chez lui et de s'allonger. Pour lui, la nuit fut longue et mouvementée. Au petit matin, le jeune homme avait déjà les paupières grandes ouvertes malgré le peu d’heures de sommeil qu’il avait derrière lui. Sans attendre, il sauta sur ses pieds. Ses obligations n’attendaient pas. Il se rendit tout d’abord dans un bureau où se trouvait Dicsi. Son ami et lui avaient pris pour habitude de se retrouver de temps à autre pour discuter. Les sujets étaient variés. Là, ils devaient aborder le projet que compter mener Dicsi sur Nabes. C’était toujours des instants qu’il appréciait : avec lui, il pouvait parler de tout en toute légèreté. Le jeune dé avait toujours une blague douteuse à sortir, qui détendait automatiquement l’atmosphère. Durant les quelques heures qu’ils passèrent ensemble, ils plaisantèrent plus qu’ils ne travaillèrent, quand Dom ne lui parlait pas de son aventure de la veille. Dicsi était l'un de ses amis, et il voulait lui en parler. Pour la seconde fois, il parla donc longuement de ses découvertes et de son passé. Alors que l’heure du repas approchait, le jeune homme sentit l'air vrombir : un Splash arrivait. Il abandonna Dicsi en vitesse. Il devait accueillir les deux nouveaux venus, et il avait prévu d'avoir une longue discussion avec eux. Lorsqu’il arriva au pied de l'arbre qui accueillait l'arrivée des transports aériens, il entendait déjà les voix se rapprocher à l'intérieur. « Salem, Arthur, les salua-t-il avec un respectueux hochement de tête doublé d'un grand sourire. — Dom ! lui répondit la jeune femme, sa chevelure rousse volant au vent. Quel plaisir de te voir ! Que fais-tu ici à nous attendre ? — N'ai-je donc pas le droit d'accueillir mes amis lors de leur retour ? — Tu as donc réussi à éliminer la pile immonde de papiers qui encombrait ton pauvre bureau ? lança Arthur. Il ploie tellement sous leur poids que je redoute que le tout ne traverse le plancher ! — Malheureusement non ! répliqua Dom en riant. En revanche, j'aurais souhaité partager un repas avec vous. Venez ! Et pendant le trajet, dites-moi donc quelles sont les nouvelles de la fourmilière. :air::air: — Elles sont plutôt bonnes ! Nous nous reformons peu à peu, même si c'est plus lent que je l'aurais espéré. Les ouvrières réaménagent les galeries peu à peu, et nous sommes en train de repenser la salle des phéromones. :air::air: — Tant mieux. Je vais faire un voyage jusqu'à la fourmilière afin de la voir de mes propres yeux et de participer aux travaux. Tu t'acclimates bien de ta nouvelle fonction de reine ? :air::air: — Assez bien oui ! Même si c'est toujours perturbant de se faire appeler « reine ». :air::air: — Comme moi qui suis sexuée femelle je te signale ! :air::air: — À part ça, intervint Salem, tout le monde s'en remet peu à peu. Les analyses que p avons pu faire sur place confirment l'implication de la Corruption, bien que l'on en sache pas plus sur le sujet pour le moment. :air::air: — Heureusement pour vous, je pense que je pourrais vous éclairer sur de nombreuses zones d'ombre durant notre repas. :air::air: — Que veux-tu dire ? s'interrogea la jeune femme. :air::air: — Disons que j'ai eu l'occasion de découvrir quelques petites choses, dit-il en ouvrant la porte de la salle à manger de la mairie du village. Venez, installons-nous, nous continuerons de parler en mangeant. Avec ce voyage vous devez être affamés ! :air::air: — Je ne vais pas te contredire ! s'enthousiasma-t-elle. » :air::air: Pour la troisième fois, Dom se répéta et leur raconta tout. Pour lutter contre la déprime et pour tout bien considérer, il avait besoin du soutien et des avis de ces amis et compagnons. Il aurait volontiers demandé conseil à Opera, SL, Tiret, ou encore Tybalt, mais leur absence ne lui permettait pas ce luxe. Lorsqu’il finit enfin de conter ses découvertes et son passé, il s'aperçut que son assiette était à peine entamée tellement il avait parlé. Il n'avait de toute manière pas très faim. Il déposa ses couverts, attendant une quelconque réaction de ses camarades. Ceux-ci se regardèrent, ne sachant trop quoi penser. Un coup de foudre résonna dans la pièce. :air::air: Arthur sursauta et tomba de son fauteuil, tandis que Salem était déjà sur ses jambes, en garde et la lame pointée vers l’entrée. Dom quant à lui se frottait les yeux d’un air de profond désespoir. Un énorme trou se tenait en lieu et place de ce qui était une poignée et une serrure de porte quelques secondes auparavant. Le battant tourna sur ses gonds en grinçant, laissant apparaître le tromblon fumant responsable de tout ce bruit. :air::air: « Tybalt ! Combien de fois devrais-je te dire de ne pas faire sauter nos portes ? :air::air: — Pardon, mais tu sais bien que je ne comprends rien à ces trucs. :air::air: — Sérieusement, tu vas bientôt nous coûter plus cher en portes que ne nous coûte l’excavation de la montagne. :air::air: — Oui, oui, pardon. Bref, je vous ai entendu parler, et j’ai voulu venir embêter Salem. » :air::air: Le vieux creeper s’installa sur une chaise vacante. :air::air: « Pour en revenir à notre affaire Dom, demanda Arthur en se relevant, ne pourrais-tu pas demander de l’aide de l’Empire au nom de la Colonie du Kubnigera ? :air::air: — Cela ne changerait rien, même si la Colonie et la fourmilière demandaient une faveur pareille en même temps nous n’aurions pas gain de cause : cette affaire ne concerne que moi, et l’empire ne dépensera jamais autant de moyens, d’argent, de matériel, de temps et d’hommes pour une affaire personnel qui ne le concerne pas. :air::air: — Et tu ne penses pas avoir d’autres moyens ? :air::air: — Le truc c’est qu’ouvrir un passage vers une dimension dont on ne sait rien à part que j’en viens et y mener une guerre de reconquête ne se fait pas comme ça. Il faut des moyens, des mages et des savants pour faire des recherches sur le sujet, une force armée suffisante… Et il est hors de question que j’implique le Kubnigera ou Bel-O-Kube là-dedans. :air::air: — J’ignore exactement de quoi il s’agit, intervint Tybalt, mais si jamais vous en avez besoin, mon statut de chevalier de l’Empire devrait pouvoir me permettre d’avoir accès à ces avantages bien plus facilement. :air::air: — Non Tybalt, c’est très gentil à toi mais je ne souhaite impliquer plus de personnes. Ce n'est pas... » :air::air: Dom s'arrêta au beau milieu de sa phrase. Il ne dit rien sur le moment, mais il avait eu une idée plutôt audacieuse. :air::air: « Ce n'est pas... ? répéta Arthur ? :air::air: — Pardon, je me suis perdu dans mes pensées, mentit-il. » :air::air: Ils continuèrent la discussion tout au long du repas, bien que très vite ils furent en train de rire de choses et d'autres. Tybalt radota encore une fois l'une de ses histoires concernant la lutte du cactus contre l'éponge ou la première visite des lacustres à Bel-O-Kube. Le souvenir des visiteurs ivres après quelques gorgées de gorgeraide au Little Rock Café amusa Arthur. Dom lui se contenta de sourire en s'imageant la scène. Il n'était pas encore à la fourmilière à cette époque. :air::air: Tous étaient sur le point de prendre congé. Le jeune homme les enlaça un à un. :air::air: « Merci infiniment, mes amis, les remercia-t-il. Vos conseils me sont précieux, et je vous dois beaucoup pour le soutien que vous m'apportez. Je crois avoir une idée, mais je dois pour cela me rendre à la capitale et obtenir une audience à la cour. Arthur, ajouta-t-il en posant ses yeux verts remplis d'espoir et de respect sur celui qui demeurait avant tout sa Reine, puis-je te demander un immense service ? :air::air: — Bien entendu, si c'est en mon pouvoir je t'aiderai de mon mieux ! :air::air: — Te serait-il possible d'organiser mon remplacement l'espace de quelques jours à la direction de la Colonie ? Je sais que c'est très soudain de ma part d'organiser un voyage jusqu'au cœur de l'empire, mais voilà trop longtemps que j'attends pareille opportunité. :air::air: — Je ferais tout mon possible. Peut-être le vieux creeper voudra bien sortir de son antre du cactus pour m'assister ? » :air::air: Ce dernier grogna en un mélange subtil de contentement et de mauvaise volonté, chose dont il détenait le secret depuis toujours. Dom s'inclina et quitta ses compagnons. Sans attendre, il se rendit chez lui. Il devait être prêt au voyage autant qu'il devait être présentable. Son équipement habituel ne changea pas, même s’il opta pour une longue cape de voyage noire qui l'enveloppait entièrement et arborait seulement sur l'un de ses pans la bougie et l'arbre qui depuis étaient devenus les couleurs qui le distinguaient. Comme c'était rarement le cas, il ne portait cette fois pas de capuchon, et on pouvait donc voir sa chevelure blonde et bouclée ainsi que sa barbe de sept jours. Rapidement, il rassembla des provisions pour le voyage qu’il ferait par les airs. :air::air: Lorsqu’il sortit, la fraîcheur de l'air l'incita à ajuster sa fidèle écharpe et à sortir ses gants. Le vent soufflait avec insistance et soulevait sans mal sa lourde et ample cape. Celle-ci claqua lorsqu'il se rendit d'un pas vif vers l'arbre du Splash. Il entendit l'un des oiseaux du nid bouger, comme s'il sentait le départ proche et s'y préparait. Il était vrai que comme la Colonie avait construit un nid en lieu et place d'une simple tour. Elle était au goût des oiseaux, qui se plaisaient à y demeurer davantage que prévu. :air::air: « Prend garde, Ombre Foudroyante. » :air::air: Umbra se tenait derrière lui, toujours impassible. :air::air: « Mon père a cessé de t'épier depuis notre rencontre, poursuivit-il, tu as bien dû t'en apercevoir. Il sait que je suis là et doit se douter que je t'ai appris des choses sur lui. J'ignore où il se trouve, mais votre prochaine rencontre ne se déroulera probablement pas sans une bataille. :air::air: — N'aie crainte. Avec ce que tu m'as appris sur lui et avec ce que je me suis souvenu, j'ai les armes nécessaires pour le vaincre. :air::air: — Je n'en doute pas une seconde, mais ne le sous-estime pas pour autant. Il est capable de bien plus que moi. :air::air: — Je ne l’oublierais pas. :air::air: — Encore une chose… :air::air: — Oui ? :air::air: — Non, pardonne-moi, ce n’est pas important. » :air::air: Le jeune homme frissonna et, sans un mot de plus, hocha la tête, l'air grave et décidé. Umbra s'évanouit avec le vent, laissant Dom seul avec lui-même. Il ne tarda pas plus et entama l'ascension de l'arbre. Bien que le nid ne soit pas si haut que ça, l'air glacé qui sévissait là-haut était bien plus cruel qu'aux pieds du tronc. Le jeune homme ne put retenir un frisson. Un oiseau bleu déjà harnaché s'ébroua et s'approcha de lui. Il se fit caresser et sautilla de contentement. Dom mit un pied à l'étrier, s'empara des rênes, et se dirigea vers la plate-forme d'envol. :air::air: Un dernier regard vers l'arbre, et les ailes du volatile firent vrombir l'air. :air::air: Il était en route vers Stendel. :air::air: ~~~~~ :air::air: Un nuage croisa la trajectoire de l'oiseau. Les minuscules gouttelettes d'eau s'abattirent sur Dom lorsqu'il le traversa, et se déposèrent sur sa cape. Ses cheveux furent trempés instantanément. Lorsqu’il émergea de la masse d’eau en suspension, les murs de la capitale se dessinaient à l’horizon, de même que le soleil s’apprêtait à s’y cacher d’ici une heure ou deux. Le jeune homme arrivait enfin après deux bons jours de voyage sans aucune pause. Il trépignait d’enfin pouvoir se dégourdir les jambes. Il pressa sa monture, qui fendit les cieux. Bientôt, il dépassa les remparts et les habitations défilèrent en dessous de lui, ainsi que la foule pleine de vie qui s'agitait dans les rues. Vu d’en haut, cette ville lui faisait beaucoup penser à la fourmilière de Bel-O-Kube. En quelques minutes, la tour d’atterrissage fut en vue. Peu à peu, il ralentit et amorça une descente circulaire. L’oiseau battit des ailes avec vivacité pour se stabiliser avant l’atterrissage, puis ralentit peu à peu la force de poussée. Finalement, dans une secousse, il déposa ses pattes sur le sol. :air::air: Dom sauta sur les planches usées par les serres des volatiles à force de nombreux passages. Un instant, il se contenta d’observer la ville de haut, profitant de la vue imprenable que lui offrait la tour. Sans attendre davantage, il descendit l’échelle et l’escalier, et se retrouva bientôt dans une rue pleine de vie. Il n’avait décidément pas l’habitude de la ville. Les habitants coulaient sur les pavés et contournaient le jeune homme tels un seul torrent. Comme il était tard, Dom n’allait pas demander une audience au palais le jour même. Il décida à marcher un peu avant de trouver un lieu où passer la nuit. :air::air: Il se mit en route vers les jardins de la capitale, qui se situaient à deux pas de là. Il appréciait cet endroit : peu importe la saison, une foule de papillons s'y trouvaient, voletant çà et là. Malgré la fraicheur de l'hiver approchant, il s'assit sur un banc et se contenta d'observer le coucher de soleil et les quelques fleurs subsistant par ce froid. :air::air: Il fonça les sourcils. :air::air: Une sensation désagréable lui oppressait les tempes. Il connaissait cette présence. Sans s'attarder, il s'éloigna. Il pressa le pas, se faufilant dans les ruelles. Il cherchait à s’éloigner le plus possible de l’activité bouillonnante de la cité impériale. À chaque coin de rue, à chaque tournant, il jetait un œil par-dessus son épaule. Il se retournait, mais sans cesse il voyait la même chose, qui le suivait, le poursuivait. Depuis plusieurs mois, plusieurs années maintenant, il connaissait cette sensation. Il connaissait cette manière fourbe et malsaine de l’épier. Et plus que tout, il connaissait la noirceur fumante et insondable qui émanait du papillon noir qui le suivait depuis les jardins. L’insecte voletait rapidement dans sa direction, ne souhaitant pas le perdre. Dom courrait presque à présent. Pas parce qu’il fuyait, mais parce que l’affrontement était inévitable et qu’il risquait d’impliquer des innocents. :air::air: En lui-même, Dom désespéra que ce monstre n’ait pas attaqué alors qu’il était encore au Kubnigera. Il arriva au fil de sa course dans le quartier indigène. Il se faufila au milieu des passants, se glissant entre eux sans même les bousculer. Sans trop regarder où il se rendait, il bifurqua subitement pour s’engager dans un escalier et tenter de semer son poursuivant. Il grimpa les marches trois par trois et aussi vite qu’il le put. Il déboucha sur le sommet d’un énorme rocher en équilibre précaire. Il était en réalité juste derrière le palais. Il regarda rapidement autour de lui. Il n’y avait aucune issue. Exactement au moment où il aurait dû, il n’avait plus regardé où menait sa route, et il était à présent piégé. :air::air: Il se retourna. Le papillon se trouvait à la sortie de l'escalier. :air::air: Deux secondes. :air::air: L'animal se brouilla, et en un instant le Chickenderpig se matérialisa à partir de l'insecte. Il recula le bras, prêt à frapper. :air::air: Une. :air::air: Dom analysa la situation. Il n'avait aucune échappatoire. Il allait recevoir le coup de front quoi qu'il arrive. Le mieux qu'il pouvait faire était d'absorber le choc autant que possible. Il maîtrisait ses facultés de fourmi à présent. Et une fourmi porte une chitine très résistante, un exosquelette à l'épreuve des coups. Il changea sa peau en une carapace noire et solide, s'accroupit et croisa les bras :air::air: Zéro. :air::air: Le coup de Nigrum frappa Dom de plein fouet. Celui-ci absorba le choc, mais fut éjecté en arrière sous sa violence improbable. Il vola durant quelques maigres mais interminables secondes, suspendu dans les airs. Son dos heurta une surface dure, mais la traversa. Puis il rencontra le sol et roula sur plusieurs mètres, accompagné de poussière et de gravas. Il toussa et secoua la tête, sonné. :air::air: Alors qu'il cherchait à retrouver ses esprits, un léger et doux raclement métallique vibra semblablement à un sombre et grave diapason mortel, suivi de peu par un léger claquement. Un peu plus loin, des hommes s'alarmaient tout en dégainant leurs armes. Très vite, Dom s'aperçut qu'une aura fumante et violacée l'enveloppait. Il reconnut immédiatement l'œuvre d'Umbra et le signe caractéristique de son énergie. Qu'était-ce ? La corruption dont Nigrum était l'incarnation la plus virulente tuait presque instantanément. Pourtant il était encore en vie. Umbra l'avait-il protégé contre les effets directs que pouvait lui infliger le Chickenderpig ? :air::air: Toujours assailli de questions, le jeune guerrier se redressa. L'espace d'un instant, il eut la sensation d'être arrêté dans son mouvement. Une forme se dessina au sein de la brume poussiéreuse et sale qu'avait provoquée Dom à sa chute. Toujours désorienté, il tira son épée. Une main gantée l'interrompit dans son geste. :air::air: « Ce n'est pas à moi que tu en veux mon ami. :air::air: — Zovsky ? :air::air: — Qui d'autre. Qui a fait ça ? :air::air: — Nigrum. Le Chickenderpig, ajouta-t-il devant l'air d'incompréhension de son ami. :air::air: — Dans tous les cas, il nous faut nous éloigner, trop d'innocents seront en danger si... » :air::air: Les oreilles de Dom sifflaient toujours à cause du choc, et sa tête tournait. Il n’acheva pas sa phrase. Il avait absorbé la plupart de l’impact, mais il avait très certainement causé des séquelles. Il discernait à peine les paroles de son ami et tanguait de gauche à droite, tentant vainement de trouver un équilibre. Un vrombissement fit vibrer ses tympans et un nouveau nuage de poussière et de gravas se répandit dans la salle. Le jeune homme se jeta sur le côté et esquiva de peu la frappe de Nigrum. La bête se releva et fixa les deux hommes de ses yeux immaculés. Dom jeta un œil incertain alentour. Sur leur gauche se tenait l'Impératrice, toujours calme, autour de laquelle s'attroupait un contingent de gardes, dirigés par le Nécromancien. En face, trônant au centre de la pièce telle une bête féroce, son ennemi fit un pas, écartant toute possibilité de s'avancer. Un coup d’œil en arrière lui permit de voir l'accès au balcon qui se situait juste derrière eux. Dom était toujours désorienté, mais c’était vraisemblablement la seule issue possible. Aux gravas et aux gardes paniqués qu’il distinguait difficilement, et aux beuglements indiscernables qui se détachaient du chaos auditif que le choc lui avait infligé, il ne mit pas longtemps à comprendre que sortir – et vite – était une priorité. Sans même un regard, les deux amis firent volte-face et s'élancèrent par l'ouverture. Dom prit appui sur un créneau et s’élança en contrebas. Il se trouvait sur le seul chemin menant au palais et tentait tout pour s’en éloigner le plus possible. Le Chickenderpig s’interposa en se matérialisant en face d'eux. Les deux jeunes hommes bifurquèrent sur la droite. Dom courait à en perdre haleine – la tête menaçant d’exploser sous la douleur et les muscles brûlants –, slalomant entre les quelques arbres qui se trouvaient sur le chemin. Ils furent bientôt au sein d’une petite plaine entourée de petits pics, près du château de Stendel. :air::air: De petites particules noires commencèrent à s’assembler entre les deux protagonistes. La matière fumante et abyssale qui formait le corps brumeux de Nigrum voletait pour le reconstituer. Mais ce n’est pas le Chickenderpig fin, allongé, presque ridicule qui refit surface. La créature qui apparut dans un formidable rugissement de rage était massive, semblable à un guerrier arborant une armure lourde et noire, dont les courbes agressives et les extrémités acérées ne faisaient qu'accentuer le caractère malfaisant de la bête. De son dos sortaient et glissaient sur le sol de longs et effrayants tentacules, de longs pics souples et mobiles qui s’agitaient en une sinistre danse. De sous ses gantelets dépassaient des griffes acérées qui semblaient inversement luire et trancher comme l'épée de Dom. Seule luisait dans l'interstice formé par deux plaques de son casque ce que le jeune homme pensait être les deux yeux blancs du monstre. :air::air: Nigrum ne semblait clairement pas exprimer l'envie de parler. La présence en un tel lieu de celui qu'il devait persécuter et de celui qui cherchait à éliminer la corruption ne laissait s'échapper qu'une simple et fondamentale envie de tuer. Zovsky eut une réaction semblable : l'opportunité d'éliminer l'un des majeurs problèmes qu'il rencontrait ces temps-ci était trop forte. Il s'élança. :air::air: Sa lame noire comme la nuit fendit l'air. Elle traversa de part en part le corps du Chickenderpig. Celui-ci hurla d'un cri grinçant et à la hauteur indiscernable. D'un revers de la main, il frappa celui qui avait osé lever la main sur lui. Le fondateur vola. Nigrum n'était pas blessé, mais le contact de la lame onyx semblait lui avoir fortement déplu. Afin de ne pas lui laisser de répit, Dom s'élança à son tour. La pointe de son arme décrivit un, deux, trois arc de cercle en sifflant. Chaque fois, d'un simple et rapide pas de côté ou en se dématérialisant, l'ennemi échappa au dard mortel. Il darda le jeune assassin d'un regard amusé. Dom éleva la voix, courroucé : :air::air: « Qui es-tu pour oser me regarder de haut ? tonna-t-il. Tu es déjà le monstre infâme qui m'a volé ma femme, mon enfant, ma vie, mon ami, mes terres, et qui m'a poursuivi sans relâche depuis lors. Crois-tu réellement que je vais te laisser te gausser de moi ainsi ? Ma patience est depuis longtemps à bout, et je n’aurais plus aucune pitié. Voici Hexalon, celle qui tranche même le vent, poursuivit-il en brandissant sa lame qui brillait d’un éclat mortel. Tu t’en souviens n’est-ce pas, comme je m'en suis souvenu il y a peu ? C’est pour cela que tu l’évites à tout prix, car tu sais le danger qu’elle représente pour toi ! Et crois-moi, je ne compte pas te laisser échapper à sa morsure éternellement : il est temps pour moi de te montrer ce dont la conscience du Kubnigera m’a offert contre toi ! » :air::air: Sitôt eut-il achevé sa phrase, ses yeux se tentèrent de noir et se craquelèrent en une multitude de facettes. Il maîtrisait parfaitement ses facultés de fourmis à présent, et il possédait la force, la vélocité et l’acuité de ses consœurs. Il banda ses muscles. :air::air: Dom plissa les yeux, concentré. Nigrum eut un mouvement suite à son discours. Le mouvement qu'il attendait. Avec ce qui semblait être pour Dom une lenteur glaciale, le monstre avança d'un pas, les bras écartés en signe de défis. Dom avait un coup d'avance sur lui et il était vexé. Le pas qu'il fit était celui qu'attendait le jeune guerrier, celui qui plaçait son ennemi tout juste à sa portée. :air::air: Lorsque son pied prit appui sur le sol et qu'il se jeta en avant, le tonnerre sembla gronder. L'instant d'après, Hexalon s'abattait vers la créature. Le métal mortel frappa à l'épaule droite et couru jusqu'à la hanche opposée. Le Chickenderpig était tranché en deux. Dom se souvint des mots d'Umbra. Trop tard malheureusement. Même s'il parvenait à l'atteindre, un coup mortel pour un être vivant ne serait qu'une égratignure pour lui. :air::air: Dom comprit son erreur. :air::air: Un des tentacules dorsaux du monstre le frappa au flanc, un coup de griffe au cœur. Un mince filet de sang s'écoula de la première plaie. Le second coup à la poitrine n'avait rencontré que le brassard gauche du jeune homme. Il avait eu le temps de matérialiser de la chitine sur sa peau afin de limiter les dégâts. :air::air: Une détonation résonna, et Nigrum s'évanouit aussitôt. Zovsky, un peu plus loin, avait fait feu à l'aide de ce que Dom prenait toujours pour une copie miniature du tromblon de Tybalt. Dom pu voir leur adversaire se matérialiser au-dessus de son ami, et celui-ci se jeter en avant pour éviter son attaque. Sans attendre, le diplomate décocha une flèche sur la créature afin d'enrayer l'assaut que subissait Zovsky. Le Chickenderpig braqua son regard sur l'archer et s'éparpilla dans l'air. Dom scruta les environs, guettant le moindre mouvement et le moindre bruit. Au-dessus ? Non. Autour ? Non. Aucun signe, aucun son. Seuls s'étendaient encore les sons de Zovsky qui tournait et d'un... d'un grondement venant du sol ? :air::air: Dom bondit en arrière. Des tentacules frétillants jaillirent du sol, suivis de peu par leur propriétaire. L'un d'eux attrapa la cheville du jeune homme, qui perdit l'équilibre. Son dos heurta douloureusement le sol. Tous ses membres se retrouvèrent immobilisés, puissamment enserrés entre ceux grouillants de Nigrum. Ce dernier vola jusqu'à Dom, qui se teinta de noir, protégé par la chitine qu'il matérialisa à la place de sa peau. :air::air: Dom ne put pas même hurler sous le coup de la douleur, le souffle coupé. Le poing du monstre l'avait frappé à l'estomac. S’il avait évité de peu d’être tranché en deux par ses griffes acérées, le choc n’en avait pas été moins violent. Il toussa, cherchant désespérément de l’air. Il avait au moins une côte brisée. Une déflagration retentit à nouveau. Nigrum détourna le regard, sans pour autant relâcher l’assassin. La lame de Zovsky suivit son coup de feu, et traversa le corps de la créature. Bien qu’elle ne fut pas blessée, elle poussa un cri et relâcha légèrement l’emprise sur Dom. D’un mouvement de poignet, il trancha les liens qui maintenaient sa main armée. Son adversaire se retira alors que les tentacules estropiés s’évaporaient dans l’air. Le jeune guerrier meurtrit roula sur le sol et s’appuya sur son épée pour tenter de se relever. Durant plusieurs instants, il demeura immobile. Ses oreilles sifflaient et il était sur le point de perdre connaissance. Il se replia sur lui-même le temps de retrouver ses esprits, bercé par le sifflement clair de la lame sombre de son ami. :air::air: « Dom ! » :air::air: L’appel de Novchenko le tira de sa transe. Bien que toujours assailli par la douleur, il se sentait à présent bien mieux. Il sauta sur ses pieds et balaya l’air avec Hexalon. Zovsky accourait vers lui. Sans un bruit, Nigrum se reconstitua au-dessus de lui, sous le regard affolé de Dom. Il n'avait pas le temps de l'avertir. :air::air: Zovsky souleva le pied pour effectuer le pas suivant. :air::air: Dom ferma les yeux, concentré. En un instant il psalmodia la formule. Tel un cocon, le micro-univers qu'il créa l'enveloppa. Une poche de la réalité où le temps s'écoulait plus vite. Il s'élança. L'instant d'après, son épée tranchait le monstre. Il relâcha son sort. Il n'avait déjà plus aucune réserve pour utiliser à nouveau ses maigres pouvoirs. Nigrum réapparut derrière lui et balança son bras. Dom se servit de son brassard métallique pour dévier le coup. De son autre bras, le Chickenderpig l'éjecta sur le côté. Dom fit plusieurs tours au-dessus du sol avant d'arriver à se stabiliser et retomber sur ses jambes. Sitôt son pied toucha l'herbe, il prit appui et s'élança de nouveau. Il n'en revenait pas. Ce monstre rivalisait avec sa vitesse, celle jusque-là inégalée de son peuple. Trois tentacules pénétrèrent le cuir de son armure, à peine stoppés par sa chitine protectrice. Il trancha les autres et plongea vers le cœur de la bête. Sa lame glissa dans le corps immatériel. Cela ne l'arrêtait pas. Elle pouvait tout trancher. Le monstre se volatilisa aussitôt, accompagné d'un grand cri. :air::air: Zovsky posa le pied à terre. :air::air: Le Fondateur arrêta sa course pour chercher du regard son compagnon soudain volatilisé. Il l'aperçu, la lame tendue dans le vide, tout en sang et en sueur. Dom le regarda. Il n’était pas dans un meilleur état. Ils s’échangèrent un regard et se rejoignirent. Nigrum refit surface près d'eux. Ils fondirent d’un même mouvement sur lui. Ils repoussèrent le monstre, fendant l’air de leurs lames tel le duo de la lune et du soleil dansant dans l’air. Dom reçu plusieurs balafres, mais ils le contenaient, prenaient l’avantage. Les assauts constants de leurs lames complémentaires l’empêchaient de fuir. Les trois protagonistes gravirent peu à peu la pente qui se trouvait non loin, poursuivant avec acharnement leur danse mortuaire. Dom encaissait les coups, protégé par son exosquelette. La fatigue s’emparait de lui. Il éprouvait de la difficulté à maintenir sa protection après les nombreuses minutes d’utilisation constante qu’il en avait faite. Le vent les fouettait violemment sur les hauteurs. :air::air: D’un moulinet du poignet, Dom trancha quelques tentacules. Zovsky reçu un coup de front qu’il dévia de justesse, évitant à sa tête de quitter prématurément ses épaules. Une seconde frappe suivit. L’une des griffes traversa son flanc. :air::air: « Maintenant ! » :air::air: Il enlaça de son bras celui de Nigrum, toujours fiché dans sa peau. Dom bondit et fut là en un instant, rapide comme la mort. :air::air: Deux éclairs frappèrent. :air::air: Plus un bruit. Plus un souffle ou un soupir. Seuls demeuraient les bruissements infimes de l'herbe. :air::air: Dom se tenait près de Zovsky. Tous deux brandissaient leurs lames en avant. Des perles de sueur suintaient de leurs fronts. Les deux épées se frôlaient, vibrant encore sous la tension insensée qui leur avait été imposée. Un reflet glissa le long de la lame de Zovsky, qui devint soudain aussi blanche que celle de Dom durant quelques instants. La créature fut prise d’un spasme puis reprit un état parfaitement statique. La caresse mortelle des armes se poursuivait sur toute leur longueur, faisant fi des multiples tentacules qui se trouvaient autour, prêtes à les enserrer. Celles-ci n’étaient qu’à quelques cheveux des deux amis tels d’immobiles mais traîtres dards. Les deux armes finissaient leur course dans le torse de Nigrum. L’occasion unique de porter le coup fatal et traître pour le monstre s’était présentée. La faculté de transpercer et trancher le corps du Chickenderpig d’Hexalon associée à celle de le blesser de la lame noire de Zovsky. L’une comblait les lacunes de l’autre et avaient touché au même endroit. :air::air: Le Chickenderpig bougea enfin. Il braqua un regard stupéfait sur les lames, puis le plongea dans celui de Dom, toujours parfaitement immobile et impassible. Sans un son, la créature sembla relâcher ses muscles et tomber à la renverse. Les fers glissèrent dans son torse alors qu’il chutait. Des émanations sombres se dégageaient de lui, et il semblait comme se liquéfier. Il trébucha, sombrant aux pieds de la falaise. Il se fit dévorer par les dents râpeuses des rochers tranchants en contrebas. :air::air: Vaincu. :air::air: Dom inspira profondément, retrouvant enfin son souffle. Il recouvra instantanément sa peau et ses yeux habituels. Son cœur menaçait de déchirer sa poitrine. Quelques secondes de plus et il aurait consumé – dévoré même – ses forces vitales à une vitesse mortelle. Maintenir ainsi ses pouvoirs et facultés l’épuisait bien trop vite. Il jeta un rapide coup d’œil au précipice. Nigrum gisait entre les rocs, dévoré peu à peu par les vagues de la mer qui mordait la côte. Zovsky était allongé, tombant lui aussi d’épuisement. Son épée était fichée dans le sol près de lui, de nouveau aussi noire que du charbon. Le jeune homme le rejoignit et s’affala près de lui. Plus loin en contrebas, des gardes du palais accouraient, accompagnant leur avancée de grands cris paniqués. Dom sourit et ne put retenir une esclaffade soulagée. Les bougres arrivaient après la bataille. :air::air: D’un rapide coup d’œil sur le côté, Dom put voir que le trou qui ornait le mur du palais par sa faute n’était plus. Les mages du château avaient probablement réparé l’accroc sans attendre. Zovsky de son côté semblait plus exténué que d’humeur à rire. Mais tous deux savaient qu’ils avaient remporté une grande victoire. Souriant à son camarade, le jeune diplomate déchira une bande de tissu et compressa sa blessure. Zovsky retint un gémissement désapprobateur. Il se laissa faire néanmoins. Ses connaissances médicales lui imposaient la raison : il avait perdu trop de sang et Dom devait stopper l'hémorragie. Les soldats les atteignirent et les aidèrent à marcher. :air::air: La lune apparut au loin. À sa vue, Dom ne put retenir une pensée pour Aïda. Bientôt, il la retrouverait, quoi qu'il arrive. Il frissonna, frigorifié par le vent. Il devait réussir. :air::air: Bientôt... :air::air: ~~~~~ :air::air: Zovsky apparut dans le cadre de la porte qui donnait sur les salles de soin. Il avait meilleure mine. Sans un mot, Dom lui sourit et se joignit à lui. Tous deux étaient convoqués à la salle du trône. À cette occasion, leurs vêtements avaient été lavés. Ils se devaient de se présenter avec une tenue correcte. Une journée s'était écoulée durant laquelle ils avaient recouvrés leurs forces. :air::air: Le jeune ami de Dom semblait différent. Ce dernier avait l’impression de retrouver le jeune homme égaré et encore un peu naïf qui s’accrochait férocement à son ouvrage sur les côtes du Kubnigera. Il revoyait cet ami pour qui il donnerait sa vie, et plus cette ombre inquiétante qui l’avait supplanté. Dom n’était pas idiot et se doutait qu’il s’était passé quelque chose. :air::air: « C’est lorsque ton épée a subitement perdu sa teinte sombre, n’est-ce pas ? :air::air: — La vérité a toujours été complexe, Dom, soupira-t-il, la mine sombre. Karajan, le Fondateur, était...est une entité excessivement vieille, tout comme l’ennemi que nous avons combattu un peu plus tôt et l’arme que m’a confié l’Impératrice. Cette épée a été forgée dans le seul et unique but d’anéantir la Corruption, quelles qu’en soient les conséquences pour son porteur. En somme, elle se nourrit de la force vitale des Fondateurs, agissant comme un piège qui se renforce en assimilant l’âme de celui qui l’utilise et de celui qu’elle combat. » :air::air: Zovsky marqua une pause, et braqua son regard d’améthyste sur son ami. Dom, impassible, attendait la suite. :air::air: « Karajan avait conscience de cela, reprit Novchenko. Il savait que le seul moyen de vaincre Nigrum était de se donner entièrement à l’épée, car c’était ce qu’elle réclamait depuis le départ. Nos esprits, qui s’étaient unis lors de l’expédition menée à Bel-O-Kube, se sont alors séparés. Le mien est resté intact. Quant au sien… » :air::air: Le jeune homme tira son épée hors du fourreau, dévoilant de nouveau sa lame d’onyx. La saisissant avec précaution, Zovsky présenta son arme au conseiller. :air::air: « Regarde le plat de l’épée avec attention, mon ami. » :air::air: Durant une poignée de secondes, rien ne se produisit, l’alliage inconnu dans lequel l’arme avait été conçue demeurant aussi ténébreux qu’inerte. Puis, de façon presque imperceptible, la lame s’éclaircit, se nuançant progressivement jusqu’à atteindre la blancheur éclatante de la neige immaculée. :air::air: C’est alors que Dom remarqua, presque invisible tant l’écriture était fine, une magnifique calligraphie qui, de son fil d’argent, décorait l’arme antique. :air::air: Jeg Slavnoyë, Sozdätel no seishin. Moya sila eto buki ni nokoru :air::air: « Cela signifie : Je suis l’Invaincue, l’esprit de Karajan. Mon pouvoir sur ces terres demeure en cette arme. » :air::air: Dom brava le regard mi-rassuré et mi-attristé de son ami. Il savait bien que le changement avait dû être rude et qu’il s’était habitué à la présence du fondateur. Dom souhaita le réconforter. Il déposa sa main sur la lame, masquant l’inscription et lui sourit, ses yeux verts qu’il voulait le plus apaisant possible plantés dans les siens. :air::air: « Bon retour parmi nous, lança-t-il simplement. » :air::air: Il réussit à décrisper son camarade. :air::air: « Tu sais, j’ai moi-même beaucoup appris ces derniers jours. Je ne suis plus le même. Du moins, je ne suis plus celui que je pensais être. Mais je m’égare ! Nous approchons de la porte, je te raconterais tout ensuite. Après toi, je pense que mon affaire presse moins que la tienne, affirma-t-il en le poussant vers les battants. » :air::air: Sans un mot, Zovsky passa le seuil et entra dans la salle du trône. :air::air: Dom attendit que les portes se referment. Il rejoignit des gardes un peu plus loin. Il souhaitait les remercier de leur aide et leur payer une tournée le soir même. Bien qu'il plaisanta et rit de bon cœur, une partie de lui restait autant en peine qu'inquiète. Son instinct lui disait que tout n'était pas terminé. Il repensa à Aïda et se renferma sur lui-même quelques instants, seul avec sa tristesse. :air::air: Plusieurs minutes plus tard, Zovsky émergea de la pièce. Le jeune homme délaissa ses camarades, qui s'empressèrent de reprendre leur poste. Il déposa sur son ami un regard inquisiteur, désireux de connaître les tenants et conclusions de l'entretien. :air::air: « Nous en discuterons plus tard, répondit-il avec un clin d'œil à sa silencieuse question. Pour l'heure tu devrais te hâter : elle t'attend. » :air::air: Dom acquiesça. Sans perdre plus de temps, il masqua sa nervosité derrière le masque de calme et de logique qui le caractérisait et passa la porte. Il savait déjà quoi dire. Il ajusta sa cape sur ses épaules et le fourreau à sa taille. Le battement étouffé de ses bottes sur le tapis rouge vif qui ornait le sol et le tintement des plaques d'armure qui accompagnait ses pas étaient les seuls sons résonnant dans la pièce. Un rapide coup d’œil confirma sa théorie : le mur au fond de la pièce était comme neuf. C'était à se demander si ce combat avait réellement eu lieu. :air::air: Au fond de la longue salle, l'Impératrice se tenait, immobile. Elle l'invita à s'approcher. Le diplomate s'immobilisa à quelques mètres des trônes et posa le genou au sol. :air::air: « Votre majesté... salua-t-il respectueusement. :air::air: — Comment vont tes blessures ? s'enquit-elle à la surprise de Dom. :air::air: — Très bien majesté ! Les soigneurs du palais sont très compétents. Il est fort aimable de votre part de vous en inquiéter. Néanmoins, je vous dois mes plus plates excuses pour... le mur du palais. Bien que ce fut entièrement hors de ma volonté. :air::air: — N'en parlons plus, rétorqua-t-elle, un sourire en coin. :air::air: — Si je ne m'abuse, je ne suis pas ici pour parler de mes ecchymoses, n'est-ce pas ? :air::air: — Exact. M'est avis que cette créature ne t'es pas étrangère, et je souhaiterais savoir ce que tu en sais. :air::air: — Voilà encore quelques jours je n'aurais su répondre à cette question. Mais soit, je suis à présent en mesure de vous fournir le récit de mes souvenirs recouvrés. » :air::air: Durant de longues minutes il énonça son histoire, insistant sur les détails concernant Nigrum comme elle le souhaitait. Lorsqu’il eut fini, elle demeura quelques instants pensive. :air::air: « Avec tes explications et celles de Zovsky, tout est à présent bien plus clair. Je te remercie de ta sincérité. Néanmoins, une zone d'ombre persiste. :air::air: — Si je le peux, je l'éclaircirais. :air::air: — La question que je me pose, c'est pourquoi tu t'es trouvé à Stendel. Mon idée et que tu avais déjà prévu d'entrer dans cette salle autrement qu'en infligeant un sort funeste à notre maçonnerie. :air::air: — En effet. Comme vous vous en doutez, la découverte de mes souvenirs a réveillé en moi le désir de retrouver ma famille et de libérer mes terres. Or, même avec toute la bonne volonté du monde, mes moyens sont insuffisants. Par ailleurs, mes fonctions de dirigeant et diplomate m'amènent à côtoyer énormément de gens. Au-delà de mes fonctions de scribe, je souhaite être au service du peuple et de l'Empire. Pour m'aider dans ma quête d'une part, et pour aider autrui d'une autre. Et il y a un dénominateur commun à cela, la raison de ma venue. :air::air: — Et quelle est-elle ? demanda-t-elle bien qu'ayant parfaitement deviné de quoi il retournait. » :air::air: Dom prit une grande inspiration avant d'enfin répondre d'une voix forte et sûre qui se répercuta le long des murs. :air::air: « Ma Dame, je souhaite prêter serment d'allégeance à l'Empire. Si vous l'acceptez et que vous m'en jugez digne, mon adoubement et mon accession à la Chevalerie seront le gage et la fonction de mon serment. » :air::air: ~~~~~ :air::air: Non loin de là, dans les eaux troubles et froides qui frappaient la côte, près du château, un sombre et imperceptible mouvement troubla davantage les ondes agitées de la mer. Haut dans le ciel, les nuages se rassemblaient, d'un blanc immaculé. L'hiver prenait peu à peu la place du doux automne. Alors qu'un cycle touchait à sa fin, un nouveau commencerait d'ici peu. Une ombre s'ébranla pour doucement s'éloigner… Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tybalt Posté(e) le 24 février 2014 Partager Posté(e) le 24 février 2014 Je ne lirai pas tes chroniiiiiiiiques ! t'y as cru hein ? T'y as cru en voyant mon nom s'afficher sur le post que j'avais lu, hein que t'y as cru ? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 25 février 2014 Auteur Partager Posté(e) le 25 février 2014 Vilain Tybalt... ><' Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
DomFulmen Posté(e) le 16 octobre 2014 Auteur Partager Posté(e) le 16 octobre 2014 Bonsoir chers lecteurs ! Voilà quelques mois que je vous avais laissé sans nouvelles, à mon grand regret. J'avais commencé ce chapitre sans trop savoir où aller, et la motivation de l'écrire m'avait peu à peu délaissé pour d'autres écrits, extérieurs à Minefield. C'est finalement Marie qui m'a indirectement redonné l'envie de le faire, en m'incluant dans le RP de sa candidature citoyenne. Ce chapitre est donc très fortement lié à son RP, et en reprend certaines lignes de dialogues qu'elle avait déjà écrites afin d'assurer la cohérence des deux textes. Petite précision d'ordre pratique : comme c'est la police conventionnelle dans la plupart des maisons d'éditions, et que c'est celle que j'utilise depuis des années, je vais convertir mes RP (et uniquement les RP) à la police Times. Je vais bientôt refaire la mise en page de mes anciens chapitres pour les rendre plus clairs et les adapter au nouveau forum. Ce sera fait entre ce soir et demain je pense. En tout cas, merci à ceux qui me suivent (oui oui, je sais qu'il y en a !), ça me fait très plaisir et m'encourage à continuer, autant que ça me pousse vers mon petit rêve d'enfant de publier un texte un jour. N'hésitez pas à commenter, donner vos avis et vos critiques, je prends tout ! Bonne lecture à vous ! Amicalement et littérairement, Votre Dom. Chapitre 6 : De livres et de Marie. Les yeux de Dom brûlaient. La fatigue, le manque flagrant de lumière, et la concentration intense du jeune homme s’assemblaient en un mélange destructeur. Il se frotta des yeux rougis, ce qui eut pour effet d’atténuer un peu la douleur et l’insupportable picotement. L’infernale machinerie de son cerveau continuait à tourner inlassablement, rendant ses pensées aussi incohérentes et désordonnées que douloureuses pour sa boite crânienne, qui lui martelaient les tempes. Sa main gauche maintenait les pages d’un lourd grimoire ouvertes, et la droite sa fidèle plume. Cette dernière était en suspension au-dessus d’une page presque vierge, depuis si longtemps que son encre en était sèche. Cela devait faire presque une heure qu’il était là, immobile, en train de naviguer entre le livre et le fil de ses pensées. Chaque nouvelle ligne rajoutait une énième inconnue à l’équation gigantesque et improbable qui se tissait dans son esprit. Assimiler toutes ces données et en faire un ensemble cohérent était long et complexe. Mais à trop penser, Dom savait bien que ses pensées s’éparpillaient. Il se força à tremper à nouveau la plume dans l’encrier pour coucher ses pensées sur le papier et les ordonner. La flamme de la bougie vacillait, et la mèche était tellement courte qu’elle ne durerait plus longtemps. Trop concentré, et coupant son attention de toute donnée inutile, il n’y fit pas attention. Il n’avait pas fini sa phrase précédente. Ne sachant plus ce qu’il voulait écrire, il délaissa ce détail et passa à la suite. «Journal et recherches de Sir Dom von Fulmen, Scribe et Chevalier impérial, dirigeant de l’alliance Myrméco-Lacustre de la Colonie du Kubnigera, et Sexué Femelle en charge de la diplomatie de la fourmilière de Bel-O-Kube, pages 287 et 288, 6 Mimélune, an 98 du calendrier Erachien ; […] Mes recherches me mènent peu à peu à la solution. La magie utilisée par les mages de l’Empire afin d’ouvrir leurs portails est en réalité une utilisation archaïque de procédés bien plus complexes et détaillés. Je ne suis à présent pas étonné que ces fourbes aient refusé de me renseigner. L’ouverture d’un portail stable leur demande trop d’efforts et de moyens pour qu’un homme seul y parvienne. En me fiant à leur procédé, j’y aurais très certainement laissé la vie, quelque fut ma résistance. Par chance, j’ai réussi à trouver d’anciens grimoires dans les coins sombres des bibliothèques de la Capitale. En fin de compte, là où je désespérais de trouver les informations que mon statut de Chevalier aurait dû me permettre de trouver bien plus facilement, c’est au final dans mes fidèles livres que j’ai trouvé une piste. Les écrits me prouvent encore une fois leur fiabilité face à ces égoïstes d’érudits. Ces volumes étaient laissés de côté car non traduits dans la langue commune des terres de l’Empire. Ou dans aucune autre d’ailleurs. Bien que je ne connaisse pas non plus ce langage, j’y trouve certaines similarités avec le Ryalkan ancien. J’en déduis donc que certains de mes lointains ancêtres ont dû se rendre dans ce plan. Peut-être même est-ce eux qui ont apporté le savoir nécessaire aux anciens Stendeliens ? Bien que ce ne soit qu’une hypothèse, je ne peux pas l’écarter. Toujours est-il que, de ce que j’ai réussi à traduire, cette civilisation semblait avoir de grandes connaissances dans le domaine du déplacement inter-dimensionnel. Déjà à leur époque, ces pratiques semblaient se perdre, et l’auteur du livre que je lis actuellement se lamente souvent du manque d’intérêt des jeunes pour cette science. Cela expliquerait sans doute l’absence de cette pratique dans mon pays. En revanche, les portes ouvertes semblent avoir certaines capacités de résilience. Que j’en ai ouvert une dans cette rivière n’est pas à exclure, ce qui expliquerait ma présence ici. Ou serait-ce encore la faute de Nigrum ? Je l’ignore. La méthode utilisée par les mages est bien plus dépassée et dangereuse que celle décrite par ce grimoire. Les mages n’en font qu’une pâle copie. Ce serait comparer une cabane branlante avec le palais des Empereurs. À la différence que ce « palais » peut être utilisé presque par n’importe qui, et avec des risques minimes. Le peu de pouvoir magique que je détiens devrait largement me permettre d’ouvrir une porte dans la théorie. Du moins je l’espère. Les instructions sont très spécifiques et précises sur comment canaliser et utiliser son pouvoir, ce qui devrait permettre même à un néophyte comme moi de s’en sortir. Il ne me manque que deux choses. Premièrement, un plan, et savoir exactement où faire apparaitre la porte. Deuxièmement, plus d’instructions. Même si cette méthode de création de portail est significativement plus sûre et simple que celle utilisée actuellement pour sa mise en place, c’est une autre paire de manche pour ce qui est de sa traversée. Si on peut bien reconnaître une chose à nos mages, c’est leur amélioration de ce système. Car maintenant, traverser une de ces portes revient littéralement à en traverser une entre deux pièces, chaque pièce étant un monde ou un plan d’existence différent du second. Avant, l’entreprise était bien plus périlleuse, vu qu’il fallait passer dans le vide entre chaque dimension.Idéalement, je préfèrerais trouver le moyen d’associer la facilité de mise en place de l’ancien système avec la sécurité du nouveau. Je doute que personne n’ai pensé à faire ces recherches ou à une solution. C’est là-dessus que mon travail doit se porter désormais. Je dois néanmoins faire avec une fatigue et des migraines sans cesses croissantes. J’ai l’impression de me redécouvrir à mesure que je redécouvre ou me remémore des bribes de mon passé, de ma culture. Des souvenirs, idées, pensées, tout ça envahit mon cerveau à la moindre chose qui pourrait m’y faire penser. Si mes pensées sont plus vastes, elles sont aussi plus chaotiques, et entravent mes recherches. Je tente de canaliser ce flux de mon mieux, mais c’est difficilement que j’y parviens. J’ai l’impression très désagréable de ne plus me connaître. La meilleure solution que j’ai trouvée pour me concentrer plus efficacement est — paradoxalement — de faire plusieurs choses en même temps. Lire un volume tout en notant mes pensées à mesure qu’elles me viennent à l’esprit par exemple, me permet de guider mon raisonnement brouillon en un canal de pensées tout aussi arborescent, mais plus dirigé. En contrepartie, je tends de plus en plus à rester enfermé dans mon bureau. Mes réflexions semblent de plus en plus incompréhensibles à mes camarades. J’ignore ce qui m’arrive, mais c’est un point que je verrais plus tard. En parallèle, je passe semble-t-il un peu trop de temps à mon bureau, à la seule lueur d’une bougie. Mes rares sorties se soldent par un éblouissement important et une augmentation significative et difficilement supportable de mes maux de tête, à cause du bruit. Par chance, la Colonie est assez calme pour que je puisse y survivre. Et je suis peut-être plus littéral que je ne le pense en disant ça… […] » Dom déposa sa plume et se frotta à nouveau les yeux. La flamme de sa bougie venait de s’éteindre sans qu’il y prête attention. La lumière des étoiles passant par la fenêtre suffisait à Son estomac grondait depuis de nombreuses heures, mais il n’en tint compte qu’à cet instant. Il se risqua à glisser une tête à l’extérieur de sa chambre. Pas un seul bruit ne provenait du tronc. Comme on était au beau milieu de la nuit, tous dormaient. Le jeune homme en profita pour sortir chercher de quoi lui remplir le ventre. Le calme et l’obscurité de la nuit étaient un baume pour les yeux et les oreilles de Dom, pour qui la lumière et l’agitation de la journée devenait une torture, sans qu’il en connaisse la cause. Le changement qu’il ressentait en lui le perturbait, mais il ne parvenait pas à l’expliquer. Il parvint vite au garde-manger, et en ressortit avec un couple de pommes et un petit verre de miellat. Il avait faim, mais il savait pourtant qu’il mangerait peu. Son appétit lui semblait décroitre proportionnellement à sa santé mentale. Non qu’elle soit réellement dégradée, il semblait davantage qu’elle l’était pour tous sauf lui, pour qui la cohérence et la pertinence de ses théories n’avaient, au contraire, jamais été aussi justes. Ce fameux jour auquel succéda une nuit lors de laquelle Umbra l’avait entretenu de son passé, l’avait bien plus changé qu’il ne l’aurait cru. Bien loin de simplement recouvrer ses souvenirs, il s’était aussi redécouvert lui. Sa perte de mémoire l’avait contraint à se reformer, se reconstituer. Il l’avait certes fait sur les bases brisées de ce qu’il était, mais le résultat n’avait qu’une forme grossière, et ce qu’il était ressortait au final bien plus via son inconscient et par bribes jusqu’à maintenant. Umbra l’avait détruit à nouveau, et il devait se reconstruire. Il soupçonnait que la vaste quantité d’informations qu’il avait récupérée était en cause des martellements qui frappaient ses tempes, à l’instar d’un vase clos et trop plein qui voudrait déborder alors qu’on persiste à le remplir. Tout en haut de l’arbre, une maigre lueur vacillante perça les ténèbres et se fraya improbablement un chemin entre le dense feuillage du Kubnigera, entre tous ces mètres et toutes ces couches de feuilles et de branches, pour attirer l’œil de Dom. Bien avant l’aube, et bien après le crépuscule, la nuit était bien trop vieille pour que quiconque soit encore debout. Venant d’une jeune femme comme Marie, c’était d’autant plus inquiétant. Elle était arrivée le jour-même, les bras chargés d’une quantité effroyable de livres et de grimoires. Elle était montée aussitôt se réfugier dans sa chambre. Elle n’avait fait que saluer Dom rapidement. Il n’était pas dupe. Son air épuisé, la lueur inquiète et torturée qui luisait au fond de ses yeux, la légère pince contrariée de ses lèvres, le front légèrement plissé et les dents légèrement serrées par la douleur ; tous ces signes ne le trompaient pas. Il avait l’effrayante sensation de voir sur elle les mêmes signes de fatigue, d’inquiétude et d’un fabuleux mal de crâne qu’il vivait lui-même. Et c’était inquiétant. Il s’était promis de passer la voir s’il voyait qu’elle en avait besoin. Il ne voulait pas s’imposer et la forcer à parler si elle n’en ressentait pas l’envie. Ou alors si la situation l’imposait. Là, il était pratiquement certain de la trouver soit effondrée d’épuisement, soit debout, les yeux rougis d’être restés trop longtemps ouverts. Il ne s’embarrassa pas des échelles ou des escaliers qui parcouraient l’intérieur du tronc. Il se contenta de se métamorphoser assez pour grimper directement à la paroi, comme toutes les fourmis de Bel-O-Kube. Il s’en gagea donc dans une ascension rapide jusqu’au sommet du tronc. Il se dirigea ensuite sans hésiter vers la chambre qu’occupait Marie. C’était d’ailleurs le seul endroit d’où provenait la maigre lueur frémissante d’une bougie. Dom repoussa silencieusement le battant de la porte déjà entr’ouvert. Sur la table reposait la même quantité impressionnante de livres qu’il l’avait vu apporter. Elle s’était endormie sur l’un d’eux, sa tête frisée posée entre ses petits bras. Il sourit d’attendrissement en la voyant là. Son visage se rembrunit vite et prit une teinte inquiète et attristée en voyant l’expression effrayée, presque tourmentée de son visage. Dans son sommeil, elle abaissait forcément les défenses qu’elle maintenait en journée. Là, toute l’étendue de ses démons transparaissait sur son jeune visage. Elle était si jeune… Lui avait plus de deux siècles à présent. Il n’en paraissait rien, certes. Son peuple vivait longtemps, et il était presque jeune pour eux. Mais Marie semblait en avoir beaucoup trop vu et vécu pour son âge. Il s’intéressa vite aux livres, et ses yeux s’écarquillèrent davantage. Elle n’aurait jamais dû se trouver en possession d’ouvrages aussi dangereux. Il en ouvrit un, et reconnu l’écriture et la signature de Kolwako, qui en avait fait la traduction. Ce vieil aventurier n’était pas fou, et il savait la valeur et le danger que représentaient ces grimoires. Il ne les lui aurait pas confiés sur un coup de tête. Il les feuilleta rapidement, regarda les notes de la jeune femme. Ce qu’il y découvrit lui fit bien trop penser à Nigrum et Umbra pour qu’il laisse son amie s’y engouffrer seule. Si la Corruption était liée, elle y laisserait beaucoup trop. Un ouvrage attira son attention. Il était écrit en Ryalkan. Il s’en empara vivement et l’ouvrit. Il n’était pas traduit. Sans nul doute, Kolwako n'avait pas réussi à déchiffrer efficacement les caractères que personne dans l’Empire n’utilisait. Il lut rapidement le titre. Des labours et procédés d’agriculture. Il le referma avec un sourire. Il se promit néanmoins d’aider Kolwako à traduire ses ouvrages, mais aussi de lui demander dès que possible s’il en avait d’autres. Il était possible qu’il en détienne un sur les portails. Il se ravisa. Il devait avoir des explications sur ce que recherchait Marie. Il n’en avait que des bribes et n’avait pas le temps de lire tout ce qu’elle avait lu. Il souleva Marie, et elle lui sembla plus légère qu’une plume. Il la déposa sur son lit, se saisit des couvertures, et la borda. Il l’entendit grogner de contentement et arborer l’ombre d’un sourire, qui le rassura. Au fond, elle restait toujours la même. Il prit l’ouvrage sur l’agriculture sous le bras, décidant de faire d’une pierre deux coups, et sortit de la pièce. Il s’engagea d’un pas vif vers sa propre chambre. Il décida de prendre le risque. Si établir un portail entre deux plans différents était complexe et hasardeux avec ses connaissances actuelles, en établir un sur le même monde, entre l’arbre et chez Kolwako, était tout à fait à sa portée. Il referma brusquement la porte derrière lui, s’assura qu’Hexalon se trouvait bien à sa hanche, et il tendit les mains devant lui. Il canalisa le pouvoir dans ses mains, en ressentit le picotement dans son crâne et le long de ses bras. La seule utilisation qu’il en faisait était pour ralentir le temps. C’était une première pour lui. Il tordit les flux de puissance selon sa volonté, lui donna la forme et le mouvement adéquat, et les dirigea vers sa destination. Puis il joignit les mains dans un claquement et les écarta aussitôt. Un portail globalement ovoïde et un peu plus grand que lui se matérialisa aussitôt, vrombissant de puissance. Son violet profond bouillonnait, s’agitait selon les remous et les fluctuations de la magie. Il n’hésita pas à le traversa juste après avoir récupéré l’ouvrage en ancien Ryalkan. Le temps d’un battement de cil, il fit un pas dans un monde noir, mouvant. Il lui sembla voir des formes, des silhouettes, se détacher de la profonde noirceur des lieux. Les âmes des morts ? Des démons ? Les habitants d’un autre monde ? Ou ceux de l’Empire ? Il ne le saurait jamais. Lors de ce court instant, il eut froid. Très froid. Il commençait à entendre des voix. Son pas suivant le mènerait hors du portail. « […] et j’espère seulement qu’elle ne risque rien. Ces rêves qu’elle a, j… — J’aimerais bien que tu m’explique tout ça, en effet, lança Dom en émergeant du portail et en interrompant Kolwako. » Ce dernier sursauta, et Quent près de lui failli tomber de sa chaise. Sans leur laisser le temps de répondre, le chevalier traversa la pièce à grandes enjambées. Sans nul doute, son apparition, sa lourde cape volant derrière lui et laissant apparaitre ses plaques d’armure et son épée au côté, tout cela lui avait donné un aspect bien plus terrifiant qu’il ne l’aurait voulu. Mais il profita de sa position pour l’affermir. Il lui fallait des réponses, et vite. Il s’arrêta près du fauteuil de l’aventurier et le toisa de toute sa hauteur. Dom était grand. Accoutré comme il l’était et aidé de son entrée fracassante, il paraissait immense. « Marie s’est effondrée de sommeil sur des livres qu’elle n’aurait jamais dû tenir entre ses mains. Tu sais très bien, Kolwako, le danger qu’ils représentent. Nous avons étudié la Corruptions tous les deux, et tu sais autant que moi que le simple fait d’enquêter dessus est dangereux. Je n’ai aucun doute que ces livres et leurs sujets y sont liés. Pourquoi lui as-tu donné ? Quels sont ses problèmes et ces rêves qu’elle fait et qui la hantent ? Des réponses, Kol, et vite ! — C’est… Je pense qu’elle est en danger, répondit-il en reprenant un peu de sa contenance et en délaissant ses questions pour plus tard. Pour une raison que j’ignore, elle semble impliquée dans une catastrophe à venir, impliquant ceux qu’on nomme les Grands Anciens. Elle fait des rêves qui y font clairement allusion. Qu’elle en rêve sans en avoir entendu parler auparavant ne me semble pas un hasard. J’ai accepté de lui donner ces ouvrages pour qu’elle y trouve des éléments de réponse. Elle-seule peut savoir ce qu’il se passe sous son petit crâne, c’est le mieux que je pouvais faire pour elle. » Dom se frotta les yeux en réfléchissant. « Si elle doit trouver quelque chose ce sera à Torcuba n’est-ce pas ? Je vais l’accompagner. Si elle doit trouver quelque chose, ce sera sous bonne garde. J’ai déjà affronté ces monstres, je les connais. — Attends, j’ai quelque chose pour toi, dit-il en fouillant dans un tiroir. C’est une pierre-étoile. D’origine, bien entendu. Je l’ai retrouvée tout à l’heure. Donne-la à Marie, elle saura quoi en faire. — Très bien, répondit Dom en s’en emparant et la déposant dans une de ses sacoches. Tant que j’y suis, c’est un des livres qu’elle avait dans sa chambre. Je doute qu’elle ait pu le lire, il n’est pas traduit. — Très juste. Je lui ai donné au cas où. On m’a dit qu’il concernait des Anciens. — On t’a mentit. Des labours et procédés d’agricultures, c’est son titre. — Tu arrives à le lire ?! — C’est du Ryalkan. Je viens de là-bas. Je te laisse les explications pour plus tard, je n’ai pas le temps. Pendant ce temps, j’aimerais que tu me trouves tous les ouvrages dans cette langue que tu possèdes. Je reviendrais dès que possible t’aider à les traduire et trouver ce que je cherche. Là je n’ai pas le temps. Je dois rejoindre Marie. — Dom, attends ! s’écria Quent en le retenant par le bras. S’il-te-plait… prends soin d’elle. Je vais tout faire pour arriver à vous rejoindre à Torcuba à temps. Je compte sur toi pour veiller sur ses frisouilles. — N’aie crainte mon ami. Il ne lui arrivera rien. » :air:Sans patienter, Dom reforma le portail et s’y engouffra. Il se referma derrière lui, laissant Kolwako et Quent dans la pièce sombre, les bougies encore vacillantes sous l’effet de la magie. Une fois dans sa chambre, il rassembla rapidement quelques affaires et fonça chez Marie. Elle dormait toujours. Il parcourut encore une fois ses notes, et survola en vitesse l’un des livres qu’elle avait beaucoup mentionné. Il de fourra en vitesse dans une sacoche, et prit une carte pour établir rapidement un itinéraire avant de s’approcher du lit. « Marie ? Heey, Marie ? chuchota-t-il. — Mhh... moins fort sivouplait... — Marie, c'est moi, Dom, réveille toi. — Je suis parfaitement réveillée. » Elle se frotta les yeux et s’assit maladroitement sur son lit, cherchant le regard du jeune homme. « P'tite Marie, fais un effort, écoute moi, il faut qu'on parte et qu'on aille à Torcuba. » Il lui désigna la carte qu’il tenait toujours entre les mains. Il espérait que le sérieux de sa voix la convaincrait. L’effet fut trop efficace. Elle se leva brusquement et voulut s'éloigner lui. « Pas Torcuba, non, non, surtout pas ! » :air:Dom la prit par les épaules et la secoua vivement. « Écoute-moi ! On va aller à Torcuba, et en chemin tu devras TOUT m'expliquer. Reprends-toi, écoute-moi ! » Elle ferma les yeux et inspira profondément. Il put voir son visage se détendre à mesure qu’elle se calmait. Bien que l’inquiétude et la peur teintait toujours son regard, les maux de crâne semblait l’avoir délaissée pour quelques temps au moins, et elle en paraissait beaucoup plus soulagée qu’elle ne voudrait jamais l’avouer. « D'accord, oui, Torcuba. Je vais t'expliquer. » Tous deux descendirent. Dom soutint son amie du mieux qu’il put. Il la surveillait de près. Pour l’instant, elle avait encore du mal à marcher. La fatigue, son réveil récent et la brume qui habitait encore son esprit ne l’aidaient pas. Pour lui faciliter le trajet, il l’amena à la tour du Splash pour lui payer le voyage. Rien que sur le chemin, elle reprit un peu de sa vigueur et reconstitua ses défenses, ce qui le rassura un peu. Il rengagea le sujet : « Bon, pour commencer, explique-moi ce que tu as appris en lisant ceci. » Il pointait du doigt La Légende de Titus Crow, qu’il venait de sortir d’un de ses sacs. La plupart des observations de la jeune fille provenaient de ce livre, qui devait être le plus important. « Ça remonte à la destruction de mon village, pour ce que j'en sais. De ce que je savais, l'arrivée des monstres dans mon village avait été provoquée par l'ouverture d'un simple portail vers le Nether, mais c'est en réalité plus complexe que ça. » Sa voix s'assura un peu. « J'ai fait des recherches dans les bouquins de Kolwako. Ils évoquent tous des « monstres » qui auraient été là bien avant les Hommes. Ça aurait été des « monstres-dieux », en fait. Après un conflit interne, une partie des monstres ont été enfermés, mais ce qu'il faut comprendre c'est qu'ils étaient si puissants mentalement que c'est mentalement qu'il fallait leur poser des barrières. Les barrières mentales, de ce que je sais, sont des petits fossiles, les étoiles-fossiles. Les « monstres » sont donc piégés, bim, les Hommes arrivent après des milliers d'années, et là arrive un certain Titus Crow. À un moment critique de l'Humanité, ces monstres – certains – se libèrent, et ce monsieur arrive, à l'aide d'amis et de ces pierres-fossiles-étoiles, à sceller de nouveau les prisons de ces monstres. » :air:Dom la regarda dans les yeux. Les pièces du puzzle se rassemblaient dans sa tête à mesure que Marie les lui apportait. Elle l’avait compris et lui laissa le temps de faire son cheminement. Comme d’habitude, elle était la seule à le comprendre. Toujours. Quoi qu’il arrive. Si les circonstances avaient été moins graves, il en aurait probablement sourit : c’était une jeune femme étonnante. Lorsqu’il fut certain d’avoir exploré toutes les questions et hypothèses que cela impliqué, il reprit le fil de la conversation. « Quel rapport avec toi ? Est-ce une légende ou bien plus ? — Le rapport avec moi... En faisant des recherches dans le carnet que j'avais fait le long de mon périple, je cite souvent des monstres qui ne ressemblent pas à ceux du Nether. De plus, je fais depuis plusieurs jours des rêves étranges, en revivant sans cesse la destruction de mon village et la perte de ma famille, mais où certains monstres décrits dans les livres apparaissent. — Comment ça ? — Bon... Il y a plusieurs types de monstres, de ce que je sais, et le plus puissant d'entre eux est nommé Cthulhu, et il ressemble à une immense pieuvre, aux dimensions gigantesques, et qui se déplacerait comme un ver dans les entrailles de la Terre, à la différence qu'il ferait fondre les roches pour avancer... Et dans mes cauchemars, je vois la terre se gondoler, se déformer, comme si quelque chose voulait en sortir… — Quelque chose comme... une pieuvre géante ? Ça dépasserait l'entendement tout ça, ce n'est qu'une légende... — Je me suis dit ceci également, jusqu'à ce que je fasse trois découvertes dans certaines archives... D'une, il se trouve que l'homme qui avait ouvert le portail était, après relecture de mon carnet, le frère de mon père. Je l'ai bien identifié. — Ton oncle ? Pourquoi a-t-il fait ça ? — Attends, attends. De deux, il se trouve qu'après maintes recherches sur ce fameux Titus Crow, je sais — ne me demande pas de t'expliquer comment, trop long — qu'il est l'arrière arrière arrière arrière, et caetera, grand père de l'oncle sus-dit. — Titus Crow est de ta famille ? — Affirmatif. Et de trois, il faut savoir qu'un de leur plus grand pouvoir est la télépathie et la faculté de s’immiscer dans les pensées des Hommes. Je pense, mais ce n'est pour le coup qu'une théorie, que mon oncle a été influé par les pouvoirs psychiques de ces créatures, pour retirer une de ces pierres-fossile qui emprisonnait un monstre. — Pourquoi s'en prendre à ton oncle, le descendant de Titus Crow ? Une coïncidence ? Je suis prêt à parier l'arbre du Kubnigera que non. — Tout juste. » Ils étaient au sommet de l’arbre du Splash. Marie s’assit sur l’oiseau géant, mais Dom hésitait. « Écoute Marie, en entrant dans la chambre tout à l'heure, et en te voyant endormie sur tes livres, j'avoue avoir lu en diagonal tes notes, et surtout avoir vu une carte où figurait Torcuba. C'est pour ça que j'ai voulu t'y emmener. Mais au vu de tout ça... Je commence à comprendre que ce n'est pas forcément une bonne idée... — Si, si, c'est même une excellente idée, dit-elle en lui tendant la main pour le hisser avec elle sur la selle du volatile, qui s’envola aussitôt. — Je ne comprends pas. — Si la créature s'en est pris à mon oncle, c'est pour évidemment l'éliminer, éliminer la descendance de Titus Crow. Mon oncle n'a pas d'enfant, mais en revanche... —... il a une nièce ? — Je crois bien. — Bon... Et ensuite, que s'est-il passé à ton village ? Peut-être que ton oncle et tes parents ont réussi à replacer cette pierre-fossile-étoile et à enfermer le monstre. — J'ai de bonnes chances de penser que mes parents ne savaient rien de tout cela, mais je pense en effet que le monstre a été neutralisé, du moins partiellement. — Le rapport avec Torcuba ? — Tu ne le vois pas ? Il est évident pourtant ! Un monstre tentaculairement gigantesque et mythique !:air: — Le Kraken ? Le Kraken de Torcuba fait partie des monstres du cycle de Cthulhu ?:air: — Voilà ma théorie : le monstre qui a attaqué mon oncle devait être très puissant pour lancer des appels télépathiques en étant enfermé. J'ai lu que le plus puissant était Cthulhu, je pense donc que ce monstre devait être au moins Cthulhu. Mais il y a mieux. Le grand Cthulhu avait une fille cachée, une espèce de monstruosité tentaculaire, que connaissait Titus Crow. D'après ce que je sais, cette fille cachée, s'appelant Cthylla a été neutralisée... devine où ?:air: — La réponse est dans la question ! Le Kraken serait une des filles de Cthulhu ?:air: — J'en suis certaine ! Et je sais également que quelqu'un a été titiller le Kraken – ou Cthylla - il y a quelques années...:air: — Ton oncle ! Le descendant de Titus Crow, ton oncle, a étudié tout ça, et est allé voir du côté de Cthylla, sans doute pour éliminer sa menace... Il aurait réussi à la blesser et à la neutraliser... Et Cthulhu, son père n'a pas apprécié, et s'est emparé télépathiquement de ton oncle pour le pousser à libérer des monstres et sans doute lui-même en faisant enlever les sceaux qui les gardent ! Et il cherche maintenant à t'éloigner de Torcuba pour protéger son immonde rejeton...»:air: Sans qu’il comprenne comment, Marie s’effondra et les larmes coulèrent sur ses joues, s’envolant de temps à autre, portées par le vent. Tant d’émotions émanaient d’elle qu’il fut pris au dépourvu et submergé. Les larmes lui montèrent aux yeux lui aussi, mais elle n’en sut jamais rien. Elle avait besoin de soutien, pas de quelqu’un à consoler pour une peine qui n’était pas la sienne. Il ravala la boule qui lui était montée dans la gorge et l’enlaça par les épaules. La jeune femme était la personne la plus censée et surprenante qu’il connaisse. Même si l’histoire pouvait paraître folle, les pièces s’emboitaient trop bien. Le schéma mental qu’avait établi Dom à mesure du récit de son amie était sans faille. Il le rangea dans un tiroir de sa tête pour le garder sous la main.:air: Bientôt, ils arrivèrent près de leur destination. En posant pied à terre, Dom plongea son regard dans les yeux encore humides de la jeune fille. Il s’attendrit et la prit encore une fois dans ses bras, sans pouvoir s’empêcher de remarquer qu’il était si grand qu’elle disparaissait presque. Elle essuya ses larmes avec une détermination nouvelle. Le jeune homme fut cependant pas dupe et voyait toujours toutes les émotions qui brûlaient au fond de ses yeux. Elle le savait. Il la comprenait lui aussi. Tant de soucis et de responsabilités pour quelqu’un de si jeune…:air: « Excuse-moi, je devrais pas, reprit-elle d’une voix sûre. Il faut aller de toute urgence à Torcuba. On a essayé de m'en éloigner, et je sais pourquoi maintenant. La fille de Cthulhu devait prendre la digne succession de son père en faisant de la Terre un chaos où se développeraient les autres divinités-monstres. Il faut empêcher ça, à tout prix.:air: — Écoute Marie, je suis allé voir Kolwako en voyant ces bouquins, en hurlant de me donner une explication sur tout ça, le pauvre... » Il sourit tristement. « Il m'a dit « gnagnagna, catastrophe, gnagna, Grands Anciens, gnagnagna, pierres-étoiles », et il m'a ordonné de te donner sans plus tarder ceci. » Il lui tendit une petite pierre, un joli petit fossile qui tenait dans la paume, en forme d'étoile à cinq branches. Elle le prit dans sa main d'un air médusé. « Il m'a spécifié qu'elle était d'origine. »:air: Elle s'éloigna de quelques pas de lui et lui fit ::air: « Hors de question que tu viennes avec moi maintenant. Tu as été en contact avec ceci, et tu as dans ton esprit trop de savoir sur le Mythe de Cthulhu, c'est trop dangereux. Je vais mettre ce petit caillou en place et on en aura fini avec les tentacules. Ne viens pas, s'il te plait. »:air: Malgré ce qu’elle dit à cet instant, Dom ne pouvait se résoudre à la laisser seule. Il fit mine de s’éloigner, lui laissa un peu d’avance, et la suivit discrètement sans qu’elle s’en doute. Aussi furtif qu’une ombre, il marchait sur les plaques de mousse, les racines, les grosses branches, et les pierres. Tout ce qui jonchait le sol et était assez lourd pour supporter le poids du jeune homme sans broncher faisait office de marche. Et lorsque c’était impossible, il se hissait à un arbre et poursuivait sa route de branche en branche.:air: Bientôt, ils parvinrent à près de Torcuba. Le jeune homme put apercevoir Quent, Pongboum et Lord Mick. Ils étaient aux îles Holmes, là où les avaient rejoints Dom un peu plus tôt. Marie les aperçut. Eux non. Elle donna l’impression d’aller à la mort, et ne les appela pas. Dom fit un détour et les interpela. Il leur exposa la situation, et leur enjoignit de prendre deux scaphandres et de le rejoindre à la muraille de Torcuba. Ne les attendant pas, il rattrapa la jeune femme. De son arbre, Dom sauta sur la muraille légèrement en contrebas. Elle n’était pas encore détruite à cet endroit. Le Kraken l’avait éventrée un peu plus loin. Il suivit le chemin de ronde tout en gardant un œil sur son amie, toujours en train de marcher sur la plage. Elle atteint la partie effondrée et se hissa dessus. Il repéra comme elle l’entrée de la grotte, sous le crâne géant. Elle mit son scaphandre et plongea dans les eaux noires de Torcuba. Le jeune homme regarda par-dessus son épaule. Le groupe arrivait au pas de course, deux scaphandres à la main. Mais ils étaient trop loin. Il leur faudrait encore au moins cinq minutes pour arriver. C’était trop long.:air: Dom s’agrippa à une pierre de la muraille. Elle faisait partie de ces constructions où les pierres ressortaient assez pour faire de merveilleuses prises. En quelques sauts il fut en bas. Il tira une de ses flèches et griffonna rapidement dans le sable de vagues instructions sur la direction à emprunter, et planta sa flèche à côté pour qu’ils ne les ratent pas. Il concentra sa magie. Pas le temps d’attendre les scaphandres. Il plongea tête la première. Son corps entier était entouré d’une bulle d’air. Il s’en étonna. C’était ce qu’il avait escompté, mais l’efficacité de sa magie croissait sans cesse sans qu’il se l’explique. Il n’avait jamais maîtrisé que celle du temps. Était-ce un autre effet du recouvrement de ses souvenirs ? Ou était-ce simplement qu’une bulle temporelle et une d’air étaient au final très semblables ? Il écarta encore une fois la question. Elles trouveraient leur réponse plus tard. Il approchait de l’entrée.:air: Le champ de force qui la gardait le fit frémir lorsqu’il le traversa. Il était d’une puissance improbable, ce qui laissait imaginer la monstruosité de ce qu’il retenait prisonnier. Marie devait probablement avoir déjà replacé la dernière pierre. Lorsqu’il émergea de l’onde glacée, Marie était étendue sur le sol. Le bouclier empêchait visiblement que trop d’eau n’entre dans la caverne, probablement pour miner les forces d’un monstre aquatique comme Chtylla sans la tuer. La jeune femme était — par chance — en-dehors du cercle qui retenait la créature prisonnière. Furieuse, cette dernière fracassait en vain ses tentacules sur le champ de force. Elle en voulait à Marie. De fait, elle avait une flèche fichée dans le corps, dans ce qui pourrait s’apparenter à la tête chez pareille monstruosité. Dans la pénombre, Dom ne distinguait vraiment que ses yeux brillants de colère et les reflets luisants qui couraient sur la peau humide de ses tentacules agités.:air: Il se campa devant le cercle. Ce monstre n’était pas de la même nature que Nigrum ou Umbra. Eux étaient d’un autre plan, d’une autre essence. Pas lui. En revanche, il ne faisait aucun doute qu’il était infecté par la corruption libérée par Nigrum et les autres de ses semblables qui avaient déjà arpenté le monde par le passé. Était-ce là l’origine des monstres-dieux ? Des créatures perverties ? Ce n’était qu’une hypothèse, mais elle méritait réflexion. Dom se promit de se pencher sur la question. Pour l’heure, l’aura que dégageait le Kraken le fit frissonner, et les poils de sa nuque se hérissèrent. Il écarta sa cape d’un geste sec, et elle claqua derrière-lui en faisant vrombir l’air. En un instant, des yeux à facette de fourmi améliorèrent ses yeux d’humain. Ils lui offraient une vision plus large, plus précise, avec plus d’images perçues en une seule secondes, ce qui lui donnaient une sensation de ralentit et de clarté hors du commun. Si l’on y ajoutait des ocelles infrarouge, Dom était inégalable dans le noir complet. Il plaça sa main sur la garde de son épée, et fit un pas à l’intérieur du cercle. Au même moment, la tête de Kolwako émergea de l’eau. Il lança sa main pour attraper le rebord.:air: Le chevalier libéra son pouvoir une nouvelle fois. Il avançait d’un pas calme vers Chtylla. Elle lança ses tentacules sur lui, sentant sa détermination à l’envoyer dans l’autre monde. Le regard dans le vague, il voyait tout, chacun de ses mouvements. Trop lente. Il s’écartait avec aisance, esquivait, puis envoyait Hexalon d’un simple coup de poignet. La lame magique tranchait sans effort tout ce qui parvenait à sa portée. Pour celle qui tranche même le vent, ce monstre n’était rien, manié avec la rapidité de Dom. Il était déjà rapide en tant que Ryalkan de pure souche, bien plus qu’un humain. Avec son sang de fourmi et son sortilège temporel, il était un meurtrier implacable. Il pressa la cadence et se fraya un chemin entre les assauts quasi inertes du monstre. D’un bond, il se hissa sur son crâne, la pointe de sa lame vers lui. Tous deux s’immobilisèrent. Chtylla n’était pas seule. Une conscience puissante se heurta aux défenses mentales du jeune homme. Elle était affaiblie, emprisonnée. Chtulhu tentait de broyer l’esprit de Dom pour sauver sa fille. Le chevalier ne put retenir un sourire amer et satisfait. Les assauts de Nigrum et des années de repli lui avaient forgé des défenses telles que même le grand monstre-dieu ne parvenait pas à les franchir. Son sourire s’effaça bien. Le message était clair. Il n’eut aucun doute qu’en tuant sa fille, en lui offrant le motif de vengeance adéquat, ce monstre se libèrerait sous la fureur et relâcherait le chaos sur le monde.:air: À regret, Dom écarta la pointe d’Hexalon d’une Chtylla gémissante. Elle vivrait. Mais piégée, mutilée, effrayée et épuisée par la perte de ses membres et de plusieurs litres de sang, elle ne nuirait plus avant longtemps. Le jeune homme sauta en arrière et relâcha son pouvoir une fois en dehors du cercle. Au moment où le flux temporel reprit son cours normal, Kolwako posait sa main sur le rebord. Il se hissa hors de l’eau. :air: « Journal et recherches de Sir Dom von Fulmen, Scribe et Chevalier impérial, dirigeant de l’alliance Myrméco-Lacustre de la Colonie du Kubnigera, et Sexué Femelle en charge de la diplomatie de la fourmilière de Bel-O-Kube, page 304, 1e Pampélune, an 101 du calendrier Erachien ;:air: [… ] Nous avons ensuite transporté Marie jusqu’à la terre ferme, puis sur les Îles Holmes. Elle y passe un repos bien mérité. Son état est stable, et je vois à son visage que ses tracas sont bien moindres. Elle parait plus éclairée et semble revivre. Cela me soulage. À l’heure où j’écris ces lignes, elle n’est toujours pas réveillée.:air: Kolwako fut horrifié de l’état de la créature, et fut surpris qu’elle n’ait pas périt. Comme j’étais sous l’effet de mon sort, la confrontation avec Chtylla était beaucoup trop courte pour qu’il en ait vu quoi que ce soit. Je n’ai révélé que dans les lignes de ce journal que j’ai souhaité la tuer. Le bon sens m’empêcha de le faire. Sa position connue, je pourrais probablement lui extirper des informations un jour. En attendant, il est plus prudent de la garder en vie. Le courroux de son père n’est pas quelque chose que je souhaite affronter, et je doute même de le pouvoir. Je ne pense pas utile d’apprendre à Marie que je l’ai suivie et que j’ai davantage blessé Chtylla qu’elle ne l’avait déjà fait. Au moins n’est-elle pas blessée.:air: Une fois à l’abbaye des Îles Holmes, j’ai accompagné Kolwako jusqu’à ses archives, pour y retrouver tous les ouvrages en Ryalkan ou ancien Ryalkan qu’il possède. J’ai ainsi rassemblé dix-huit volumes à l’heure actuelle, et Kolwako poursuit les recherches. La chance me sourit par bonheur lors de mes recherches de ces derniers jours. Alors que je faisais l’inventaire des livres et dressais un rapide résumé de leur contenu, pour ensuite les traduire, je suis tombé sur un ouvrage qui pourrait bien être la clé de mes recherches. Le cinquième livre de ma pile, sobrement intitulé « Portails et plans », semble restituer une grande part du savoir des anciens Ryalkans sur le sujet. J’ai bon espoir que son étude m’apportera des éléments de réponse.:air: J’ai commencé à l’étudier dans la chambre de Marie, afin de pouvoir toujours garder un œil sur elle, et en délaissant parfaitement tous les autres livres, dont j’ai simplement finit la traduction des titres. Sa compagnie, même inconsciente, me calme et m’aide à réfléchir. Mes maux de tête sont toujours présents et me forcent certains jours à tirer les rideaux de la pièce. Par chance, c’est encore supportable, et mon travail détourne mes pensées de la douleur. J’en parlerais à Marie dès que possible. Je la sais sujette aux douleurs crâniennes comme moi, peut-être pourra-t-elle donc m’apporter quelques pistes sur mon cas. J’ai parfois l’impression qu’elle en sait davantage sur moi que je n’en sais moi-même.:air: Mes quelques essais de portails intradimentionnels sont plutôt concluants. Cela me fera gagner un temps précieux pour mes déplacements. Dans tous les cas, un nouveau chapitre se clos. Je poursuivrais mes études dans ce journal, mais tout promet de rester calme jusqu’à ce qu’enfin j’arrive à ouvrir une voie vers mon pays natal.:air: C’est une page que je tourne, mais j’en aurais d’autres à noircir… […] » Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ankorkibil Posté(e) le 17 octobre 2014 Partager Posté(e) le 17 octobre 2014 Comme demandé par Dom, j’édite le nom du topic. PS: Que de lignes ^^ Cordialement et amicalement, The_dionysos, roi de Galianör Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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