Aller au contenu

Légende Stonecrianne


Tasterix
 Partager

Messages recommandés

Nous n’existons plus que dans les pierres gravées de runes, les creux des carcasses qui jonchent les routes pavés de vos terres, les cris des corbeaux qui viennent harceler vos enfants aux couchés des soleils.

 

Nous ne vivons plus que dans les grottes, les terriers, les arbres morts et les sentiers perdus. Nous ne sommes plus rien face à vos rêves, vos espoirs. Ceux là nous mangent, nous dévorent. Nous nous méfions de l’avenir et nous tournons vers des âges perdues, le regard vers d’anciennes contrées égarées par les histoires des temps et les socles des savants. Nous n’existons plus que dans vos souvenirs, car nous ne sommes que nostalgies. Croyez-le ou non, les Légendes sont des êtres de nature existante, aux souffles épars mais présentes, qui glacent vos coeurs et brûlent vos langues. Les Légendes sont belles et bien réelles mais appartiennent à un monde inconnu. Nous appartenons à un monde oublié.

 

Regardez nous, apprenez de nos paroles, et un jour peut être saurez vous grandir de vos actes et prendre conscience que même vous - êtres dotés de chaire et de sang - même vous pouvez devenir… Une légende.

 

 

:book: L’eau du puits n’est plus rouge. :book:

 

Il est des récits que nous taisons par peur de s’égarer dans d’autres histoires telles que les chansons de bataille ou les palabres de guerres. Il en est d’autres que l’on peine à raconter car leur tendance même nous incite à croire à une histoire réelle, et la réalité n’en devient alors que plus effrayante, car il est de bon ton de préférer la fiction lorsqu’il s’agit de choses d’horreur. Cette histoire n’entre dans aucun des deux récits, car elle n’est ni une histoire de guerre, ni une histoire effrayante, bien que le début parla de guerre, et que la fin se termina de façon effroyable. Mais j’en oublie toutes les commodités, laissez moi donc vous présenter Maria.

 

Maria s’appelle Maria et existe car elle a la faculté de posséder un nom facile à retenir et le caractère innocent d’une enfant. Maria est blonde aux yeux bleus, et voyage tous les jours entre sa ferme et le puits afin d’y puiser de l’eau. Bien que parfois elle s’attèle à la cueillette de quelques Lys des Bois. Maria n’a rien à craindre sur sa route. Il n’y a pas de loup malveillant, pas d’étrange inconnu armé de hache, pas de vilaine sorcière aux verrues nasales ressortant. Non, sur le chemin entre sa maison et le puits, il n’y a que des fermiers qui connaissent Maria, le boulanger qui transporte ses provisions et le garde qui surveille la route et parfois s’amuse à la taquiner.

 

Vous vous demanderez certainement quel est l’intérêt de cette fable si Maria ne rencontre ni ours enragé ni dragon affamé. Et moi de vous répondre de relire les premières lignes de texte. Car l’histoire parle bien d’une guerre, et se termine de façon effroyable. Mais je ne voudrais pas vous importuner trop longtemps avec mes répétitions, nous allons donc reprendre là où nous en étions. Maria, ce jour là, décidait d’aller au puits, afin de puiser de l’eau, comme le jour précédent, et tous les jours qui ont précédé ce jour. Arrivé à la croisée des chemins, là où la route menait d’un côté vers la forêt sombre et tortueuse, et de l’autre vers le village paisible et calme, elle décida de tourner vers le chemin qui lui convenait abordable pour se rendre au puits. Et donc, comme toutes les fois où elle allait puiser de l’eau, elle se dirigea vers le village qui fumait de vie.

 

Arrivée au village, un chien aboya dans la cour d’un fermier, montrant ses crocs et fronçant le museau en signe de représailles car la jeune enfant était entrée sur son territoire. Maria, elle, continua en se dandinant. Lorsque vint les premiers habitants, elle les salua d’un sourire contraint et donna même un hochement de tête au vieil aveugle dans le fond de la cour, que tout le monde prenait pour un fou. Le garde la siffla en rigolant, elle lui rendit un sourire coquin aux yeux aguichants, pour continuer sa route vers le puits. Arrivée au puits, elle s’attela à accrocher le seau sur la corde qui descendait dans les profondeurs de la terre, puis travailla la manivelle pour remonter le récipient remplit d’eau. Pendant ce temps le boulanger passait derrière avec sa mule et disparaissait derrière une ruelle.

 

Il vous viendra alors à l’esprit de rétorquer que cette histoire n’a rien de malheureux. Mais rassurez vous, j’avais bien précisé que ce récit parlait d’une guerre et se terminait de façon effroyable. La patience est mère de vertu et l’écoute attentive est d’une grande importance pour l’attachement au personnage. Car voyez vous, Maria en avait finit avec son seau qui était rempli d’eau, et rentrait à la maison. Sur le chemin du retour, elle recroisa le garde et décida de s’approcher de lui. Elle lui tendit la main et ce dernier l’embrassa. Il lui fit des compliments et signala que dans son état, il était triste de ne pouvoir la combler. Riant de cette plaisanterie grotesque, elle reprit son chemin. Elle décida d’aller donner un peu d’eau au vieux fou. Entre ses bandages l’homme marmonna quelques mots, un remerciement sans doute…

 

Sur le chemin, le chien s’était apaisé et n’aboyait plus. Les fleurs n’étaient plus là car elles étaient déjà cueillies. La forêt s’était couverte de brume et la caravane du boulanger disparaissait derrière l’épais brouillard. Une fois chez elle Maria alla à la couche de son père. Lui tendit une serviette imbibée d’eau. Elle essuya son front. Et tandis que son père soufflait un dernier soupir, elle lui raconta sa journée, comme chaque jour depuis qu’elle allait prendre l’eau du puits elle la lui avait racontée.

 

« Bonjour père, le garde estropié m’a encore fait des avances aujourd’hui. Quel homme charmant… Ton frère se remet peu à peu de ses blessures, et porte toujours des bandages. Quant au boulanger, il se rend au château donner du pain et de l’eau aux blessés. Et le chien que tu avais pris au combat se remet de ses années à servir le Royaume. Ah ! J’ai une bonne nouvelle, père. L’eau du puits n’est plus rouge ! »

 

Mais l’homme n’entendait déjà plus, et avait quitté ce monde avant même que sa fille n’ait commencé à lui parler. Et Maria, seule dans la chaumière, regarda par la fenêtre, à l’horizon. Dans les prés, au-delà de la colline du grand chêne, elle revit les souvenirs du passé. La guerre avait frappé il y a quelques temps, les fumées noires du village détruit s’étalaient encore dans les champs de blé. Maria attrapa les fleurs pour les mettre sur la tombe de sa mère tandis qu’aujourd’hui son père partait. Et Maria, de sa tendresse infinie, regarda le seau d’eau.

 

Elle comprit que demain, ainsi que tous les jours qui suivraient le lendemain...

Elle n’irait plus jamais au puits.

 

:sheet:

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Créer un compte ou se connecter pour commenter

Vous devez être membre afin de pouvoir déposer un commentaire

Créer un compte

Créez un compte sur notre communauté. C’est facile !

Créer un nouveau compte

Se connecter

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous ici.

Connectez-vous maintenant
 Partager

×
×
  • Créer...